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Der Dichter spricht Paris Salle Cortot 03/29/2008 - Johann Sebastian Bach : Le Clavier bien tempéré, livre II: Préludes et fugues n° 3, BWV 872, n° 7, BWV 876, et n° 17, BWV 886
Franz Schubert : Sonate n° 21, D. 958
Robert Schumann : Humoreske, opus 20
Olivier Reboul (piano)
Il faut redire tout l’intérêt de la programmation de l’association «Piano Con Moto», revendiquée comme «hors des sentiers habituels». C’est donc avec curiosité et intérêt que l’on se rend, en ce samedi soir, dans une salle Cortot à l’acoustique riche et sonore, mais insuffisamment remplie.
Comme l’an dernier, c’est la veille du passage à l’heure d’été que le discret Olivier Reboul change une fois encore de casquette, deux mois après avoir dirigé Don Giovanni au Conservatoire (voir ici), pour revenir à l’instrument pour lequel il obtint un premier prix du Conservatoire en 1979.
Joués sans pédale mais avec nuances, avec partition mais sans prosaïsme, les trois Préludes et Fugues de Bach, dont le choix et l’ordre se révèlent pleinement cohérents, ont une sonorité ronde et franche. L’unité du style d’Olivier Reboul est assurée par un jeu où les nuances se font rares et dont la sonorité se révèle presque étouffante.
Le tempo enlevé dans lequel sont abordés les quatre mouvements de la Sonate en ut mineur de Schubert déconcerte puis convainc: loin de rechercher des contrastes vertigineux dans les nuances et les rythmes et du mystère dans les silences, le pianiste français livre une vision très ramassée de l’œuvre, où les respirations sont rares, où l’enchaînement des mouvements se fait avec naturel et évidence, où l’unité de la conception évoque davantage le Schubert des lieder que l’ombre de Beethoven. Au risque d’accrocher les doigts, cette conception déterminée et très réfléchie de la partition laisse deviner un interprète original et authentique, qui inonde d’énergie un Allegro conclusif tendu et presque obsessionnel.
C’est la même impression d’obsession qui vient à l’esprit à l’écoute d’une Humoresque de Schumann dérangeante, torturée, parfois hachée ou précipitée, mais où le manque de nuances n’empêche nullement contrastes et fulgurances, exaltation et tendresse. Usant rarement du registre piano, Olivier Reboul distille pourtant, au moyen d’une frappe jamais brutale et d’une énergie toujours contrôlée, des sortilèges sonores qui font ressortir l’intimité et même l’humour de la pensée de Schumann: einfach und zart.
En bis, c’est sous les traits d’Eusebius que Reboul-le-poète réapparaît pour prendre congé, à travers la dernière pièce – livrée fantomatique et presque immobile – des Davidsbündlertänze (que la pianiste Colette Zérah, pivot de l’association «Piano Con Moto», interprètera le 12 avril prochain dans la même salle).
Le site de l’association Piano Con Moto
Gilles d’Heyres
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