About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Hommage à la diversité de la musique française

Paris
Maison de Radio France
05/16/2008 -  
Georges Bizet : Jeux d’enfants, opus 22
Edouard Lalo : Concerto pour violoncelle
Camille Saint-Saëns : Concerto pour piano n° 2, opus 22
Paul Dukas : La Péri

Marc Coppey (violoncelle), Racha Arodaky (piano)
Orchestre national de France, Fabien Gabel (direction)


Alors qu’il est aisé, même pour un orchestre français, de remplir une salle en programmant Beethoven, Brahms ou Schumann, l’Orchestre national de France avait décidé de donner un concert entièrement dédié à certaines pièces du répertoire français emblématique de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, commençant par les Jeux d’enfants de Bizet. Composés en septembre 1871 pour piano à quatre mains, les douze mouvements initiaux furent réduits à cinq dans le cadre d’une suite pour orchestre créée en mars 1873 sous la direction d’Edouard Colonne. A la Marche (Trompette et tambour) initiale où brillent trompettes et flûte piccolo, succèdent une Berceuse (La Poupée) caractérisée par un mouvement lancinant des violoncelles puis une étourdissante Toupie (Impromptu) où les flûtes s’entrechoquent avec les pizzicati des cordes. Le contraste avec le calme Duo «Petit mari, petite femme» est saisissant, d’autant que celui-ci est suivi par Le Bal (Galop), mouvement endiablé et virtuose. Quelles que soient les couleurs exigées, l’Orchestre national de France fait preuve d’un investissement remarquable, les pupitres rivalisant en technicité sous la direction un peu raide de Fabien Gabel.


Le programme se poursuivait par deux œuvres concertantes dont la première n’était autre que le célèbre Concerto pour violoncelle composé en 1876 par Lalo à l’attention du violoncelliste Adolphe Fischer, qui en fut d’ailleurs le créateur un an plus tard au Cirque d’hiver. Cette composition s’inscrit dans une période particulièrement féconde dans la vie du compositeur puisqu’elle fait suite au Concerto pour violon (1873) et surtout à son chef-d’œuvre, la Symphonie espagnole (1875). Après une brève et martiale introduction orchestrale, Marc Coppey entre en scène: puissant, rond, le violoncelle instaure d’emblée un climat inquiétant et angoissé auquel répond parfaitement l’orchestre. Le deuxième mouvement, un Intermezzo, est le plus original puisqu’il alterne passages très oppressants (les timbales instaurant une véritable atmosphère de marche funèbre) et, à deux reprises, parenthèses joyeuses aux accents folkloriques qui se manifestent par un dialogue insouciant entre le violoncelle et les flûtes. Marc Coppey, à l’unisson de l’orchestre, se montre tour à tour élégiaque, virtuose et espiègle (les trois pizzicati conclusifs interprétés comme un pied de nez à la mort qui hante le reste du mouvement!), rendant parfaitement justice à la richesse d’une partition qui figure depuis longtemps parmi les chevaux de bataille des violoncellistes. Le troisième mouvement est une danse (une tarentelle selon certains) recourant à des motifs ibériques qui ne sont pas sans préfigurer España de Chabrier (1883). Là encore, la réussite des interprètes, qui manifestent une joie visible à cheminer dans ce parcours coloré, est totale. En bis, Marc Coppey fait montre, si besoin était, de ses immenses talents de virtuose en interprétant la première des Trois strophes sur le nom de Sacher (1976) que Dutilleux a composées pour les soixante-dix ans de Paul Sacher à la demande de Mstislav Rostropovitch.


Le Deuxième concerto pour piano de Saint-Saëns fut composé en moins de trois semaines en 1868, à l’occasion du premier concert parisien dirigé par Anton Rubinstein, qui en dirigea la création avec le compositeur lui-même au piano. L’introduction, confiée au piano seul, trouve son origine à la fois chez Bach pour ce qui est de la forme et chez Fauré pour ce qui est du thème, les talents d’improvisateur et d’organiste de Saint-Saëns ayant fait le reste. Adoptant à cet effet un tempo très retenu, Racha Arodaky déploie un jeu qui s’avère quelque peu ennuyeux dans ce mouvement. Le piano ne nécessitant pas en effet d’être très virtuose à ce stade, on sent la soliste peu concernée et, de ce fait, peu en phase avec l’orchestre, son toucher marquant ça et là certaines hésitations. En revanche, dès le début de l’Allegro scherzando, le jeu de la pianiste se libère totalement. Dans un tempo plus rapide, elle fait alternativement office de premier rôle et d’accompagnateur de la danse que jouent les violoncelles et les violons après avoir, dans un premier temps, dialogué avec les bois (flûtes et clarinettes) dans une infinie délicatesse. Le finale, un Presto encore plus rapide que le mouvement précédent, gagne encore en théâtralité et permet à Racha Arodaky d’étaler l’ensemble de sa technique époustouflante qui suscite l’admiration enthousiaste du public, y compris le plus connaisseur (François-Frédéric Guy, par exemple, n’étant pas le dernier à applaudir).


Le concert se terminait par La Péri de Dukas. Alors qu’il enseigne l’harmonie au Conservatoire de Paris, Dukas s’était lancé dans la composition d’une œuvre initialement destinée aux Ballets russes de Diaghilev. Suite à un désaccord interprétatif entre les deux hommes, ce poème dansé fut en définitive créé en avril 1912, au Châtelet, par la grande danseuse Trouhanova. L’histoire de La Péri est connue: cherchant inlassablement la fleur de l’Immortalité à travers ses voyages, le prince Iskender la trouve à Ormuz et la dérobe à une fée orientale, la Péri, qui la cachait en son sein. S’apercevant du vol à son réveil, la Péri hypnotise le prince dans une danse envoûtante, lui reprend la fleur avant de le laisser mourir. Fabien Gabel est ici plus à son affaire même s’il gomme en partie l’aspect dansé d’une pièce originellement destinée à des ballets... Faisant sonner un Orchestre national de France en grande forme, notamment dans la fanfare introductive confiée aux cuivres, il dirige l’œuvre avec précision et efficacité, veillant aux différents plans sonores et aux délicates ruptures rythmique, même si l’on peut regretter une gestique quelque peu grandiloquente.



Sébastien Gauthier

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com