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Zen Paris Eglise Saint-Roch 01/11/2010 - et 8 (Antwerpen), 9 (Amsterdam), 12 (Berlin), 13 (Stuttgart), 14 (Freiburg), 15 (Gent), 16 (Rouen) janvier 2010 Johann Sebastian Bach : Cantates n° 194 et n° 198 «Trauerode»
Dorothee Mields (soprano), Damien Guillon (contre-ténor), Christoph Genz (ténor), Dominik Wörner (baryton-basse)
Collegium vocale Gent, Freiburger Barockorchester, Masaaki Suzuki (direction)
M. Suzuki (© Marco Borggreve)
La saison dernière, c’est avec son «Bach Collegium» que Masaaki Suzuki était venu au Théâtre des Champs-Elysées (voir ici): affluence tout aussi remarquable à Saint-Roch pour le retour du chef japonais, cette fois-ci à la tête de deux des meilleures formations «baroques» européennes, le Collegium vocale de Gand, réduit à huit chanteurs, et l’Orchestre baroque de Fribourg. Mais Bach demeure à l’affiche, avec deux cantates hors norme, pas à proprement parler liturgiques mais de caractère évidemment religieux, toutes deux en deux parties mais de caractère résolument opposé. Ainsi que Brahms le remarquait à propos de ses deux Ouvertures, Tragique et Académique, «Die eine weint, die andere lacht» («l’une pleure, l’autre rit»): d’une part, la Cantate 198 «Lass, Fürstin, lass noch einen Strahl» dite «Ode funèbre» (1727), écrite pour les obsèques de Christiane Eberhardine von Brandenburg-Bayreuth (1671-1727), princesse de Saxe et reine de Pologne; d’autre part, la Cantate 194 «Höchsterwünschtes Freudenfest» (1723), destinée à l’inauguration de l’orgue de l’église de Störmthal (Saxe), construit par Zacharias Hildebrandt (1688-1757), élève de Silbermann.
La direction sereine et équilibrée, élégante et souple, presque étale, de Suzuki tend toutefois à aplanir les différences entre les deux œuvres: non pas qu’il se contente de faire fonctionner la «divine machine à coudre» que Colette voyait en Bach, mais il va simplement son chemin, sans faire ressortir les rythmes de danse des airs de la Cantate 194 ni insister sur la dimension tragique de la Cantate 198. Un Bach zen et décanté, mais pas moins vivant, comme dans le récitatif en duo de la Cantate 194, en forme de dialogue entre la soprano et la basse. Guère servis par une acoustique brumeuse et réverbérée dans les tutti, le Collegium vocale, renforcé par le quatuor soliste, et l’Orchestre baroque de Fribourg apportent à cette vision apaisée une belle qualité chorale et instrumentale.
S’attachant tous à mettre en valeur le texte par une diction soignée, les quatre solistes ne sont pas en reste. On retrouve avec plaisir l’aisance, le naturel mais aussi la technique irréprochable de la soprano Dorothee Mields. Le ténor Christoph Genz ne manque pas non plus de facilité, mais ne passe pas toujours l’orchestre dans l’air «Der Ewigkeit saphirnes Haus» de la Cantate 198. La voix claire du baryton-basse Dominik Wörner se projette en revanche convenablement, mais se révèle inégale dans l’aigu de la tessiture. Le contre-ténor Damien Guillon, qui n’intervient hélas que dans l’air «Wie starb die Heldin so vergnügt!» de la Cantate 198, précédé d’un récitatif à l’étonnant accompagnement orchestral, s’illustre à nouveau par une prestation en tout point irréprochable: justesse, maîtrise du souffle sur les notes tenues, plastique du timbre et des phrasés, subtilité et raffinement des nuances dynamiques et expressives.
Masaaki Suzuki revient à Paris le 18 mai prochain, pour diriger l’Ensemble orchestral de Paris au Théâtre des Champs-Elysées dans un programme associant Mozart, C.P.E. Bach et Mendelssohn avec Renaud Capuçon et Antoine Tamestit.
Le site de l’Orchestre baroque de Fribourg
Le site du Collegium Vocale de Gand
Le site de Damien Guillon
Le site de Christophe Genz
Le site de Dominik Wörner
Simon Corley
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