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Julie entre au répertoire Paris Athénée - Théâtre Louis-Jouvet 01/08/2010 - et 12, 13 novembre (Orléans), 8 décembre (Besançon) 2009, 9, 10, 12*, 13 (Paris), 22 (Bourges) janvier, 24 (Mons), 28 (Massy) mars, 27 avril (Chambéry), 11 mai (Echirolles) 2010 Philippe Boesmans : Julie
Carolina Bruck-Santos (Julie), Alexander Knop (Jean), Agnieszka Slawinska (Kristin)
Ensemble Musiques nouvelles, Jean-Paul Dessy (direction musicale)
Matthew Jocelyn (mise en scène), Alain Lagarde (scénographie), Zaïa Koscianski (costumes), Pierre Peyronnet (lumières)
C. Bruck-Santos, A. Knop (© Gérard Bezard/La République du Centre)
Au cours des vingt-cinq dernières années, Philippe Boesmans s’est imposé comme un grand créateur d’opéras, à la faveur de la renaissance d’un genre qu’on avait sans doute un peu trop vite enterré: emblématique de ce succès est le fait que son quatrième ouvrage lyrique, Julie (2005), opéra en un acte sur un livret (en allemand) de Luc Bondy et Marie-Louise Bischofberger d’après Mademoiselle Julie (1888) de Strindberg, fasse déjà l’objet d’une nouvelle production, moins de cinq ans après sa première à La Monnaie – une chance que n’ont pas eue les précédentes adaptations réalisées par l’Américain Ned Rorem (1956) puis par le Britannique William Alwyn (1977). Le compositeur belge, qui met sa musique, chargée de références mais toujours personnelle, au service de textes forts, est ainsi l’un des rares à pouvoir se targuer de ce que ses œuvres non seulement ne se recouvrent pas de poussière dans les bibliothèques mais prennent leur place au répertoire et sont même disponibles en disque ou en vidéo (voir ici).
En outre, les exigences relativement modestes de Julie – trois chanteurs, un orchestre de chambre (quatorze musiciens), une durée d’une heure et quart – contribuent à faciliter sa diffusion. On doit le présent spectacle à La Scène nationale d’Orléans, assistée d’un grand nombre de partenaires: coproduction avec l’ensemble instrumental belge Musiques nouvelles, l’Arcadi et la Maison de la culture de Bourges, soutien du ministère de la culture, de la ville de Paris et de la région Centre et coréalisation avec l’Athénée, où il s’arrête pour cinq représentations avant de repartir en tournée jusqu’en mai prochain.
Matthew Jocelyn relève le défi de succéder à Luc Bondy, qui avait signé la mise en scène à Bruxelles puis à Aix-en-Provence: il propose une direction d’acteurs très fouillée et une conception mettant autant en valeur le naturalisme parfois sordide de la pièce que sa dimension symbolique et psychologique. Les décors d’Alain Lagarde n’omettent aucun détail de la cuisine où se déroule le drame (évier, corde à linge, ...), jusqu’à un immense tuyau de poêle jaune qui s’élève jusqu’aux cintres. Mais le rêve et l’imaginaire ont également leur part, à l’image de ces ballons gonflables multicolores que Julie crève comme autant d’espérances déçues ou qui restent prisonniers entre les murs du château, tels ces oiseaux en cage qu’on distingue à l’extérieur. Réglées par Pierre Peyronnet, les lumières accompagnent de façon suggestive l’orage et le lever du jour, contribuant ainsi à la perception de l’unité de temps. Certains éléments de la scénographie et les costumes de Zaïa Koscianski situent l’action un peu plus près de notre époque que de celle de Strinberg, aux alentours des années 1950.
Comme lors de la création, le rouge sied à Julie, à laquelle la mezzo germano-mexicaine Carolina Bruck-Santos prête son tempérament dramatique et sa voix riche, à la tessiture ample. Le baryton allemand Alexander Knop incarne avec beaucoup de conviction un Jean veule et goujat, voire grossier, en même temps que captif de son rang et des conventions sociales. Un peu moins à l’aise en allemand, la soprano polonaise Agnieszka Slawinska parvient toutefois à maîtriser les redoutables passages en colorature du rôle de Kristin. A la tête de son excellent Ensemble Musiques nouvelles, Jean-Paul Dessy assure un parfait équilibre entre la fosse et le plateau.
Le site de l’Ensemble Musiques nouvelles
Simon Corley
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