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Lettres intimes Paris Athénée-Théâtre Louis-Jouvet 05/19/2008 - Leos Janacek : Quatuor n° 2 «Lettres intimes»
Wolfgang Amadeus Mozart : Quintette à cordes n° 4, K. 516
Arnold Schönberg : Verklärte Nacht, opus 4
Alain Carré (comédien), Vincent Aucante (alto), Emmanuelle Bertrand (violoncelle), Quatuor Psophos: Lisa Schatzman, Bleuenn Le Maître (violon), Cécile Grassi (alto), Eve-Marie Caravassilis (violoncelle)
Le Quatuor Psophos achève la deuxième des trois années de sa «résidence» au Théâtre de l’Athénée. Les six concerts de 2006-2007 avaient permis de découvrir la violoncelliste Eve-Marie Caravassilis, qui avait succédé en avril 2006 à Ingrid Schoenlaub. Quant aux quatre concerts de 2007-2008, ils ont marqué l’intégration de Lisa Schatzman, qui s’est substituée en juin 2007 à Ayako Tanaka au premier violon.
Autant de changements – avant même que l’altiste Cécile Grassi, qui connaîtra prochainement les joies de la maternité, ne soit provisoirement remplacée en alternance par Arnaud Thorette et Franck Chevalier (Quatuor Diotima) – qui ne semblent cependant pas se traduire par une incidence sensible sur les principales caractéristiques de la formation, ainsi que l’aura montré cette dernière soirée de la saison, intitulée «Lettres intimes» et débutant naturellement par le (second) Quatuor (1928) éponyme de Janacek. Les Psophos ont conservé cette sonorité plus légère que ronde, ces textures plus transparentes que denses, cette expression plus subtile que passionnée qui, à vrai dire, feraient merveille chez Debussy ou Ravel, mais laissent quelque peu perplexe dans Janacek, où leur jeu paraît en outre davantage animé par un souci d’exactitude que par un élan spontané.
Tout au long de ces séries à l’Athénée, les musiciennes, en s’entourant d’artistes de leur génération (autour de la trentaine), ont pu aller au-delà du répertoire du quatuor: avec Vincent Aucante, deuxième alto solo à l’Orchestre philharmonique de Radio France, elles donnent ainsi le Quintette en sol mineur (1787) de Mozart. «Lettres intimes», ô combien, puisque même en l’absence de programme explicite, c’est ici l’une des œuvres où l’on croit entrevoir le mieux le tréfonds de la personnalité du compositeur, passant si rapidement du (sou)rire aux larmes. Tout fonctionne mieux que dans Janacek: progression du discours, qualité du dialogue entre les pupitres, respiration (Allegro), sens dramatique (Minuetto au troisième temps hargneux, Allegro final presque précipité, fuite en avant plus que libération), juste milieu expressif, entre fadeur et pathos (Adagio ma non troppo).
Une réussite qui ne se renouvelle pas tout à fait en seconde partie dans La Nuit transfigurée (1899). Alain Carré, comédien habitué des spectacles musicaux, avait fait précéder Janacek et Mozart de quelques extraits de leur correspondance, mais le principe change pour le sextuor de Schönberg, qui devient, pour emprunter un titre à André Caplet, un «septuor pour cordes vocales et instrumentales». Car la lecture du poème de Richard Dehmel qui a inspiré la partition se superpose à son exécution et même si les moments au cours desquels intervient le récitant sont opportunément choisis et si la musique suit d’assez près le récit de cette nuit, certains auront peut-être été gênés par le caractère inhabituel de cette initiative: La Nuit transfigurée n’est pas un mélodrame comme Pierrot lunaire ou même l’Ode à Napoléon.
Le texte imprimé ou un surtitrage auraient tout aussi bien fait l’affaire, d’autant qu’Alain Carré est obligé d’étaler les trente-six vers sur près d’une demi-heure et, adoptant un ton ampoulé évoquant la Comédie française des années 1950, se montre moins à son avantage que, par exemple, dans son spectacle avec François-René Duchâble (voir ici) ou dans l’étonnant Corbeau à quatre pattes de Maratka (voir ici). Autre intrus de choix, le somptueux second violoncelle d’Emmanuelle Bertrand, trémolos serrés et archet rageur, mais trop peu intégré à ses cinq partenaires, pas toujours très heureux, quant à eux, dans leurs choix interprétatifs comme dans la réalisation technique.
Le site du Quatuor Psophos
Le site d’Emmanuelle Bertrand
Simon Corley
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