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Vitesse et précipitation Paris Salle Gaveau 04/09/2008 - Gabriel Fauré : Dolly, opus 56
Manuel de Falla : Danses espagnoles extraites de «La Vida breve» (arrangement Isabelle Lafitte)
Darius Milhaud : Scaramouche, opus 165b
Claude Debussy : «Nuages» et «Fêtes» extraits des Nocturnes (arrangement Maurice Ravel)
Serge Prokofiev : Symphonie n° 1 «Classique», opus 25 (arrangement Rikuya Terashima)
Maurice Ravel : Seconde suite de «Daphnis et Chloé» (arrangement Lucien Garban)
Karin Lechner, Sergio Tiempo (piano)
L’avant-dernier des concerts parisiens des «Nouveaux virtuoses», organisé comme de coutume avec l’aide d’une «junior entreprise», en l’espèce celle de l’Institut national agronomique de Paris-Grignon, accueillait Karin Lechner et Sergio Tiempo: les deux Argentins se situeraient dans la descendance traditionnelle des fratries pianistiques (Kontarsky, Labèque, Pekinel, ...) si chacun d’entre eux ne continuait pas à réserver l’essentiel de son activité à une carrière soliste. On reconnaît en tout cas sans peine en eux la patte, pour ne pas dire la griffe, de protégés de Martha Argerich, avec un enthousiasme débordant qui malmène parfois Dolly (1896) de Fauré: Mi-a-ou et Le Pas espagnol résistent mieux à cette lecture plus divertissante que tendre.
Après ce quatre mains, la suite de ce copieux programme se déroulait à deux pianos. Isabelle Lafitte, qui forme également un duo avec sa sœur jumelle Florence, a transcrit les deux Danses espagnoles de La Vie brève (1905) de Falla, servies ici avec un élan et une pêche formidables. Cet état d’esprit convient encore mieux aux rythmes sud-américains de Scaramouche (1937) de Milhaud: le Vif initial est pris dans un tempo infernal, mais le Modéré central n’en retrouve pas moins la souplesse qui manquait à Dolly.
Entre 1902 et 1909, Ravel a arrangé les Nocturnes (1899) de Debussy: omettant le dernier volet du triptyque (Sirènes), Lechner et Tiempo déçoivent dans des Nuages plus brusques que vaporeux, poussés par un vent fort, puis dans des Fêtes précipitées et extérieures, évoquant une course effrénée. Cette virtuosité trouve mieux à s’employer dans la très périlleuse adaptation par Rikuya Terashima (né en 1964) de la Première symphonie «Classique» (1917) de Prokofiev: se sortant sans trop d’accrocs des mouvements extrêmes, les deux pianistes ne négligent pas pour autant le Larghetto et la Gavotte, fins et spirituels.
Si Ravel a lui-même conçu une première version de La Valse pour deux pianos, c’est à Lucien Garban (1877-1959) que l’on doit la transcription de la Seconde suite de Daphnis et Chloé (1912): force est de constater que l’absence de couleurs orchestrales se fait cruellement sentir, d’autant que Lechner et Tiempo adoptent une allure trop souvent raide et hâtive, comme dans le solo de flûte de la Pantomime centrale. Quelques mesures avant le début de la Danse générale finale, une alarme incendie se déclenche, un message enregistré invitant les spectateurs à quitter la salle: le temps d’une brève ovation aux musiciens, l’évacuation se fait dans le calme et, après quelques minutes d’interruption, la soirée peut se poursuivre.
On n’osera cependant pas dire que la Danse générale enflamme le public, qui obtient deux bis: une Danse vénézuelienne, hommage au pays dans lequel grandirent le frère et la sœur, puis de phénoménales Variations sur un thème de Paganini (1941) de Lutoslawski, qui plus est jouées par cœur.
Le site du duo Lechner/Tiempo
Le site de Karin Lechner
Le site de Sergio Tiempo
Simon Corley
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