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Routine sucrée

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
11/25/2009 -  
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Extraits du «Lac des cygnes», opus 20
Nicolaï Rimski-Korsakov : Shéhérazade, opus 35

Orchestre philharmonique de Saint-Pétersbourg, Youri Temirkanov (direction)


Y. Temirkanov



En habitué du Théâtre des Champs-Elysées (voir ici, ici, ici et ici), l’Orchestre philharmonique de Saint-Pétersbourg propose un cycle de trois concerts à l’occasion du centenaire des Ballets russes de Diaghilev. Il n’est donc pas surprenant que Youri Temirkanov ait choisi d’ouvrir ce cycle avec la partition qui incarne peut-être au plus point l’art musical de la danse : Le Lac des cygnes (1877) de Tchaïkovski. Conformément à l’usage, le chef retient une sélection d’extraits du ballet intégral, qui ne donne qu’un aperçu trop bref de la richesse de la partition. Sa vertu principale est de mettre en valeur la qualité individuelle des leaders de pupitres tout autant que la cohésion d’ensemble de l’orchestre. Ainsi de cette «Deuxième danse de la reine des cygnes», où les solos de harpe, de violon et de violoncelle peuvent s’épanouir au sein d’un accompagnement instrumental empreint de musicalité et d’intégrité. De même, le solo de trompette de la «Danse napolitaine» frappe par sa ferveur, au milieu d’un Philharmonique chauffé à blanc. La plénitude et l’onctuosité des cordes s’imposent d’ailleurs dès l’introduction de l’acte II qui ouvre ce concert et rendent possible l’embrasement de la scène finale de l’acte IV, qui annonce l’entracte au terme d’une tempête de cuivres et de percussions.


Temirkanov donne pourtant l’impression de se complaire dans une certaine «routine sucrée», tant il se plaît à mettre l’orchestre en pilote automatique (dans un répertoire qui lui est pour le moins familier) et à multiplier mimiques et clins d’œil. Cette impression est plus forte encore dans Shéhérazade (1888) de Rimski-Korsakov. Le chef russe s’amuse comme un petit fou à faire briller sa formation et à la baigner dans une atmosphère orientalisante fantasmagorique, mielleuse mais ô combien colorée. On avoue que son geste de Sinbad slave, passablement affecté, n’est pas franchement convaincant : Temirkanov semble vouloir, face à un orchestre techniquement irréprochable, tout illustrer de ses mains, allant jusqu’à faire mine de remonter lui-même les cordages du navire dans le dernier épisode («Le Vaisseau se brise sur un rocher surmonté d’un guerrier d’airain»).


Néanmoins, tout cela a le mérite de l’éloquence, depuis un Largo e maestoso sans bavures jusqu’à un Allegro non troppo maestoso hautement illustratif, au cours duquel la «Fête à Bagdad», menée à un rythme endiablé et d’un geste tranchant, se transforme en une brillante chevauchée fantastique. Il faut dire que le chef est bien aidé par la virtuosité du fond d’orchestre dans «Le récit du prince Kalender» comme par la mobilité et la tenue du Philharmonique de Saint-Pétersbourg dans «Le jeune prince et la jeune princesse» – malgré une entame somnolente et ennuyante par sa neutralité de ton. Surtout, on rend les armes devant le choix du soliste Sergey Krylov – par ailleurs directeur musical de l’Orchestre de Chambre de Lituanie –, qui prend la place du premier violon pour offrir (sur un splendide Stradivarius de 1734) des sonorités luxueuses. Maestria du geste, justesse et plénitude du son, grandeur du coup d’archet font de son interprétation, hédoniste mais conquérante, la cerise caramélisée d’un gâteau probablement trop sucré.


Deux bis – le Salut d’Amour d’Elgar et le Trepak du Casse-Noisette de Tchaïkovski – viennent conclure le festival de friandises de Noël qu’offre, avant l’heure, la formation russe aux Parisiens venus en nombre investir le Théâtre des Champs-Elysées.


Le site de l’Orchestre Philharmonique de Saint-Pétersbourg



Gilles d’Heyres

 

 

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