About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Bonne humeur assurée!

Paris
Cité de la Musique
10/14/2007 -  
Georg Philipp Telemann : La Putain, “Burlesque” de “Don Quichotte”
Philippe Courbois : Dom Quichotte
Pierre de La Garde : La Sonate
Nicolas Racot de Grandval : La Matrone d’Ephèse

Dominique Visse (contre-ténor)
Café Zimmermann

La Cité de la musique consacre un cycle “Domaine Privé” à René Jacobs. Pendant une dizaine de jours, le chef d’orchestre va diriger un certain nombre de concerts mais aussi inviter de proches collègues et amis à se produire. Le nom de Dominique Visse est depuis presque toujours associé à celui de René Jacobs et il était donc évident que le contre-ténor soit associé à cet hommage. Le chanteur présente un programme original: il a rassemblé trois cantates dites « comiques » d’auteurs baroques assez peu connus, Philippe Courbois, Pierre de La Garde et Nicolas Racot de Granval. Ces trois pièces sont de petites merveilles stylistiques, bien plus que musicales.
 
 
Philippe Courbois (début du XVIIIe siècle) raconte l’histoire des amours de Don Quichotte. Il cherche bien sûr à ridiculiser le chevalier à la triste figure en insistant bien plus que de raison sur sa peine. Il y parvient tout à fait dans le dernier couplet au cours duquel l’écuyer de Don Quichotte minimise le pouvoir de l’amour et la peine de son maître: « La sauce que l’on fait pour elle Coûte plus cher que le poisson. ». Dominique Visse délivre une admirable interprétation : il commence la cantate par une voix sérieuse, pleine, très belle et d’une grande pureté sur « loin des yeux » puis se met progressivement à mimer l’histoire racontée, à la faire vivre par mille gestes discrets mais efficaces. Il achève de conquérir le public avec son imitation irrésistible de l’écuyer: il prend la voix d’un homme un peu lourdaud, bonhomme et pas très fin. L’orchestre le seconde parfaitement avec un phrasé également lourd et empesé. Dominique Visse, en plus de sa diction parfaite, est très attentif à donner un sens aux mots: ainsi il se montre languissant sur « goûtait à longs traits », etc…


La Matrone d’Ephèse de Nicolas Racot de Granval (1676-1753) est également un petit bijou et Dominique Visse relève le défi de jouer les cinq rôles, généralement distribués à plusieurs chanteurs. Mais qui, à part lui, est capable de métamorphoser sa voix, de la transformer de manière qu’elle devienne celle d’un soldat, d’une matrone, d’une suivante, d’un récitant et même d’un mort, puisque le mari fait une courte intervention ?! Dominique Visse explique la cantate à l’aide d’une très simple mise en espace (le pupitre représentant le cercueil du mari) et de quelques simples, mais suggestifs, gestes. D’entrée de jeu l’interprète décide de diminuer l’importance de la douleur de la Matrone en la ridiculisant avec des plaintes beaucoup trop fortes et trop abondantes pour être sincères: il souligne les « ô mort » d’une voix languissante et ses mimiques vont dans ce sens. Le chanteur change donc sa voix pour interpréter les divers personnages: la suivante fait immédiatement penser à la Nutrice du Couronnement de Poppée avec encore plus de gouaille. Quand il chante le soldat, il prend une voix plus masculine, plus virile et plus balourde puisque ce personnage ne brille ni par sa délicatesse ni par son intelligence. Mais c’est dans le rôle du mari que Dominique Visse sera le plus incroyable: il n’est pas question d’entendre ici un Commandeur mais plutôt une sorcière sortie tout droit de l’univers de Purcell.


La dernière pièce est aussi un régal mais dans un tout autre genre. Pierre de La Garde (1717-1792) écrit une œuvre dans laquelle il met en scène un compositeur-interprète en prise avec ses musiciens, au cours d’une répétition. Devant des instrumentistes assez indisciplinés, le personnage principal fait preuve d’autorité pour tenter de faire jouer son œuvre. Dominique Visse est l’interprète idéal pour cette parodie et il joue ce rôle avec une dextérité vocale et scénique extraordinaire. Il insiste sur la longueur interminable des cadences avec vocalise, sur les tempis rapides dans les airs de tempête, etc… 


Café Zimmermann est un soutien sans faille pour Dominique Visse, soulignant certaines de ses intentions. Les musiciens sont de très bonne qualité, même s’ils ont tendance à jouer un peu trop fort dans certains passages, couvrant ainsi la voix, pourtant puissante, du contre-ténor.



Ce concert fut un bonheur du début jusqu’à la fin! Dominique Visse et le Café Zimmermann ont permis, le temps d’une heure passée bien vite, de faire découvrir un répertoire curieux et très intéressant. Ce programme mérite vraiment d’être connu et d’être apprécié pour son imagination, son originalité et sa drôlerie.



Manon Ardouin

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com