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Prélude de haute volée à l’année Haydn

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
11/29/2008 -  et 18 (Poitiers), 19 (Mérignac), 27 (Antwerpen), 28 (Brugge), 30 (Grenoble) novembre 2008
Joseph Haydn : Die Schöpfung
Christina Landshamer (Gabriel, Eve), James Gilchrist (Uriel), Yorck Felix Speer (Raphaël, Adam)
Collegium Vocale Gent, Orchestre des Champs-Elysées, Philippe Herreweghe (direction)


2009 va voir se télescoper deux grands hommages : celui à Georg Friedrich Händel, dont on va fêter le 250e anniversaire de la mort, et celui à Joseph Haydn, dont on va célébrer le bicentenaire de la disparition. Le parallèle est intéressant puisque l’idée de composer un oratorio est venue à l’esprit de Haydn après qu’il a entendu, à Londres, divers oratorios de « notre maître à tous » pour reprendre ses propres termes (notamment Le Messie et Israël en Egypte). Sur un livret anglais tiré du Paradis perdu de John Milton, adapté en allemand par le baron van Swieten (1733-1803), Haydn en commença la composition en 1796 et l’acheva en 1797, la première audition ayant eu lieu en avril 1798. Divisé en trois parties traitant successivement des éléments, des animaux et de l’homme, et, enfin, du Paradis terrestre (à l’image de ce que fera Gustav Mahler dans sa Troisième symphonie près d’un siècle plus tard), Haydn donne ici la pleine mesure de son génie tant sur le plan vocal qu’instrumental.


Ayant depuis longtemps exploré des rivages fort éloignés de son fidèle Jean-Sébastien Bach, Philippe Herreweghe a, dans ce périple musical, déjà dirigé La Création, notamment en concert de clôture du Festival de l’Abbaye-aux-Dames, à Saintes. Il est évident que son souci d’authenticité dans l’interprétation et les affinités qu’il entretient avec les voix ne pouvaient que faire merveille dans cet oratorio exigeant pour tout interprète. Ce fut le cas. Les premiers accords du « Chaos » introductif établissent immédiatement un climat reflétant un monde plus merveilleux qu’inquiétant, où la riche palette de l’orchestre (comprenant notamment trois trombones, deux trompettes et un contrebasson) fait sensation. Les différents solistes s’adaptent parfaitement à l’atmosphère dictée par la partition : ainsi, les clarinettes accompagnant Gabriel dans son air « Auf starkem Fittiche schwinget sich der Adler stolz », les flûtes et le basson offrant un idéal tapis sonore au délicat « Gleich öffnet sich der Erde Schoß » déclamé par Raphaël, le hautbois s’affirmant comme un partenaire idéal du délicieux duo entre Eve et Adam, « Von deiner Güt’, o Herr und Gott »... Dans les grands ensembles, l’orchestre est encore plus beau, si tant est que ce soit possible : une cohésion, une ferveur et une joie visible de jouer ensemble, sous la houlette de l’excellent Alessandro Moccia (premier violon solo) et, naturellement, sous l’autorité charismatique d’un Philippe Herreweghe en pleine possession de ses moyens.


Le Chœur du Collegium Vocale de Gand fut, comme à son habitude, somptueux. Ses interventions, qu’elles soient emplies de réjouissance (« Stimmt an die Saiten » ou « Die Himmel erzählen die Ehre Gottes ») ou de retenue (ici encore, dans le duo « Von deiner Güt’, o Herr und Gott »), furent véritablement miraculeuses de justesse dans le ton et l’implication. Ce n’est pas un hasard si, au moment des saluts, ses chanteurs furent chaleureusement acclamés par le public. Les solistes vocaux furent également très bons. Christina Landshamer, qui tenait les rôles de Gabriel et d’Eve, alterna tour à tour la fierté en déclamant la gloire du Seigneur (« Mit Staunen sieht das Wunderwerk ») et la douceur que la première femme créée sur Terre pouvait ressentir à l’égard de son compagnon (le formidable duo « Holde Gattin, dir zu Seite »). Si l’on peut regretter une émission parfois un peu faible, on admire, en revanche, la facilité des vocalises d’une partie qui, en plus d’une occasion, renvoie davantage à un opéra de Mozart qu’à un oratorio de Händel. Yorck Felix Speer chantait à la fois les parties dévolues à Raphaël et à Adam : si sa technique lui permit de faire facilement face aux difficultés de la partition, sa musicalité fit en revanche parfois défaut, ayant souvent tendance à chanter ses différents rôles de façon trop monocorde. Quant à James Gilchrist, il interprétait le rôle d’Uriel (dont le nom signifie « Lumière de Dieu » en hébreu), ange qui tient à la fois le rôle de narrateur de la Création et celui d’instructeur du genre humain puisqu’il est censé apporter à l’Humanité la connaissance et la compréhension du Divin. Gilchrist fut exceptionnel : s’appropriant totalement le rôle qui lui était dévolu, racontant l’Histoire tour à tour par le murmure ou par l’appel, il fut sans conteste un des grands artisans de la soirée.


Quant à Philippe Herreweghe, il affirma de nouveau ses affinités avec un répertoire qui lui sied à merveille, au même titre que les cantates de Bach, les messes de Bruckner ou le Klagende Lied de Mahler… Laissant généralement l’orchestre jouer en pleine confiance (sauf à indiquer aux altos quelques accents à respecter ou à tendre le bras pour inviter tel ou tel pupitre à participer à cette célébration), il ne cessa de chanter avec le chœur, veillant avec une extrême attention à ce que la communion des propos soit pleinement exprimée par l’interprétation de la partition. Ovationné par un Théâtre des Champs-Elysées comble, il donna en bis le chœur conclusif de l’œuvre, « Singt dem Herren alle Stimmen ! ». Espérons que l’année 2009 incitera l’ensemble de ces artistes à donner Les Saisons ou l’une des messes de Haydn dont la célébration était, ce soir, totale.


Le site du Collegium Vocale de Gand
Le site de l’Orchestre des Champs-Elysées
Le site de Christina Landshamer
Le site de James Gilchrist



Sébastien Gauthier

 

 

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