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Entre Loft et Star Academy

Zurich
Opernhaus
02/14/2009 -  et 18, 20, 22, 24*, 26, 28 février, 4 mars 2009
Igor Stravinski: The Rake’s Progress

Eva Liebau (Anne), Michelle Breedt (Baba the Turk), Kismara Pessatti (Mother Goose), Shawn Mathey (Tom Rakewell), Martin Gantner (Nick Shadow/Keeper), Alfred Muff (Trulove), Martin Zysset (Sellem)
Orchestre de l’Opernhaus de Zurich, Chœur de l’Opernhaus, Ernst Raffelsberger (préparation), Thomas Adès (direction musicale)
Martin Kusej (mise en scène), Annette Murschetz (décors), Su Sigmund (costumes), Friedrich Rom (lumières), Peer Engelbracht (vidéo)


(© Hans Jörg Michel)


Après les scènes crues de la Trilogie du Diable et de Salomé au Grand Théâtre de Genève, c’est au tour de l’Opernhaus de Zurich de proposer un spectacle qui fait la part belle à la nudité sans que le public s'en formalise outre mesure. Voilà qui a au moins le mérite de prouver que les Suisses ne sont peut-être pas aussi conservateurs qu'on veut bien le dire! Importée de Vienne, où elle a été créée en novembre de l’année dernière, cette production du Rake’s Progress sentait le soufre et a déclenché un scandale dans la capitale autrichienne. Les spectateurs zurichois quant à eux ne s’y sont pas trompés, qui ont ovationné cette mise en perspective contemporaine du chef-d’œuvre de Stravinski. Martin Kusej prend en effet le parti d’une transposition radicale de l’action à notre époque. Tom et Anne sont deux jeunes gens qui, après l'amour, se retrouvent enlacés sur un matelas posé à même le sol, en train de regarder une émission de téléréalité, qui leur fait miroiter l’illusion de la gloire et de la richesse instantanées. Le bonheur facile comme filon exploité sans vergogne par les médias, telle est l’idée maîtresse qui sous-tend le spectacle. Le rôle du petit écran est encore davantage mis en lumière dans la scène du bordel de Mother Goose, où les copulations de figurants dans le plus simple appareil sont filmées en vidéo pour être simultanément retransmises sur un écran de télévision. Tout doit être vu par tous, tout de suite. Et Baba la femme à barbe est ici une starlette TV transsexuelle qui joue de sa particularité anatomique avec les médias, se faisant fort d’exhiber son attribut masculin à des journalistes avides de scoops. Tom finira par noyer ses désillusions dans une piscine hollywoodienne. Pour la dernière scène, les solistes se retrouvent dans la fosse, invisibles du public, mais – joli clin d’œil – apparaissent sur un téléviseur installé au milieu du plateau. Et le diable dans tout ça? Nick Shadow surgit d’un carton de pizza! A coup sûr, nous sommes bien loin de l’Angleterre du XVIIIe siècle, mais il faut reconnaître la force et la pertinence de la transposition opérée par Martin Kusej, où aucun détail ne paraît gratuit. Après sa passionnante Genoveva dans ce même théâtre il y a exactement une année, l’Autrichien confirme qu’il fait désormais partie du petit cercle des metteurs en scènes lyriques les plus inventifs du moment.


Remplaçant Nikolaus Harnoncourt, qui a dû renoncer aux représentations zurichoises pour cause de maladie, le compositeur et pianiste Thomas Adès se révèle un atout majeur de cette production, grâce à sa connaissance approfondie de l’ouvrage, qu’il avait dirigé l’année dernière à Covent Garden. Sa lecture, précise et vive, insuffle dynamisme et pulsation à la représentation et permet d’apprécier la partition de Stravinski sous un angle nouveau. Quand bien même tous les solistes faisaient leurs débuts dans leur rôle respectif, le plateau vocal se révèle de grande qualité et fort homogène. On relèvera notamment les belles prestations de Martin Gantner en Nick Shadow racé et élégant, de Shawn Mathey en Tom oscillant entre nonchalance et mélancolie et d’Eva Liebau en Anne à la fragilité émouvante, sans oublier la superbe incarnation vocale et scénique de Michelle Breedt en Baba impayable de vulgarité.



Claudio Poloni

 

 

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