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Promesses et confirmation Bruxelles Bozar, Salle Henry Le Bœuf 02/17/2008 - 14 (Anvers) et 15 (Tournai) février 2008 Maurice Ravel : Alborada del Gracioso
Witold Lutoslawski : Concerto pour violoncelle
Serge Prokofiev : Roméo et Juliette, suites n°1, opus 64 bis, n°2, opus 64 ter, et n°3, opus 101 (extraits)
Marie Hallynck (violoncelle)
Orchestre National de Belgique, James Gaffigan (direction)
Ils sont de plus en plus nombreux à vouloir se faire connaître. Qui ? Les baby chefs, autrement dit des jeunes maestros, certains ayant à peine trente ans, qui s’imposent, la plupart du temps avec une désarmante aisance, face à d’honorables formations. C’est ainsi que l’Orchestre National de Belgique s’est laissé séduire par Mikko Franck, au point que le poste de directeur musical lui a été octroyé de 2002 à la fin de la saison dernière, avec un résultat que certains jugent néanmoins discutable.
Le chef américain James Gaffigan, New Yorkais né en 1979, est encore peu connu, sa carrière se déroulant principalement dans son pays natal – bien qu’il soit déjà apparu en Allemagne et en Suisse –, en particulier auprès de formations fameuses comme le Cleveland Orchestra, dont il fut chef assistant, et le San Francisco Symphony Orchestra qui l’a accueilli en tant que chef adjoint aux côtés de Michael Tilson Thomas. Dès l’Alborada del Gracioso (1905/1918) de Ravel, aux rythmes bien imprimés, le charme opère, bien que d’autres puissent instiller plus d’ivresse, de rutilance et de chaleur hispanique dans les timbres. L’orchestre se présente sous un jour des plus favorable, en particulier les cordes, d’une belle tenue, sans oublier le remarquable solo de basson.
Créé en 1970 par Mstislav Rostropovitch, son dédicataire, le Concerto pour violoncelle de Lutoslawski compte parmi les plus importants du genre écrits au XXe siècle. Tout violoncelliste ayant à cœur de défendre le répertoire concertant de la seconde moitié du siècle dernier y trouve une partie soliste laissant toute latitude tant à l’expressivité qu’à la démonstration de sa virtuosité. Déployant un jeu puissant et large, d’une plastique et d’un grain séduisants, Marie Hallynck dialogue avec un orchestre inspiré et pouvant se montrer féroce et coruscant. De la longue Introduction pour violoncelle seul au spectaculaire Finale, une interprétation tendue, dans le meilleur sens du terme, mais constamment captivante, au point que l’on souhaite que cela ne se termine jamais.
Après avoir offert un écrin proche de l’idéal à la violoncelliste belge, James Gaffigan reste tout aussi crédible dans la seconde partie, avec huit extraits de Roméo et Juliette (1935) de Prokofiev. Il est possible de transcender davantage cette musique mais le chef américain y montre un certain panache ainsi qu’une attention soutenue à l’orchestre – malheureusement pas toujours précis –, ne laissant ainsi personne sur le bord du chemin. Fort de son expérience de la fosse, Gaffigan sait créer des effets dramatiques et des atmosphères, souligner le caractère narratif de la musique. Quelques moments de grâce, de lyrisme brûlant, d’impact (Mort de Tybalt), de sonorités idylliques ne s’oublieront pas de sitôt, bien que l’Américain réussisse mieux les pages plus violentes et animées. Le raffinement des instants de répit lui échappe encore quelque peu. Pour le moment, sans doute.
Sébastien Foucart
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