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Des amoureux de rêve Vienna Konzerthaus 04/23/2008 - et les 25* et 28 avril 2008 Vincenzo Bellini: I Capuleti e i Montecchi
Anna Netrebko (Giulietta), Elina Garanca (Romeo), Joseph Calleja (Tebaldo), Robert Gleadow (Lorenzo), Tiziano Bracci (Capellio)
Wiener Singakademie, Wiener Symphoniker, Fabio Luisi (direction musicale)
Version de concert
Chantera, chantera pas? Après l’annulation de deux représentations de Manon à l’Opéra, Vienne n’avait que cette interrogation à la bouche. Finalement, Anna Netrebko – puisque c’est d’elle qu’il s’agit ici – est remontée sur scène, au Konzerthaus cette fois, pour trois représentations concertantes de I Capuleti e i Montecchi, pour le plus grand bonheur d’un public qui n’a d’yeux que pour elle. Malgré une direction musicale calamiteuse, ces soirées viennoises se sont révélées de véritables moments de bonheur pour les amateurs de voix; elles devraient d’ailleurs faire l’objet d’un enregistrement à paraître en début d’année prochaine.
Mais revenons à Anna Netrebko: la chanteuse a incarné une Juliette amoureuse et profondément mélancolique, avec un médium riche en couleurs et un timbre suave aux nuances sombres. Sa prestation a été d’autant plus émouvante que plusieurs passages de la partition lui ont posé des difficultés. D’évidents problèmes de souffle ont aussi souligné la fragilité de la diva, en raison de sa grossesse. Les Parisiens la verront-il à la Bastille le mois prochain? Rien n’est moins sûr… Quoi qu’il en soit, sa voix s’est mariée de façon idéale à celle de Roméo, incarné avec maestria par Elina Garanca. La chanteuse lettone a été la grande triomphatrice de ces représentations, avec des graves sonores et capiteux et une maîtrise éblouissante de la ligne de chant, offrant une superbe démonstration de legato. On peut seulement regretter que son personnage soit resté bien lisse, sans beaucoup de caractère. Ce duo vocal hors du commun était complété par un Tebaldo de luxe en la personne de Joseph Calleja, dont la technique s’est considérablement améliorée et qui a offert des aigus lumineux, ainsi que par les solides interventions de Robert Gleadow et Tiziano Bracci.
Le gros bémol aura été la direction musicale. Mettre Fabio Luisi à la tête d’un orchestre dont le belcanto ne constitue pas le répertoire de prédilection aura été en effet une monumentale erreur de casting, d’autant que le chef lui-même n’a montré aucune affinité avec ce type de musique. Tout au long de la soirée, il n’a eu qu’une seule devise: toujours plus vite et toujours plus fort, au mépris de tout raffinement et de la moindre nuance. Dans ces conditions, malgré la très haute tenue du plateau vocal réuni à Vienne, la version de Riccardo Muti (EMI) devrait encore avoir de beaux jours devant elle.
Claudio Poloni
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