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Hommages

Paris
Cité de la musique
12/16/2007 -  
Johann Sebastian Bach : L’Art de la fugue, BWV 1080 : Canon in Hypodiapason (Canon alla ottava) – Contrapunctus VII per augmentationem et diminutionem (arrangements George Benjamin) – Contrapunctus XIX-Fuga a 3 soggetti (arrangement Marc-André Dalbavie) – Contrapunctus VI in stilo francese – Contrapunctus I (arrangements Bruno Mantovani)
Pierre Boulez : Mémoriale (…explosante fixe… Originel) – Dérive 1 – Messagesquisse – …explosante-fixe…

Philippe Aïche (violon), Vicens Prats (flûte), Eric Picard (violoncelle), Orchestre de Paris, Christoph Eschenbach (direction) – Emmanuelle Ophèle, Sophie Cherrier, Marion Ralincourt (flûte), Ensemble Intercontemporain, Andrew Gerzso (réalisation informatique), Pierre Boulez (direction)


La Cité de la musique organisait dans sa grande salle le dernier volet de son cycle consacré au spirituel dans l’art, autour de Pierre Boulez. Ce fut un canon d’hommages.


Tout d’abord, celui de la jeune génération – George Benjamin (1960), Marc-André Dalbavie (1961) et Bruno Mantovani (1974) – à la fois à Jean-Sébastien Bach, au travers d’arrangements pour petit ensemble d’extraits de L’Art de la fugue (1741), commandées par l’Orchestre de Paris, et à Pierre Boulez puisque la contrainte consistait à reprendre l’instrumentation de ses œuvres interprétées à la suite.


Le premier à ouvrir le feu, George Benjamin, était mieux servi que ses successeurs car il bénéficiait de l’instrumentation de Mémoriale. L’équilibre atteint, véritable symphonie de timbres, d’inspiration clairement webernienne – Anton Webern ayant ouvert la voie à l’exercice en 1935 avec son arrangement du Ricercar de L’Offrande musicale (1747) –, firent ressortir l’architecture de L’Art de la fugue, la force de ses silences, sa spiritualité abstraite avec une économie de moyens confondante.


Marc-André Dalbavie sembla moins inspiré dans l’utilisation de la palette sonore mise à sa disposition. Si le piano fut utilisé de façon variée (cordes retenues avec la main, effets de résonance), le vibraphone sembla par exemple curieusement délaissé, le discours paraissant au total plus décousu.


Bruno Mantovani enfin avait affaire à une gageure : récupérer l’ensemble composé uniquement de violoncelles utilisé pour Messagesquisse et éviter le style baroque. Le pari fut réussi en ce sens que le jeu des pizzicatos et des croisements de lignes sonores ne pouvait en rien rappeler l’œuvre inachevée du Cantor. L’audace était au rendez-vous aux confins du contrepoint.


Les œuvres de Pierre Boulez consistaient quant à elles, en dehors de Dérive 1, en des hommages à Paul Sacher (Messagesquisse) et Igor Stravinski (…explosante fixe…). Messagesquisse, composée en 1976 pour répondre à une commande de Rostropovitch, est une œuvre décidemment admirable : prolongeant le Divertimento pour cordes de Bartok, sa clarté, son équilibre, son dialogue, où l’hédonisme le dispute à la virtuosité, entre le violoncelle solo et ses frères furent remarquablement rendus par un ensemble de l’Orchestre de Paris mené par Christoph Eschenbach d’une précision exemplaire. Le public ne s’y trompa pas en rappelant plusieurs fois par leurs applaudissements nourris les violoncellistes.


L’hommage à Stravinski, rendu par Boulez lui-même, sorte de canon d’où fut extrait, dans le cadre d’un work in progress typiquement boulézien, un autre hommage, Rituel, destiné à Bruno Maderna, fut ouvert sur un tempo particulièrement rapide faisant ressortir sa pulsation de façon phénoménale. L’Intercontemporain, réparti de façon parfaitement symétrique, cordes à gauche, vents à droite, console électronique au milieu du public, flûtes à gauche, au centre et à droite, rendit justice à cette œuvre majeure du XXe siècle. Si quelques interférences électroniques furent à déplorer, sa poésie somptueuse, sa luxuriance et sa beauté, entrecoupées de discrets intermèdes, l’orchestre étant tenu dans une sorte de pénombre, éclatèrent au point d’être indissociables des mots, radicaux, d’André Breton qu’elles illustraient : « La beauté sera explosante-fixe, ou ne sera pas », avant que le noir complet n’envahisse la salle au dernier moment. Les flûtes, instruments de prédilection de Boulez depuis Le Marteau sans maître, sortes de sœurs jumelles cette fois-ci, furent à juste titre fortement applaudies, l’ensemble ayant montré sous la direction du maître des qualités probablement indépassables.



Stéphane Guy

 

 

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