About us / Contact

The Classical Music Network

Normandie

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Légèreté et nuages noirs

Normandie
Deauville (Salle Elie de Brignac)
05/01/2008 -  
Sergueï Prokofiev: Sonate pour violoncelle et piano en ut majeur , opus 119
Dimitri Chostakovitch : Quintette pour piano et cordes en sol mineur, opus 57
Antonin Dvorak : Sextuor à cordes en la majeur, opus 48

Jérôme Benhaïm, Amaury Coeytaux (violon), Lise Berthaud, Arnaud Thorette, Baptiste Vay (alto), Jérôme Pernoo, Yan Levionnois, Victor Julien-Laferrière (violoncelle), Jérôme Ducros, Jonas Vitaud (piano)


Le sixième concert du festival de Pâques de Deauville était donné cette année le jour de l’ouverture du salon annuel Livres & Musiques. Créé plus récemment, en 2004, celui-ci privilégie les livres inspirés par la musique quelle que soit son origine. Après le jazz en 2007, l’accent devait être mis cette année sur les « Afriques ». Tables rondes, lectures, animations diverses et remise d’un prix littéraire de la ville de Deauville décerné par un jury présidé par Jérôme Garcin et élargi à deux éminents artistes, fidèles du festival – Jérémie Rohrer, directeur musical du Cercle de l’harmonie et Julien Chauvin, premier violon solo dudit cercle – devraient ainsi accompagner très opportunément la fin de la remarquable série de concerts organisés par Yves Petit de Voize, tout en fournissant un nouveau témoignage de l’importance de la politique culturelle soutenue par le maire de la ville, Philippe Augier. Deauville n’est pas que la capitale du cheval, des machines à sous et des paillettes ou une escale pour stars américaines en tournée de promotion. A deux heures des bords de mer, à Paris, il serait bon qu’on le sache et donc que l’on sache profiter des occasions qui s’y présentent pour découvrir de nouveaux talents littéraires ou musicaux.


Le sixième concert n’était pas vraiment assuré par de nouveaux talents mais plutôt par d’anciens nouveaux talents puisqu’ils fréquentent Deauville depuis maintenant plusieurs annnées et que certains sont même des fondateurs du festival. Jérôme Pernoo et Jérôme Ducros sont de ceux-là et il convient de les remercier pour leur fidélité.


Ils débutèrent par la Sonate pour violoncelle et piano (1949) de Prokofiev. Créée par Mstislav Rostropovitch et Sviatoslav Richter, fortement influencée par le premier et donc comportant une partie de violoncelle très virtuose, mais de facture classique, cette sonate fut jouée avec une certaine humeur badine tout à fait adaptée. Le pianiste resta volontairement – peut-être un peu trop – en retrait et laissa Jérôme Pernoo, plus sobre que l’an dernier dans la même salle, libérer du coup un violoncelle généreux et lyrique. Après un deuxième mouvement rappelant l’Amour des trois oranges ou Pierre et le loup, l’Allegro ma non troppo final fut des plus plaisants, le violoncelle étant cependant un peu moins précis.


Avec le célèbre Quintette avec piano (1940) de Chostakovitch, marqué par le désespoir des années de guerre et la rigueur implacable des fugues de Bach, le climat était tout autre. Et il convint moins aux interprètes. Si le piano puissant et toujours clair de Jonas Vitaud fut de bout en bout remarquable de justesse de ton, les cordes, excessivement stridentes, manquèrent autant de pureté que de densité tragique. Cela fut notamment le cas dans l’impressionnante déploration du Lento initial préfigurant les Préludes et fugues écrits pour le bicentenaire de la mort de Bach. On frisa l’emballement dans l’Adagio mais le caractère sarcastique voire caricatural de certaines pages du Scherzo et de l’Allegretto final fut heureusement assez bien rendu.


Le programme s’acheva, après une pause permettant à la famille des festivaliers de voir, du parc entourant la salle, une nouvelle vague de lourds nuages noirs s’éloigner et aux interprètes de la première partie de rejoindre de façon bien sympathique le public, sur une musique moins désespérante ou plus chaleureuse : le très brahmsien Sextuor à cordes (1879) de Dvorak. Sa suite de reprises de thèmes joliment tournés, parfois dansants et empruntés au folklore, ne pouvait susciter beaucoup d’enthousiasme mais les jeunes interprètes furent dignes d’éloges, notamment dans les mouvements impairs, un curieux sentiment de fragilité se dégageant dans les mouvements moins allants. L’ensemble des cordes, bien huilé, au sein desquelles se distingua notamment l’alto de Baptiste Vay, y parut en effet d’une excessive prudence. Mais c’est celle-ci qui finalement et paradoxalement laissa quelqu’émotion.



Stéphane Guy

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com