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Pas de bis Paris Théâtre des Champs-Elysées 11/19/2009 - Richard Wagner : Prélude du premier acte et Enchantement du Vendredi Saint extraits de «Parsifal»
Robert Schumann : Concerto pour piano, opus 54
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Symphonie n° 4, opus 36
Hélène Grimaud (piano)
London Philharmonic Orchestra, Vladimir Jurowski (direction)
V. Jurowski (© Roman Gontcharov)
A trente-sept ans, Vladimir Jurowski cumule les fonctions de directeur musical du Festival de Glyndebourne (depuis 2001), de premier chef invité de l’Orchestre national de Russie (depuis 2005) et de principal artist de l’Orchestre de l’Age des Lumières (depuis 2006), avec lequel il se produira le 4 février au Théâtre des Champs-Elysées. Surtout, il accomplit sa troisième saison en tant que principal conductor de l’Orchestre philharmonique de Londres, dont il était déjà précédemment principal guest conductor (2003-2007). Comme avec Valery Gergiev au London Symphony, familier de la salle Pleyel depuis quelques années, l’orchestre fondé en 1932 par Beecham s’est donc également choisi un patron russe, mais sa visite au Théâtre des Champs-Elysées a démontré, s’il en était besoin, que ces deux directeurs musicaux n’ont pas grand-chose en commun.
Avant d’aborder le Prélude du premier acte de Parsifal (1882) de Wagner, Jurowski attend longuement que le silence se fasse: rien de plus légitime au moment de s’engager dans une telle musique. Ceux qui espéraient une élévation mystique auront pourtant été déçus, de même que ceux qui s’en remettaient à sa réputation de chef d’opéra: rien de mystique ni de dramatique dans cet indolent enlisement, qui frappe ensuite tout autant l’«Enchantement du Vendredi Saint». D’autant que pour être très attentif au détail, il ne parvient pas à faire jouer ensemble les musiciens dans les deux longues phrases à l’unisson qui ouvrent le Prélude, comme dans l’accord conclusif de l’«Enchantement».
La précédente association entre Vladimir Jurowski et Hélène Grimaud, en janvier dernier à la Cité de la musique avec l’Orchestre de chambre d’Europe, avait déçu (voir ici). Le début du Concerto (1845) de Schumann semble confirmer ce constat: la pianiste française pratique le stop and go, alternant embardées et languissants arrêts sur images, tandis que l’orchestre obéit fidèlement aux partis pris parfois déroutants de son chef. Perceptible notamment dans la cadence du premier mouvement, la fébrilité de la soliste s’estompe cependant au fur et à mesure, pour imposer progressivement une interprétation de haute tenue stylistique, émaillée de quelques accrocs mais servie par un toucher et une sonorité de rêve. Le public, sans doute en grande partie attiré par l’amie des loups, n’obtient toutefois aucun bis.
En seconde partie, la Quatrième symphonie (1878) de Tchaïkovski laisse perplexe. Jurowski, s’il est très éloigné de l’impulsivité d’un Gergiev, se reconnaît à peine davantage dans le style objectif et sans complaisance d’un Temirkanov. Contrôlé, surligné et décortiqué à l’extrême, le premier mouvement peine à décoller, privé d’élan: mettant à jour certaines faiblesses de l’orchestre, cette succession d’interminables tunnels fait plus ressentir le poids de l’ennui que celui du fatum. L’Andantino in modo di canzona avance mieux, tout en optant pour un jeu curieusement sadique, consistant à éclipser systématiquement la canzona au profit des contrechants dont elle est entourée. La raideur du Pizzicato ostinato s’accompagne d’une prestation instrumentalement bien plus satisfaisante, de même que dans l’Allegro con fuoco final, mené à un train tellement infernal: plus de place, dès lors, pour les incartades et autres bizarreries. L’impression positive de cette conclusion, chaleureusement accueillie par les spectateurs, est en partie annihilée par un curieux manège: alors que les musiciens s’étaient visiblement préparés à offrir un bis, le contrebasson ayant même rejoint ses collègues, Jurowski fait signe à l’orchestre de quitter la scène.
Le site de l’Orchestre philharmonique de Londres
Le site d’Hélène Grimaud
Simon Corley
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