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Complèter les exemples de réalisation de musique de cérémonie Ambronay Abbatiale d’Ambronay 09/27/1997 - " Lo Spozalizio : Le Mariage de Venise à l’Adriatique ".
Oeuvres d’Andrea & Giovanni Gabrieli, Gioseffo Guami, Cesario Gussago, Lodovico Viadana, Tiburtio Massaino, Claudio Monteverdi. The King’s Consort. Robert King (direction) Axiome : Le cérémoniel a toujours du succès.
Corrélat : La musique cérémonielle a du succès.
Scolie : A l’heure où Pierre Legendre (Paris, Fayard) étudie les pouvoirs du cérémoniel d’Etat, les musiciens déclinent une des dimensions dudit cérémoniel. Entre formules, gestes, parcours et tenus convenus, la musique joue en effet un grand rôle, que les musiciens modernes (entendons les baroqueux) revivifient. Il faut évidemment nuancer. Le cérémonial est un des nombreux chemins qui unissent à l’époque sphère religieuse et pouvoir temporel, si tant est que l’on puisse séparer deux modèles dont l’action est fondée sur le même principe : le pouvoir vicarial. La souveraineté du Seigneur (du ciel, ou de la terre) a besoin d’une mise en forme de sa majestas, attribut fondamental du pouvoir légitime : la représentation fait partie du pouvoir. Lors de cette parade sa force se fait performative : on montre le pouvoir en puissance et non en acte. Dans cet univers la musique relève d’un ‘dire’ de la majesté.
Le cérémoniel musical a toujours subsisté dans la musique dite ‘militaire’. Aucune interruption dans l’histoire de cette tradition. Mais cette permanence historique n’est pas visible dans d’autres genres musicaux jouissant pourtant d’une perfection et d’une intelligence autre. Plus de symphonies ‘pour le souper du Roy’. On pourrait arguer qu’en ce qui concerne la musique religieuse, la permanence est décelable dans l’instrument ecclésiastique principal : l’orgue. Mais des motets et autres chants, il ne reste pas grand chose.
Les musiciens se sont donc attachés à remettre au goût du jour certains cérémoniels de très grande valeur musicale. Entre pompe cardinalice et sceptre princier on se rappelera Hugo Reyne (Delalande, Symphonie pour le Souper du Roy ; d’ailleurs présent dans ce programme à Ambronay le 18 octobre dans une soirée exceptionnelle avec feu d’artifice et mets succulents), Jean Lionnet qui recrée avec Gérard Lesne tout un parcours ténébreux de Leçons, et Paul Mc Creesh couronnant à nouveau un Doge avec ses Gabrieli Consort & Players.
Sur le même modèle (tambours, sonneries de cuivres, grands cori spezzati, avec quelques ‘habitués’ de ce genre de répertoire : Robert Harre-Jones, Angus Smith, James O’Donnel, Jeremy West, Susan Addison, &c.) Robert King compose un programme dans le style d’ " une journée à Venise ". Ce sera celle du Spozalizio. Le président du Minor consiglio, héritier du duc byzantin de la Venise du VII°siècle, est le fameux Doge. Il doit validé son élection à la tête de la ville par un serment (promissio ducalis) et une confirmation annuelle, celle-ci étant une cérémonie des " épousailles de la mer " : Spozalizio del mare. C’est cet ensemble qui est reconstitué avec deux temps : la procession sur la lagune, puis le service religieux de San Nicolo. Ne pouvant décrire toutes les nombreuses pièces, nous observerons les caractéristiques générales aisément perceptibles dans ce genre de musique qui fonctionne par addition de chœurs, multiplication des voix, augmentation (c’est à dire l’ornementation des parties), répétition (par simple reprise) et écho (miroir obligatoire de la virtuosité, rendu propice par la structure des chœurs multiples). C’est la masse, quasi minérale, qui compte : elle permet d’aller jusqu’aux limites du sonore, de la voix -d’homme en tout cas puisque le chœur est composé uniquement d’hommes. Limite de l’espace aussi par la " stéréophonie " que rendent ces nombreux cornets, sacqueboutes, trompettes, falsettistes*. Ce pouvoir de la musique doit impressionner : cette cérémonie n’a lieu qu’une fois l’an. Mais c’est là aussi un point faible pour l’auditeur moderne qui n’est plus sujet du Doge : cette masse de pierres précieuses peut lasser, surtout lorsque la direction professionnelle et uniforme de Robert King laisse peu de place aux ‘détails’ des émaux. Ce défaut connu est augmenté par l’absence d’articulation et surtout de virtuosité des cornets. Les ornements sont distribués trop parcimonieusement dans une musique que l’on attend rutilante et festive ! On n’oubliera pas toutefois, les excellentes fanfares, quelques très bons solistes comme Rodrigo dal Pozzo (ténor), le miroitement de l’ensemble de sacqueboutes, et une pièce impressionnante par son intériorité impalpable et sa magie : le cavalcantien Lieto godea de Giovanni Gabrieli.
