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Copie à revoir

Bayreuth
Festpielhaus
07/27/2008 -  et 4, 7*, 15, 19, 27 août
Richard Wagner : Les Maîtres chanteurs de Nuremberg
Franz Hawlata (Hans Sachs), Artur Korn (Veit Pogner), Charles Reid (Kurt Vogelgesang), Rainer Zaun (Konrad Nachtigall), Michael Volle (Sixtus Beckmesser), Markus Eiche (Fritz Kothner), Edward Randall (Balthasar Zorn), Hans-Jürgen Lazar (Ulrich Eisslinger), Stefan Heilbach (Augustin Moser), Martin Snell (Hermann Ortel), Andreas Macco (Hans Schwarz), Diógenes Randes (Hans Foltz), Klaus Florian Vogt (Walther von Stolzing), Norbert Ernst (David), Michaela Kaune (Eva), Carola Gruber (Magdalene), Fridemann Röhlig (le Veilleur de nuit)
Chœur et Orchestre du Festival, Sebastian Weigle (direction)
Katharina Wagner (mise en scène)


(© Bayreuther Festspiele GmbH/Enrico Nawrath/2008)


Déjà copieusement huée l’année dernière, Katharina Wagner n’a pas été mieux accueillie cette année après ses Maîtres chanteurs ratés. Non qu’on lui en veuille de prendre le contre-pied de la tradition pour mieux la démythifier. Les Maîtres peuvent bien se muer en professeurs rancis de quelque école de beaux arts, Walther peut bien devenir un peintre iconoclaste surgi de la queue d’un piano, prêt à tout barbouiller, des murs de l’école à la robe d’Eva. Sachs peut bien se transformer en un anarchiste aux pieds nus grillant sa cigarette, taper sur sa machine à écrire et non plus sur son établi. Le premier, après avoir gagné un million à un show télévisé farcesque, finira en star père de famille bourgeois marié à une Eva bobonne. Beckmesser, lui, à partir du deuxième acte, effectue une étrange mue et troque son complet au pantalon trop court pour le tee-shirt et le costume à carreaux du rebelle. Quant à Sachs, on le retrouvera grand-prêtre d’un ordre nouveau quelque peu suspect, officiant devant un bambi en or sorti d’un autodafé. Admettons : l’exaltation de la deutsche Kunst porte en elle, après tout, assez d’ambiguïté. A ceci près que Katharina Wagner arrive un peu tard pour nous expliquer ce que d’autres nous ont montré depuis longtemps – sauf, il est vrai à Bayreuth depuis presque quarante ans, où la mise en scène de Wolfgang Wagner restait plus que littérale, à la différence de ce que Wieland avait fait dès les années cinquante. Wagner et Bayreuth restant une affaire de famille, candidate déclarée à la succession avec sa demi-sœur Eva, Katharina a-t-elle voulu tuer symboliquement son père et ce qu’il représente ? Encore faudrait-il, pour que la production tienne la route, une maîtrise dont elle est totalement dépourvue : la mise en scène, malgré les apparences, semble raide et mécanique, dépourvue de rythme, la direction d’acteurs manque de précision, surtout dans les deux premiers actes. Certaines idées sont si peu abouties qu’elles en deviennent ridicules : au troisième acte, le ballet carnavalesque des figurines représentant les grands hommes de l’Allemagne, sexe en érection, qui ligotent Sachs comme un traître, loin d’atteindre le but recherché, pèse des tonnes. Bref, c’est un épouvantable fatras, du Regietheater amateur, du recyclage d’idées à la Konwitschny ou à la Claus Guth. Mademoiselle Wagner est douée, mais elle devra mûrir.


Heureusement, certains chanteurs s’en sortent bien. Michael Volle, par exemple, campe un Beckmesser passionnant, du maître aux allures de pantin au révolté victime de cet ordre bourgeois qui récupère Walther, très assuré vocalement malgré un aigu limité, chantant toute sa partie sans le moindre Sprechgesang débraillé, en rupture avec une certaine tradition – il ne fait pourtant pas oublier, de ce point de vue, le regretté Hermann Prey. Klaus Florian Vogt triomphe également en Stolzing, belle voix claire, toujours un rien nasale, à l’aigu insolemment facile, au médium plus étoffé que naguère, dont on aime la souplesse d’émission mais dont on attendrait plus de legato dans le phrasé. Superbe David de Norbert Ernst, lumineux et bien timbré, rien moins que valet bouffon. Les principaux maîtres, en revanche, déçoivent, mis à part le Kothner impérieux de Markus Eiche. Artur Korn, usé jusqu’à la corde, a bien du mal à faire exister son Pogner grisâtre, surtout au premier acte. Quant à Franz Hawlata, il n’a visiblement pas les moyens de son rôle, trop court de voix et de timbre, n’arrivant guère à passer la rampe dès que l’orchestre dépasse la nuance piano, à bout de forces à la fin du troisième acte. A partir de là, il ne peut évidemment composer qu’un Sachs sans grand relief, en aucun cas la figure centrale des Maîtres. Flanquée de la Magdalene pétulante de Carola Gruber, Michaela Kaune fait également pâle figure, pas très juste d’aigu, la voix dans les joues, bien plate dans le début du Quintette. Heureusement, le chœur soutient superbement sa réputation et Sebastian Weigle, à défaut de profondeur, ne dirige ni lourdement ni sèchement : le flux orchestral reste assez clair, porté par un certain sens de la narration, non sans les pointes d’humour nécessaires, avec de beaux moments de raffinement poétique dans le début du troisième acte.



Didier van Moere

 

 

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