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Spectaculaires créations belges

Bruxelles
Salle Henry Le Bœuf
09/06/2008 -  
Ferruccio Busoni : Concerto pour piano, chœur d’hommes et orchestre, opus 39 (création belge)
Giacinto Scelsi : Pfhat (création belge)
Johannes Brahms : Schicksalslied, opus 54

Peter Donohoe (piano)
Coro dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia, Brussels Philharmonic-Het Vlaams radio Orkest, Michel Tabachnik (direction)


Michel Tabachnik (© Droits réservés)



Il faut s’y habituer : à « Vlaams radio Orkest » s’ajoute dorénavant « Brussels Philharmonic », appendice destiné à souligner tant l’ancrage de cette formation à Bruxelles, en particulier à Flagey, son port d’attache, que son lien étroit avec la radio publique flamande. Ce changement de nom s’accompagne d’un changement de chef, Michel Tabachnik occupant depuis peu les postes de chef principal et directeur artistique. Le Suisse, souhaitant combler le fossé entre la musique contemporaine et le public, dirige pour ce concert du KlaraFestival un des programmes les plus intéressants de la nouvelle saison du Bozar, coproducteur de la soirée.


Aussi surprenant que cela puisse paraître, le Concerto pour piano, chœur d’hommes et orchestre (1903-1904) de Busoni n’avait pas encore été donné dans le royaume. Une œuvre aussi rare que monumentale (un orchestre fourni, une grosse heure de musique captivante, cinq mouvements joués (presque) sans interruption, le dernier avec chœur) qui aurait pu être le grand concerto du Liszt tardif dont la Faust-Symphonie se conclut également sur un chœur d’hommes. A propos de ce compositeur, la brochure du festival affirme de façon consternante qu’« en bon post-romantique, [il] regarde encore vers un passé audible (l’harmonie quoi) » (fin de citation). Le maigre, mais heureusement gratuit, programme de salle, en réalité une espèce de journal trilingue, ne permettra pas d’en savoir beaucoup plus sur les œuvres et compositeurs à l’honneur, tandis que n’y figure aucune information digne de ce nom sur les interprètes, chef, soliste, chœur et orchestre. Plus grave et inquiétant : pour cet évènement, seuls le parterre et la corbeille furent occupés, malgré l’importante campagne publicitaire mise en œuvre par la branche bruxelloise du Festival van Vlaanderen.


Concerto ? Symphonie ? Symphonie concertante ? Un peu de tout cela, en réalité. La prestation traduit parfaitement cette ambiguïté, à commencer celle du solide Peter Donohoe qui se positionne judicieusement par rapport à l’orchestre, ni constamment en avant, ni exclusivement en retrait. Capable de relief autant que de puissance, le pianiste britannique parcourt valeureusement sa copieuse partie et imprime une tension qui ne faiblit jamais. Soucieux de diversifier les climats et de maintenir l’équilibre entre les forces en présence (excellent chœur), Michel Tabachnik dirige un orchestre concerné, aux nombreuses qualités collectives et dispensant quelques moments de grâce. Une fois de plus, les absents eurent tort.


Suit la création belge de Pfhat pour chœur mixte et orchestre (1974) du discret et mystérieux Giacinto Scelsi, mort en 1988. Malgré la pause, enchaîner avec une telle œuvre, misérablement huée par quelques spectateurs, s’avère un peu bancal : inverser les deux parties eût sans doute été plus pertinent. La disposition de l’orchestre, placé sur une moitié de la scène, côté jardin, surprend, à l’image de cette partition de moins de dix minutes. La nomenclature instrumentale requise (pas de violons ni de hautbois, une forte présence des cuivres et des percussions) étonne moins que le rôle confié aux chanteurs du Chœur de l’Académie Nationale de Sainte Cécile, effectuant des bruits de respiration dans la première partie ou secouant, dans la dernière, des clochettes avec intensité et sans répit, l’orchestre restant muet. L’impact physique de cette page fortement contrastée et concentrée est considérable. Ce singulier mais beau concert se conclut par le Schicksalslied (1871) de Brahms. Suivant de quelques années l’achèvement du plus connu Requiem allemand, cette composition d’un quart d’heure s’inspire d’une vision romantique de l’Antiquité gréco-romaine. Là aussi, chœur et orchestre livrent une remarquable et touchante prestation.


Le Brussels Philharmonic-Het Vlaams radio Orkest revient au Bozar le 21 novembre avec Michel Tabachnik, puis le 29 mars, dirigé par Michal Dworzynski dans, notamment, le rare Die Seejungfrau de Zemlinsky, et le 15 juin avec Yoel Levi, prédécesseur de l’actuel chef principal, dans un programme Strauss/Mahler.


Le site du Brussels Philharmonic-Vlaams Radio Orkest
Le site de Michel Tabachnik



Sébastien Foucart

 

 

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