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Berceuses combatives

Paris
Athénée - Théâtre Louis-Jouvet
03/30/2010 -  et 7 mars 2010 (Dublin)
Johannes Brahms : Intermezzi, opus 117 – Klavierstücke, opus 118 – Rhapsodies, opus 79 n° 2 et opus 119 n° 4
Robert Schumann : Fantaisie en ut majeur, opus 17
Anton Webern : Variations, opus 27

Philippe Cassard (piano)


P. Cassard (© Vincent Catala)


Autour des ultimes pièces pour piano de Brahms, dont il vient de réaliser un enregistrement chez Accord (voir ici), Philippe Cassard a conçu un programme dense, mais nullement de nature à effrayer cet ancien vainqueur du concours de Dublin (1988), où il a d’ailleurs présenté le même récital trois semaines plus tôt: excellente occasion de retrouver le pianiste (né en 1962), peut-être un peu éclipsé ces derniers temps par le producteur d’émissions de radio.


Brahms qualifiait lui-même ses quatre derniers opus pianistiques de «berceuses de mes douleurs». Mais dès les trois Intermezzi de l’Opus 117 (1892), Cassard, partition sous les yeux, ne s’en tient pas à cette disposition d’esprit paisible, résignée ou crépusculaire: il offre de belles sonorités dans le Premier, avec simplicité, sans complaisance ni alanguissement; dans le Deuxième, les basses sonores et rondes, clefs de voûte de l’interprétation brahmsienne, font plaisir à entendre; le Troisième ne traîne pas davantage, la partie centrale témoignant même d’une combativité refusant résolument tout renoncement. Dans les Klavierstücke de l’Opus 118 (1893), il exacerbe les contrastes inhérents à ces pièces souvent de structure tripartite, dont la partie centrale s’oppose aux deux autres volets: les passages rapides sont très emportés et énergiques, voire parfois durs, et les passages lents sont mis en valeur par un toucher très raffiné. Très allant dans la célèbre Deuxième pièce, il donne une vision terrifiante de la non moins célèbre Sixième. Pour conclure, il rapproche une page antérieure, la Seconde des deux Rhapsodies de l’Opus 79 (1879), tour à tour électrique et mystérieuse, d’une autre Rhapsodie, la dernière des quatre Klavierstücke de l’Opus 119 (1893), avec impétuosité et brio, voire précipitation, sans toujours parvenir à éviter les accidents inhérents à de telles prises de risque.


Deux regards autour de Brahms: l’un en arrière, vers celui qui fut son père spirituel, l’autre en avant, vers l’un de ses lointains descendants, au-delà même de Schönberg. Le rapprochement avec Schumann est évident, notamment dans sa Fantaisie en ut majeur (1836), dont l’élan initial semble trouver un écho par exemple dans la première pièce de l’Opus 118: l’interprétation est certes amoureuse, passionnée, impatiente, fantastique, conquérante, voire violente et brutale, mais dérape ici ou là, entre imprécisions et excès de pédale. Allant jusqu’au bout de la liberté qu’autorise une «fantaisie», elle paraît un peu trop bousculée, même si le jeu n’en conserve pas moins finesse et souplesse, à l’image de la miraculeuse coda du premier mouvement. Le dernier s’articule quant à lui autour d’un chant impeccablement tenu et de puissantes progressions. Schumann, d’un côté, Webern de l’autre, avec les Variations opus 27 (1936), brévissimes mais ô combien concentrées, d’autant que Cassard en fait ressortir tout le caractère expressif mais aussi virtuose.


En bis, après le Deuxième des quatre Impromptus de l’Opus 90 (1827) de Schubert, hâtif et encombré de trop nombreuses scories, le pianiste revient à Schumann, ayant pris la parole pour incriminer – non sans raison – un Steinway rétif à la justesse, qu’il avait tenté en vain d’accorder lui-même durant l’entracte: «Pays et gens étrangers», première des Scènes d’enfants (1838), est suivie de «Traumes Wirren», septième des Fantasiestücke de l’Opus 12 (1837), marquée certes «Extrêmement rapide», mais ici abusivement précipitée et fébrile.


Le site de Philippe Cassard



Simon Corley

 

 

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