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« J’entre en solitude et j’ai peur »

Bruxelles
La Monnaie, Salle Malibran
04/17/2008 -  et le 18*, 20, 23 et 24 avril 2008
Pierre Bartholomée : La Lumière Antigone (création)
Mireille Delunsch (Antigone), Natascha Petrinsky (Hannah)
Ensemble de musique de chambre de la Monnaie, Koen Kessels (direction)
Philippe Sireuil (mise en scène), Kurt Ralske (vidéo), Vincent Lemaire (décors), Jorge Jara (costumes)



Avec La Lumière Antigone, Pierre Bartholomée offre un complément plus qu’une suite à son précédent ouvrage lyrique Œdipe sur la route, créé à la Monnaie en mars 2003 sous la direction de Daniele Callegari et dont le rôle-titre fut tenu par José van Dam. Composés sur un livret de l’écrivain belge Henry Bauchau conçu d’après deux de ses propres ouvrages, montés par la même équipe (Philippe Sireuil, Vincent Lemaire, Jorge Jara), ces deux opéras s’opposent en effet sur plus d’un point : alors que le premier relevait du grand spectacle épique, proche de la trame du roman éponyme, avec un orchestre fourni, une large distribution et un décor imposant, le second, sensiblement plus court (soixante-quinze minutes) et moins fidèle au roman dont il s’inspire, recourt à une formation de quinze instrumentistes, à deux solistes et à un dispositif scénique plus intimiste. La structure, symétrique, diffère en outre également : trois actes enchaînés, le premier et le dernier consistant en un monologue, le deuxième en un dialogue.


Pour s’être opposée à l’autorité qui voulait livrer son frère aux vautours, Antigone est condamnée à mort, enfermée seule dans une grotte. Sa confrontation avec Hannah, femme d’aujourd’hui surgissant du public, qui lui révèle ce qu’il est advenu des hommes, ses drames, ses folies, ses luttes et ses espoirs (épisode illustré par une remarquable projection vidéo), constitue sans doute le point culminant de ce spectacle dont tant le texte que la musique interpellent. Le livret (en français) de Bauchau est à l’image de la partition : concis, sans un mot de trop, riche de significations, porté par la poésie, au point qu’il s’avère tentant d’y prêter plus d’attention qu’à la musique, belle, raffinée, plus variée dans son expression que dans ses tempi et ne cédant jamais à la facilité. L’absence du livret dans le programme de salle n’en est que plus regrettable.


Dans un décor simple – une ouverture carrée pratiquée dans un écran elliptique et de couleur sombre symbolise la grotte –, Mireille Delunsch compose le personnage d’Antigone avec intensité et une saisissante présence. Son visage, filmé et projeté en noir et blanc (avec des arrêts sur image du plus bel effet), témoigne de son appropriation totale du rôle. Il fallait à la soprano française une partenaire de choix : la mezzo Natascha Petrinsky incarne une Hannah charismatique, aussi belle que d’allure moderne, et dont les convictions et les idéaux révèlent plus d’une analogie avec la mythique Antigone dont elle constitue progressivement l’équivalent durant dernier acte où elle seule apparaît.


La Salle Malibran des Ateliers de la Monnaie ne disposant pas de fosse, les musiciens, dirigés avec soin et précision par Koen Kessels, font partie intégrante du dispositif scénique qui offre quelques références visuelles bienvenues à la production d’Œdipe sur la route. La partie d’orchestre réserve de nombreuses (et virtuoses) parties solistes aux quinze instrumentistes (cordes, bois, cuivres, piano et percussions) issus de l’Orchestre Symphoniques de la Monnaie mais ils s’en tirent avec les honneurs.


Après Phaedra de Hans Werner Henze présenté en début de saison à la Monnaie, ce remarquable mais exigeant spectacle, donné dans le cadre d’Ars Musica, montre à quel point les figures mythologiques préoccupent les créateurs d’aujourd’hui tout autant que ceux d’hier.



Sébastien Foucart

 

 

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