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Dresde en mi bémol Paris Théâtre des Champs-Elysées 09/21/2007 - et 14 (Warszawa), 17 (Torino) septembre 2007 Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano n° 5 «L’Empereur», opus 73
Richard Strauss : Ein Heldenleben, opus 40
Hélène Grimaud (piano)
Staastskapelle Dresden, Fabio Luisi (direction)
Dans la compétition que se livrent les salles parisiennes pour présenter les grands orchestres étrangers, la Salle Pleyel, depuis sa réouverture, a marqué des points, accueillant notamment de prestigieuses phalanges américaines, mais le Théâtre des Champs-Elysées conserve la main, en particulier grâce aux formations germaniques: Philharmonies de Vienne (à deux reprises) et de Munich, comme de coutume, mais aussi orchestres des radios de Bavière (également à deux reprises), de Francfort et de Cologne. Et la Staatskapelle de Dresde, déjà invitée pour deux soirées la saison passée, dont une Neuvième de Mahler dirigée par Daniel Harding (voir ici), semble se plaire avenue Montaigne, puisqu’elle y revient à nouveau deux fois, d’abord avec Fabio Luisi, puis, le 29 mai, avec Myung-Whun Chung.
L’histoire récente de l’orchestre saxon a été bouleversée par la disparition subite de Giuseppe Sinopoli en avril 2001: tenu jusqu’en 2004 par Bernard Haitink, le poste de directeur musical est ensuite demeuré vacant durant près de trois ans. On comprend donc que Dresde ait souhaité marqué l’arrivée de son tout nouveau Generalmusikdirektor, ayant également juridiction sur la Sächsische Staatsoper, par une tournée européenne dont la dernière étape passait par Paris, avec un programme placé sous le signe héroïque de mi bémol majeur.
Une tournée inhabituellement mouvementée: quelques jours plus tôt à Prague, le concert a été annulé, Hélène Grimaud ayant jugé insuffisant l’instrument qui lui était proposé pour donner le Cinquième concerto «L’Empereur» (1809) de Beethoven. Rien de tel, fort heureusement, avec le Steinway installé sur la scène du Théâtre des Champs-Elysées: la pianiste française, qui vient d’enregistrer l’œuvre pour Deutsche Grammophon avec le même orchestre (mais sous la baguette de Vladimir Jurowski), en donne une lecture qui s’inscrit dans la grande tradition, marquée par la force de l’évidence. La solidité de sa technique, avec une puissance sans dureté, trouve une contrepartie à l’orchestre dans l’assise des basses, de même que son énergie combative est relayée par une direction vigoureuse et péremptoire, voire raide. L’excellence de son jeu se déploie sans donner l’impression de vouloir briller à tout prix, jusque dans le dépouillement de l’Adagio un poco mosso, où elle fait régner une pureté belcantiste.
Saluée par une ovation à la mesure de la ferveur de ses fans, Hélène Grimaud reçoit d’un spectateur un cadeau, apparemment en forme de disque compact, mais le retour des lumières fait comprendre au public qu’il n’y aura pas de bis.
Peu connu à Paris où, sauf erreur, il ne s’est pas produit au cours des dix dernières années, après un parcours qui l’a notamment conduit à Genève (Suisse romande) et à la Radio de Leipzig, Fabio Luisi, à quarante-huit ans, se trouve désormais à la tête d’une institution dont le seul nom fait rêver. Le choix, pour sa tournée inaugurale, de la Symphonie alpestre et d’Une vie de héros (1898) de Strauss, compositeur peut-être le plus emblématique de la Staatskapelle fait autant figure de défi que de test. De fait, l’orchestre confirme les qualités qui lui sont généralement reconnues, à commencer par ses légendaires cordes, auxquelles, dans Beethoven, le moindre pizzicato avait déjà suffi pour démontrer leur cohésion et leur sonorité.
S’il fait preuve d’un indéniable savoir-faire, le chef italien ne parvient pas toujours à éclaircir un écheveau polyphonique particulièrement dense, agaçant en outre par sa tendance à en rajouter et à pratiquer l’exagération dans une partition qui en est suffisamment prodigue. Et l’on comprend mal les raisons qui l’ont conduit à opter pour la «version originale», qui prend fin après le dialogue entre le cor solo et le premier violon, frustrant l’auditeur de la péroraison grandiose confiée aux bois et aux cuivres.
Le bis rend hommage à une autre grande figure de la vie musicale de Dresde, Weber, avec l’Ouverture de son Obéron (1826), où Luisi insiste un peu lourdement sur le sostenuto de l’Adagio introductif, avant un Allegro plus martial que con fuoco.
Le site du Théâtre des Champs-Elysées
Le site de la Staatskapelle de Dresde
Le site de Fabio Luisi
Le site d’Hélène Grimaud chez Deutsche Grammophon
Un site consacré à Hélène Grimaud
Simon Corley
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