Agrémentant ses concerts d’une belle exposition de livres et gravures (de la Bibliothèque municipale de Lyon) choisis pour leurs représentations de Venise à l’âge ‘baroque’, le festival d’Ambronay choisit la cohérence : en prenant la Sérénissime comme emblème de cet automne musical, il a réuni les Sonatori de la gioiosa Marca de Giuliano Carmignola, Trevor Pinnock et son English Concert dans du Vivaldi, William Christie dans des madrigaux montéverdiens. Il invitera prochainement le Concerto Soave avec Maria-Cristina Kiehr (" Musiques saintes vénitiennes au début du Seicento " : Strozzi, Bassano, Grandi, Cavalli, Rigatti, Monteverdi, le 2 octobre) et l’ensemble Il Giardellino (dans un répertoire particulièrement intéressant : Falconiero, Marini, Frecobaldi, Farina, Buonamente, Storace, Uccellini, le 4 octobre). Le chœur Akademia (Françoise Lasserre) se groupera avec le Concerto Italiano de Rinaldo Alessandrini pour les Magnificat et Gloria grandioses de Vivaldi (trois solistes vocaliseront les soirs des 4 et 5 octobre : Janet Williams, Deborah York, Sara Mingardo). Suivront les pleurs amers de La Didone de Francesco Cavalli & G.F. Busenello (crée en 1641 au San Cassiano), ces élans du cœur étant dirigés par Christophe Rousset à la tête l’orchestre de l’ " Académie Baroque Européenne " d’Ambronay réunissant de jeunes talents de plusieurs pays pour l’occasion (les 3 & 5 octobre au Théâtre de Villefranche sur Saône -Rhone). Le jeudi 9 octobre, à la Chapelle du Lycée Lalande (Bourg en Bresse, Ain), Jay Bernfeld déploiera les pouvoirs de Benedetto Marcello -psaumes et sonates- dirigeant de la viole son Fuoco e Cenere accompagné de la brûlante Guillemette Laurens.
Mais n’oublions pas trois autres événements du Festival d’Ambronay : avant deux oratorios (G. Lesne dans I Pellegrini al Sepolcro di Nostri Signore de Hasse -Dresde, 1742- et S. Kuijken avec Il Ritorno di Tobia d’Haydn -version de 1784, tous deux le dimanche 12 octobre à l’Abbatiale d’Ambronay) Gabriel Garrido et l’Ensemble Elyma nous raviront sans doute avec la première mondiale scénique du " Balet Comique de la Royne " de B. de Beaujoyeulx et Lambert de Beaulieu (1581), longtemps attendue par les amoureux des débuts de l’opéra. De même que pour Persée une attention particulière sera portée à la déclamation et à la chorégraphie, systèmes essentiels qui ont une part importante dans la rhétorique musicale de la fin du XVI° siècle (spectacle les 10 & 11 octobre à Ambronay). Mais ce n’est pas tout : de nombreux autres concerts attendent curieux et connaisseurs. Pour tous renseignements, joindre le bureau du Festival au (33)4. 74350870 (ou fax : (33)4 74381093).
* Après la suavité, la blancheur, la virtuosité, un des nouveaux paramètres développés par les falsettistes, surtout dans ce répertoire, semble bien être la puissance. On peut trouver des exemples saisissants dans les enregistrements de Paul Mc Creesh portant sur le répertoire évoqué dans cet article. Frédéric Gabriel
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