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Marseille
Opéra
09/04/2007 -  7, 10, 13, 14 et 16 Septembre
Vladimir Cosma: Marius et Fanny (création)
Roberto Alagna (Marius, 4, 7, 10 et 13/09), Sébastien Guèze (Marius, 14 et 16/09), Angela Gheorghiu (Fanny, 4, 7, 10 et 13/09), Karen Vourc’h (Fanny, 14 et 16/09), Isabelle Vernet (Honorine), Jean-Pierre Lafont (César), Eric Huchet (Escartefigue), Bruno Comparetti (Monsieur Brun), Marc Barrard (Panisse), Antoine Garcin (Piquoiseau), Jean Michel Muscat (le facteur), Frédéric Leroy (Monsieur Richard), Jeanne Rocchesani (une cliente), Sophie Oinville (une cliente), Marianne Pobbig (une cliente), Brigitte Hernandez (une vendeuse de journaux), Marie-Louise Evora (une soubrette), Fabienne Magnetto (une soubrette)
Orchestre et Chœur de l’Opéra de Marseille, Jacques Lacombe (direction musicale)
Jean-Louis Grinda (mise en scène), Christian Gasc (costumes), Dominique Pichou (décors), Roberto Venturi (lumières)

Marius et Fanny, «opéra-comique » en deux actes de Vladimir Cosma est une adaptation de la « trilogie marseillaise » Marius, Fanny et César de Marcel Pagnol. Déjà adapté pour l’écran par l’auteur lui-même, le théâtre de Pagnol fait aujourd’hui ses débuts à l’opéra, à deux pas du Vieux Port (où se déroule l’action), dans la vénérable maison marseillaise. Cosma, Roumain d’origine - à ne pas confondre avec le Joseph Kosma des Feuilles mortes - est davantage connu pour ses musiques de films. Il n’en est pourtant pas à ses débuts dans la musique « classique ». Compositeur chevronné, polyvalent, récompensé de toutes parts, il parvient ici à rendre ce qui fait l’essence même de Pagnol : une authentique alliance de l’intensité dramatique et de la légèreté. Même si Pagnol n’est pas à la Provence, ce que Flaubert et Maupassant sont à la Normandie, on ne peut nier que son univers ensoleillé, où les larmes ne sont jamais très éloignées du rire, respire une sincérité qui va bien au-delà de la carte postale marseillaise dans laquelle on s’est trop souvent plu à le cantonner. Cosma parvient à trouver sa propre vitesse, sa propre lecture du théâtre de Pagnol. Sa réussite, c’est d’être allé au-delà de la couleur locale. Mal compris, Marius et Fanny aurait bien pu (mal) tourner en opera buffa. Sur le plan de la structure, Cosma succombe à la tentation des « airs », désormais absents des compositions lyriques contemporaines, mais jamais il n’abuse du coloris «Provençal » ou du dépaysement pittoresque ; et jamais il ne tombe dans un pathétique facile. La partition, qui s’inspire parfois du style musical des années trente, des rythmes de valses, de ragtimes, ou de tarentelles brisées, garde toujours un ton clair et aisé, et un lyrisme d’excellente facture.
Les librettistes, Michel Lengliney, Jean-Pierre Lang, Michel Rivgauche, Antoine Chalamel, Michel Arbatz, et Cosma lui-même, restent le plus fidèles possible au texte original, et l’on s’en félicite, tant il est savoureux. La mise en scène de Jean-Louis Grinda, qui fait ses débuts à Marseille, résout avec clarté et élégance les problèmes posés par le déroulement de l’action : distorsion du temps de parole imposée par la mise en musique, et multiplication des lieux. Mais aussi par la gestion intelligente d’un personnage nouveau, le chœur, représentant le peuple de Marseille, qui fait plus que commenter l’action, qui y participe. Grâce aussi aux magnifiques décors de Dominique Pichou et aux costumes de Christian Gasc, l’époque est évoquée sans être reconstituée à l’identique. Ce sont sans doute là les clés de cette réussite visuelle.
Pour interpréter les rôles de Marius et Fanny, on a fait appel à deux superstars qui font leurs débuts à Marseille : le Français Roberto Alagna et la Roumaine Angela Gheorghiu, couple à la scène et à la ville. Adulés partout, Marseille a fait un triomphe à leur incarnation des rôles titres. Tous deux ont su restituer cette étroite imbrication du rire et de l’émotion avec l’immense talent, et les voix de rêves qu’on leur connaît. Le Toulousain Jean-Philippe Lafont, que les Marseillais connaissent bien, est lui aussi une superstar que s’arrachent les plus grandes scènes du monde. Autant il n’était pas trop difficile de passer après la Fanny d’Orane Demazis ou le Marius de Pierre Fresnay, autant il était risqué de s’attaquer au rôle de César après le renversant Raimu. Lafont signe un César tout en finesse, mais aussi en rondeur joviale, sans forcer le trait, en comédien hors pair qu'il est. La voix est toujours aussi surprenante de puissance et de musicalité, et l’articulation irréprochable. Marc Barrard est un Panisse de très grande classe. Sa voix et son talent de comédien jouent avec un grand bonheur sur toutes les facettes de ce beau rôle : il est émouvant, digne, et attachant. Isabelle Vernet rend elle aussi justice, sans une once de vulgarité, au rôle d’Honorine. Bruno Comparetti (M. Brun) et Antoine Garcin (Piquoiseau) sont à la hauteur de leur tâche.
L’orchestre de l’opéra a semblé prendre un très grand plaisir à jouer cette partition sous l’éminente baguette de Jacques Lacombe.

On ne peut spéculer sur l’avenir de Marius et Fanny qu’avec beaucoup de prudence. L’œuvre sera-t-elle reprise ? Créée ailleurs ? Passera-t-elle l’épreuve du temps ? Si l’on en juge par le triomphal succès de ce soir et le bonheur incontestable qu’il a apporté au public, pas seulement marseillais, l’ouvrage pourrait bien avoir un futur. Pour ce qui est de son avenir immédiat, notons qu’il sera diffusé le 3 novembre sur France Musique et qu’un DVD est en préparation.
Soirée de grande qualité qui ne pouvait se terminer que par la dégustation d’un picon-citron-curaçao sur le Vieux Port, bien meilleur, et tellement plus chic qu’un whisky coca.





Christian Dalzon

 

 

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