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Aldo Ciccolini ou la grandeur et l’humilité

Montpellier
Opéra Berlioz-Le Corum
07/24/2008 -  
Muzio Clementi : Sonate en sol mineur op. 34 n°2
Carl Czerny : Sonate n°1 en la bémol majeur op. 7
Ludwig van Beethoven : Sonates n°14 en ut dièse mineur op. 27 n°2 « Clair de lune », et n°21 en ut majeur op. 53 « Waldstein »

Aldo Ciccolini (piano)


A. Ciccolini (© Luc Jennepin)


Master classes, récital, concert avec orchestre : Aldo Ciccolini reste un fidèle de Montpellier, qu’il ne déçoit jamais. Le programme de son récital, pourtant, comprenait cette année deux œuvres peu jouées. La Sonate en sol mineur de Clementi fait depuis longtemps partie de son répertoire, mais celle de Czerny en la bémol majeur lui a été révélée par René Koering, infatigable chercheur de raretés. Le pianiste joue Clementi comme un compositeur de son temps, sans le tirer vers le romantisme, avec fermeté et clarté ; il la rigueur de la polyphonie et la beauté de la sonorité, notamment dans le mouvement lent, où l’art cache admirablement l’art. Beethoven s’annonce aussi, sous ses doigts, dans l’Allegro con fuoco initial, par le jeu sur les masses sonores et les contrastes dynamiques, sans toutefois la moindre dureté. La Sonate de Czerny, d’abord connu des pianistes pour ses très efficaces Etudes, n’a jamais semblé ennuyeuse malgré ses quarante minutes, tant Ciccolini s’y est montré inventif, trouvant le secret de son unité, montrant bien tout ce qu’elle doit à Beethoven, le maître de Czerny, mais aussi ce qu’elle a déjà de schubertien ou de schumannien, ménageant l’équilibre entre une expression parfois passionnée – le Prestissimo agitato - et l’attachement à la grande forme – après les quatre mouvements traditionnels de la Sonate, comme le fait remarquer Marc Vignal, la partition est couronnée par une fugue elle-même suivie d’une reprise des premières mesures.


Le Beethoven d’Aldo Ciccolini est atypique, très éloigné d’une certaine tradition allemande, tant il cherche à équilibrer les contrastes et à enchaîner les différents mouvements pour les fondre dans un ensemble. Cela frappe d’abord dans la célèbre « Clair de lune » intériorisée et perpétuellement sous contrôle, notamment dans le finale, rien moins que virtuose : les trois parties semblent n’en faire qu’une, avec un Adagio sostenuto d’une pureté sonore inouïe – ce que fait la main droite est assez prodigieux. Le début de la « Waldstein » surprend par la rapidité du tempo, qui la rend beaucoup plus légère que de coutume, d’autant plus que le pianiste y montre, à presque 83 ans, une stupéfiante vélocité, tous les doigts étant également déliés. Curieusement, la partition semble ici regarder plutôt vers le 18e siècle, alors qu’elle est aussi audacieuse que sa contemporaine l’Apassionata : elle sera, jusqu’au finale, qui semble émerger d’un rêve, d’une volubilité et d’une transparence toutes latines. Ce n’est décidément pas le Beethoven de tout le monde et c’est là ce qui fait son prix, surtout joué avec une telle maîtrise et une telle imagination.


En bis, l’Intermezzo en la majeur de l’opus 118 de Brahms, d’une densité poétique rare. Le pianiste salue chaque partie de la salle, à la fois humble et majestueux, heureux de son triomphe, sans doute plus heureux encore d’avoir servi la musique.



Didier van Moere

 

 

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