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Morne rentrée

Paris
Salle Pleyel
06/18/2008 -  et 20* septembre 2008
Ludwig van Beethoven : Missa solemnis, opus 123
Christine Schäfer (soprano), Annette Jahns (mezzo-soprano), Paul Groves (ténor), Robert Holl (basse)
Chœur de l’Orchestre de Paris, Orchestre de Paris, Christoph Eschenbach (direction)


(© Thierry Boccon-Gibod)



Successeur de Charles Münch de 1969 à 1971, disparu il y a dix ans, Herbert von Karajan méritait doublement que l’Orchestre de Paris lui rendît hommage pour son concert de rentrée. Christoph Eschenbach lui-même avait, comme pianiste, plusieurs fois joué sous sa direction. Et la Missa solemnis était un des chevaux de bataille du chef autrichien.


On a malheureusement eu droit à une de ces soirées oubliables où l’esprit ne souffle jamais, où une exécution laborieuse plombe un grand chef-d’œuvre. Christoph Eschenbach, pourtant, se montre attentif, scrupuleux, dirigeant par cœur une partition qu’il maîtrise bien. Mais à l’heure où l’on dépoussière quand on ne dégraisse pas, le Kyrie paraît d’emblée d’une grandeur empesée, symptomatique d’une tradition allemande datée. La suite révèle une lecture monochrome, à l’éventail dynamique pauvre, comme si la partition n’était qu’une sorte de bloc, le chef commettant l’erreur fatale de ne pas dégager les plans sonores et d’exagérer la verticalité de l’écriture, ce qui aggrave l’effet de masse, alors que l’œuvre repose essentiellement sur des contrastes. Même le violon solo de Philippe Aïche, qu’on a connu plus heureux, se laisse couvrir dans le Benedictus. L’orchestre suit là où il devrait communier avec le chef dans une ferveur partagée. Si l’Orchestre national – qui avait donné, il y a deux ans, une Missa solemnis autrement habitée avec Kurt Masur (lire ici) – et Daniele Gatti vivent apparemment une lune de miel (lire ici), Christoph Eschenbach et l’Orchestre de Paris ressemblent à un couple englué dans la routine – à moins qu’il ne soit en instance de divorce, le chef devant partir à la fin de la saison. Bref, ce n’est qu’une lecture, où toutes les notes sont à leur place. Ce qui manque tient en un mot : l’inspiration, sans quoi il n’y pas de Missa solemnis qui vaille.


Didier Bouture et Geoffroy Jourdain ont bien préparé le chœur à cette œuvre difficile, notamment aux redoutables épisodes fugués, même si l’on déplore une sonorité un peu sèche – et, là encore, la ferveur manque. Il y a aussi ces terribles aigus des sopranos et des ténors – il est vrai que les si bémol de « Et vitam venturi saeculi » auraient raison des dames les plus solides. Les solistes sont inégaux et du coup deséquilibrent le quatuor. Christine Schäfer doit forcer sa petite voix et n’exprime pas grand-chose. Robert Holl, excellent styliste, a toujours de la peine à se projeter et cherche les graves du début de l’Agnus dei. Annette Jahns, en revanche, dans une partie où beaucoup peinent à se faire entendre, fait valoir un beau timbre et une vraie interprétation du texte, comme Paul Groves, excellent, qui offre un « Et homo factus est » où l’on sent un mystère s’accomplir.


Il ne faisait pas bon, en rentrant chez soi, écouter une des versions Karajan.



Didier van Moere

 

 

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