Back
Jeu de massacre Paris Théâtre Silvia Monfort 02/12/2009 - et 9, 10 (Nanterre), 16 (Reims), 24 (Beynes), 30 (Mâcon) janvier, 7 (Massy), 13 février(Paris), 10 mars (Valenciennes) 2009 Régis Campo : Les Quatre Jumelles (création)
Robert Expert (Joséphine Goldwashing), Fabrice di Falco (Fougère Goldwashing), Julie Robard-Gendre (Maria Smith), Sylvia Vadimova (Leïla Smith)
TM+: Gilles Burgos (flûte), Baptiste Gibier (hautbois), Francis Touchard (clarinette), André Feydy (trompette), Myriam Lafargue (accordéon), Didier Aschour (guitares), Thierry Deleruyelle (percussion), Marie Charvet (violon), Antoine Sobczak (contrebasse), Laurent Cuniot (direction musicale)
Jean-Christophe Saïs (mise en scène, scénographie) Jean Tartaroli (scénographie, lumières), Montserrat Casanova (costumes)
(© Philippe Guérillot)
Après les larmes, le rire: associés en janvier 2008 pour la création de l’opéra Les Sacrifiées de Thierry Pécou (voir ici), TM+ et l’Arcal (Atelier de recherche et de création pour l’art lyrique) ont commandé cette fois-ci à Régis Campo (né en 1968) un opéra-bouffe, Les Quatre Jumelles. Comme l’an passé, la Maison de la musique de Nanterre, résidence de l’Ensemble TM+, et l’Arcadi (Action régionale pour la création artistique et la diffusion en Ile-de-France) coproduisent le spectacle, qui tourne ainsi tout au long de l’hiver en Ile-de-France et en région.
Le rire? Voire, car la pièce de Copi (1939-1987) dont est tiré le livret, donnée en 1973 au Palace par Jorge Lavelli, si elle n’engendre certes pas vraiment la mélancolie, n’est au fond guère plus joyeuse que celle de Gombrowicz, Yvonne, princesse de Bourgogne, qui vient d’inspirer Philippe Boesmans (voir ici) et dont elle partage le goût pour le surréalisme, l’absurde et la décadence. Dans une langue libérée de toute bienséance, cette rencontre en Alaska entre deux couples de jumelles américaines au look de drag-queens, les Goldwashing, brunes en robe sombre (rôles travestis), et les Smith, blondes en robe rouge, tient du jeu de massacre: l’Argentin cultive au énième degré le trash, la violence verbale et physique, mais aussi l’humour et une certaine forme de poésie incantatoire, même si elle passe par l’inlassable répétition du mot «salopes». Entre drogue et dollars, cette humanité sans cesse au bord de l’anéantissement finit par évoquer Beckett, mais c’est ici de la métaphysique baroque en plateformes à talons aiguille.
La mise en scène et la scénographie de Jean-Christophe Saïs et Jean Tartaroli n’ajoutent pas aux excès du texte: à l’intérieur de trois grands panneaux qui élargissent ou resserrent l’espace au fil de la représentation, l’action se noue au travers de gestes stylisés et ralentis, et les heurts entre les personnages sont plus souvent suggérés que figurés de manière réaliste. Mais ce n’est quand même pas du Bob Wilson, notamment grâce aux costumes de Montserrat Casanova, qui font explicitement référence aux codes gay.
Les quatre chanteurs, remarquables au point de rendre inutile le surtitrage, sont finement accompagnés par neuf musiciens de TM+, sous la baguette de Laurent Cuniot, le directeur musical de l’ensemble. Campo a composé une habile partition aux multiples références (Ligeti, le courant spectral, la valse mais aussi Glass, sans doute pour la couleur locale), aux sonorités tour à tour chatoyantes et abrasives, pleine d’effets spéciaux – tintinnabulements dans l’aigu, gloussements de la guitare électrique et ironie de l’accordéon. Mais ces cinquante minutes parviennent également à ménager des plages lyriques, et même des succédanés d’airs ou ensembles.
Le site de l’ensemble TM+
Le site de l’Arcal
Le site du Théâtre Silvia Monfort
Simon Corley
|