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La Ville morte est bien ressuscitée

Nancy
Opéra national de Lorraine
05/09/2010 -   et 12, 14*, 16, 18 mai 2010
Erich Wolfgang Korngold : Die tote Stadt
Michael Hendrick (Paul), Helena Juntunen (Marietta), Thomas Oliemans (Franck), Nadine Weissmann (Brigitta), André Morsch (Fritz), André Post (Victorin, Gaston), Yuree Jang (Juliette), Aurore Ugolin (Lucienne), Alexander Swan (Comte Albert)
Chœur de l’Opéra national de Lorraine, Chœur d’enfants Les Mirabelles, Orchestre symphonique et lyrique de Nancy, Daniel Klajner (direction musicale)
Philipp Himmelmann (mise en scène), Raimund Bauer (décors), Bettina Walter (costumes), Gérard Cleven (lumières), Martin Eidenberg (vidéo)


(© Opéra national de Lorraine)


La Ville morte (1920) entrerait-elle enfin au grand répertoire en France ? Huit mois après sa réapparition à Paris, qui ne l’avait plus vu depuis la création scénique dans l’Hexagone en 2001 (seulement !), l’Opéra national de Lorraine en réalise une nouvelle production à marquer également d’une pierre blanche.


Philipp Himmelmann a semble-t-il gagné la confiance de la maison puisqu’il y a récemment mis en scène Le Chevalier à la rose et Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny. Sa première collaboration avec Raimund Bauer, qui signe les décors (superbement éclairés par Gérard Cleven), conduit à un visuel prégnant, plus onirique que fantastique et reposant sur d’astucieux effets de miroir et, surtout, de multiplication. Le salon de Paul, résumé à un fauteuil et un lampadaire, est reproduit à l’identique jusqu’à six exemplaires sur deux niveaux ce qui confère à cette scénographie au premier abord déconcertante l’aspect d’un échiquier. Comme ils n’apparaissant jamais ensemble dans une case, les chanteurs se voient dès lors confrontés à un double défi : interagir en parfaite synchronisation avec leur partenaire sans l’apercevoir tout en assumant les difficultés de leur partie. Ainsi Paul ne rencontre jamais Marietta en qui il voit son épouse décédée, tout n’étant que le fruit de son imagination depuis le début. Venant renforcer l’émotion de ce spectacle ramassé, et se déroulant d’ailleurs sans entracte, un portrait géant de Marie, qui s’anime au premier tableau, recouvre tout le fond de la scène. Une fête quelque peu canaille dans le tableau suivant oppose un contraste saisissant avec l’intense poésie qui domine cette lecture fouillée de ce coup de maître d’un Korngold de vingt-trois ans.


L’Orchestre symphonique et lyrique de Nancy se montre au point et persuasif dans cette partition virtuose et détonante qui convoque, comme chacun sait, Strauss, Puccini voire Stravinsky et Zemlinsky. Daniel Klajner évite la saturation, mesure la puissance et nuance la dynamique ce qui assure la transparence de la polyphonie et préserve les voix, soumises à rude épreuve mais valorisées par une écriture lyrique à souhait. Aux côtés des fort bons Franck de Thomas Oliemans, Brigitta de Nadine Weissmann et Fritz d’André Morsch – excellente sérénade dans le tableau médian –, les deux rôles principaux méritent les plus vives louanges. Michael Hendrick incarne un Paul fragile et poignant : sans doute restreint-il par trop son registre expressif mais la vaillance et le timbre sont bien ceux d’un Heldentenor. Pour Marietta, le choix s’avère également payant : Helena Juntunen possède également la carrure requise pour contrer les forces émanant de la fosse. Allumeuse, pulpeuse, d’une sensualité flirtant parfois avec la vulgarité, la soprano ne rate aucune occasion pour écarter ses jambes galbées dans des élans dignes de ceux d’une Salomé mais aucune faille vocale ne vient gâter sa composition.


Sous l’impulsion de Laurent Spielmann depuis presque dix ans, l’Opéra national de Lorraine accorde une place de choix aux ouvrages moins courus : encouragé par cette fulgurante réussite, aura-t-il l’audace de défendre Violanta, Der Ring des Polykrates, Das Wunder der Heliane et Die Kathrin ?


Le site de l’Opéra national de Lorraine



Sébastien Foucart

 

 

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