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Ce n’est qu’un au revoir

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
07/12/2008 -  
Ludwig van Beethoven : Symphonies n° 8, opus 93, et n° 9, opus 125
Melanie Diener (soprano), Marie-Nicole Lemieux (alto), Jorma Silvasti (ténor), Georg Zeppenfeld (basse)
Chœur de Radio France, Matthias Brauer (chef de chœur), Maîtrise de Radio France, Marie-Noëlle Maerten (chef de chœur), Orchestre national de France, Kurt Masur (direction)


S’il en était besoin, la huitième et dernière soirée du cycle Beethoven offert au Théâtre des Champs-Elysées par Kurt Masur à l’occasion de ses ultimes apparitions en tant que directeur musical de l’Orchestre national de France revêtait encore plus de solennité, avec l’installation, à l’avant-scène côté cour, d’une sculpture représentant la tête du compositeur, réalisée en 1902 par Bourdelle, quelques années avant qu’il ne conçoive les bas-reliefs ornant la façade de l’avenue Montaigne. Et, malgré les vacances scolaires, au beau milieu du week-end prolongé du 14 juillet, la foule s’est pressée pour rendre hommage au chef allemand, accueilli d’emblée par de longs applaudissements. Parmi les personnalités venues pour l’occasion, Henri Dutilleux, dont il a créé à Paris Sur un même accord (voir ici) puis Correspondances (voir ici).


Au terme de cette intégrale des Symphonies explorée de façon chronologique, jusqu’alors à raison d’une par concert, il en restait donc deux: la «petite» Huitième (1812) allait-elle être écrasée par l’immense Neuvième (1824)? Masur allège l’effectif – et place à nouveau les cors derrière les trompettes – mais confirme sa nature terrienne: pas davantage haydnienne que ne l’avait été la Quatrième (voir ici), sa Huitième regarde déjà plutôt vers Brahms. Il prend son temps – le premier Allegro peut difficilement prétendre respecter l’indication vivace e con brio – mais la puissance et la densité du discours compensent cette lenteur, parvenant à soutenir l’intérêt. Si l’humour ne trouve guère à s’exprimer, c’est au profit du charme ou même de la poésie.


Dès le rythme pointé des toutes premières notes de la Neuvième, c’est un ton résolument volontariste qui s’impose: l’Allegro ma non troppo initial ne sera pas le lieu d’une célébration brucknérienne, mais un portique sobre, voire austère, solidement ancré dans la pâte orchestrale, avec un effectif augmenté de deux bassons et d’une trompette, mais aussi dans un immémorial legs interprétatif. Rien d’anecdotique dans cette approche mesurée, stylistiquement inattaquable, qui laisse entièrement place à la musique pure. On en deviendrait difficile, pour regretter que la seconde reprise du Scherzo n’ait pas été observée, rien que pour le plaisir de pouvoir bénéficier ainsi un peu plus de la démonstration subtile et précise de Didier Benetti aux timbales. D’une simplicité et d’une évidence rares, le mouvement lent évite tout alanguissement, tandis que le finale confirme un souci de clarté quasiment pédagogique, qui ne tourne heureusement pas à la simple radiographie du texte. Effets dosés, progressions soigneusement construites, on retrouve l’architecte de la Septième (voir ici), plus fervent que débridé, pour une version de référence davantage que d’anthologie, suscitant plus l’admiration que l’enthousiasme.


Comme un bonheur ne vient jamais seul, le quatuor soliste, entré en scène après le deuxième mouvement – se sent-il si peu concerné par ce qui précède et imagine-t-on un tel comportement de la part du chœur, du piccolo, du contrebasson ou des percussionnistes? – se révèle le meilleur qu’on ait entendu depuis longtemps dans ces parties inchantables. Et puisqu’il fallait que toutes les forces de Radio France participent à cet événement, une petite quarantaine de membres de la Maîtrise apportent au Chœur de Radio France une touche de verdeur inattendue.


Un magnifique cadeau de départ, suivi des gestes, prévisibles mais pas moins sincères, qui marquent de tels moments: ovation debout, bouquets de fleurs, remerciements de Dominique Meyer, directeur général du Théâtre des Champs-Elysées, au micro de Gérard Courchelle. Comme de coutume, Masur s’éloigne en emmenant à son bras Sarah Nemtanu, premier violon solo, et Sabine Toutain, premier alto solo. Mais, à six jours de ses quatre-vingt-un ans, il ne quitte pas pour autant le National, tant s’en faut: il fêtera ainsi son anniversaire pendant une tournée en Italie et en Espagne (16-19 juilet) avec l’orchestre, lequel se produira ensuite à Montpellier avec Daniele Gatti, le nouveau directeur musical (30 juillet).


Et même pour le public parisien, c’est d’un au revoir et non d’un adieu qu’il s’agit. Car il aura suffi de deux mandats de trois ans pour que celui qui devint en 1997 le premier Ehrendirigent de l’histoire de l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig, aux destinées duquel il avait présidé durant un quart de siècle, soit également le premier à se voir conférer le titre de «directeur musical honoraire à vie» du National. Une marque de reconnaissance, bien sûr, adressée à celui qui, s’il ne fut pas un bâtisseur à l’égal de Marek Janowski à la tête de l’Orchestre philharmonique de Radio France, a requinqué une formation dont le moral était au plus bas à son arrivée et lui a transmis une précieuse tradition. Mais aussi une fonction qui sera loin d’être exclusivement honorifique, puisqu’il reviendra à plusieurs reprises la saison prochain dans la capitale (19 et 27 novembre au Châtelet, 10 et 15 janvier au Théâtre des Champs-Elysées, 18 juin à Saint-Denis).


Le site de Kurt Masur



Simon Corley

 

 

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