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Double marathon

Paris
Orangerie du Domaine de Sceaux
07/19/2009 -  
Ludwig van Beethoven : Sonates n° 5, opus 10 n° 1, n° 6, opus 10 n° 2, n° 7, opus 10 n° 3, n° 31, opus 110, et n° 32, opus 111

Abdel Rahman El Bacha (piano)


(© Alexandra Duchene/CG 92)



Giovanni Bellucci, Gérard Caussé, Michel Dalberto, Nicolas Dautricourt, Claire Désert, Brigitte Engerer, David Grimal, Gary Hoffman, Christian Ivaldi, Pascal Moraguès, Philippe Muller, Roger Muraro, le Trio Guarneri de Prague, les Quatuors Kocian, Manfred, Modigliani et Prazak... autant de raisons de rester en région parisienne du 11 juillet au 13 septembre, grâce à Alfred Lœwenguth, qui a eu l’heureuse idée de créer en 1969 la «Saison musicale d’été de Sceaux». 1400 concerts plus tard, cette manifestation, devenue entre-temps «Festival de l’Orangerie de Sceaux» et ayant abandonné un rythme jusqu’alors quotidien (!), atteint sa quarantième édition. Comme de coutume, c’est le samedi et le dimanche à 17 heures 30 que le bâtiment conçu par Jules Hardouin-Mansart (1686) s’ouvre à la musique, misant davantage sur le prestige des interprètes réunis par Jacqueline Lœwenguth que sur l’originalité de la programmation, même si l’on relève cette année les noms de Dohnányi, Mantovani ou Martinu, le jour même du cinquantième anniversaire de sa mort.


Pour son récital scéen, Abdel Rahman El Bacha n’a pas choisi la facilité, même s’il est familier des Sonates de Beethoven, dont il a enregistré entre 1988 et 1993 l’intégrale pour Forlane, et si les cinq qu’il a sélectionnées – les trois juvéniles de l’Opus 10 (1798), puis les ultimes Opus 110 (1821) et Opus 111 (1822) – appartiennent à des périodes suffisamment éloignées pour écarter tout risque de monotonie.


En première partie, il enchaîne sans interruption les sonates de l’Opus 10, avec suffisamment d’autorité pour que le public retienne ses applaudissements: une trilogie qui, bien que donnée quasiment sans reprises et dans des tempi le plus souvent vifs, dure plus de quarante-cinq minutes. La façon dont le pianiste franco-libanais s’approprie les partitions est saisissante: il y a, bien sûr, un jeu d’une infinie variété, avec une sonorité tour à tour ronde et violente, presque brutale, un phrasé net et sans fioritures, un legato parfait, une main droite d’une précision foudroyante et une main gauche qui sait se faire légère, bref du grand piano comme on en entend rarement.


Mais il y a surtout une approche personnelle et risquée, un engagement qui va jusqu’aux coups de boutoir et aux embardées, transformant ces pages de jeunesse en un parcours passionnant, animé à chaque instant par un spectaculaire sens dramatique, comme ce Trio du Menuetto de la Septième, qui déboule avec une irrésistible vitalité. Sans le moindre répit pour l’auditeur, ces interprétations traduisent à la fois une formidable envie de jouer et un souci de renouveler la vision des œuvres, quitte à les solliciter parfois un peu trop, à la limite de l’hédonisme, du narcissisme ou de l’affectation. En tout cas, il ne reste pratiquement rien de l’héritage haydnien et le «je» beethovénien s’affirme déjà avec force: non seulement l’Adagio molto de la Cinquième aura rarement paru aussi proche du Largo du Premier concerto, exactement contemporain et dans la même tonalité de la bémol, mais le Trio de l’Allegretto de la Sixième évoque même Schubert.


Nouveau marathon après l’entracte: trois quarts d’heure d’une seule traite, avec les deux dernières sonates. Dans la Trente-et-unième, une époustouflante démonstration technique vient rappeler que ce n’est pas sans raisons qu’El Bacha triompha au Concours Reine Elisabeth en 1978, alors qu’il n’avait pas encore vingt ans. Malgré un Allegro molto fantasque à souhait, il s’efface ici davantage devant le texte, laissant s’exprimer avec délicatesse le Moderato cantabile initial et faisant même preuve d’une certaine retenue dans les deux fugues conclusives. Dans le premier mouvement de la Trente-deuxième, le volontarisme et l’énergie reprennent leurs droits, tandis que dans l’Arietta à variations, la tentation de la virtuosité l’emporte quelquefois sur le caractère prophétique ou métaphysique du propos.


Quatre rappels n’y feront rien: il ne saurait y avoir de bis après ce «prélude au silence» qu’est l’Opus 111, selon l’heureuse formule d’Alfred Brendel citée dans les notes de programme.


Le site du Festival de l’Orangerie de Sceaux



Simon Corley

 

 

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