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L’Amérique et Bach à Bagatelle Paris Orangerie de Bagatelle 07/26/2007 - et 29 juillet 2007 Antonin Dvorak : Quatuor n° 12 «Américain», opus 96, B. 179
Bernard Herrmann : Quintette avec clarinette «Souvenirs de voyage»
Johann Sebastian Bach : Variations Goldberg, BWV 988 (arrangement Marcel Bitsch)
Octuor de France: Jean-Louis Sajot (clarinette), Jacques Thareau (basson), Antoine Degrémont (cor), Yuriko Naganuma, Jean-Christophe Grall (violon), Laurent Jouanneau (alto), Paul Broutin (violoncelle), Michel Fouquet (contrebasse)
Deux temps bien distincts pour ce deuxième programme estival de l’Octuor de France en résidence à l’Orangerie de Bagatelle: une première partie «américaine», une seconde partie consacrée à l’un de ces innombrables arrangements que Bach et son oeuvre ne cessent de susciter.
Dans le Douzième quatuor «Américain» (1893) de Dvorak, une approche très posée, à laquelle invitent d’ailleurs les indications de tempo (ma non troppo) des mouvements extrêmes, fait prévaloir la sérénité plus que la fraîcheur. Si le Molto vivace (Scherzo) manque un peu d’élan, l’impression d’ensemble demeure favorable, car les musiciens ne laissent jamais passer une occasion de chanter avec générosité, en particulier bien sûr dans le Lento.
Après un Tchèque en Amérique, un Américain en Europe: chacun des trois mouvements du quintette avec clarinette Souvenirs de voyage (1967) de Bernard Herrmann fait en effet référence à un paysage du vieux continent. Le compositeur d’Orson Welles et Alfred Hitchcock évoque d’abord Wenlock Edge, un escarpement pittoresque situé dans le Shropshire, qui avait déjà inspiré à Vaughan Williams un cycle de mélodies, puis les îles d’Aran: moins innovant par le langage et par la forme que dans le Quatuor «Echoes», le propos se caractérise par sa fascinante facilité mélodique, d’un lyrisme nostalgique qui se déploie dans une atmosphère «impressionniste», en demi-teintes. Faisant quant à lui référence aux aquarelles vénitiennes de Turner, le troisième mouvement se révèle à la fois plus orchestral et plus lumineux.
Une belle découverte, typique du souci de renouvellement du répertoire qui anime l’Octuor de France et son directeur musical, le clarinettiste Jean-Louis Sajot, toujours à la recherche de partitions rares, quand bien même il est parfois simplement difficile de se les procurer. Une autre manière de satisfaire à ce désir d’originalité, c’est de passer des commandes: Marcel Bitsch a ainsi non seulement adapté Ondine de Ravel (voir ici) mais aussi de larges extraits des Variations Goldberg (1742) de Bach: une instrumentation destinée à un octuor en «formation Schubert» (clarinette, basson, cor et quintette à cordes) et qui, parmi les trente variations, en conserve vingt, notamment les canons, pour une durée d’un peu moins de quarante minutes, compte tenu de ce que les reprises ne sont pas systématiquement respectées.
Même s’il utilise assez rarement le potentiel dynamique du «tutti» et favorise, afin d’enrichir la couleur, les passages d’un pupitre à l’autre ainsi que les dialogues entre groupes d’instruments, l’arrangement ne se place pas dans la lignée de Webern, mais offre plutôt une succession un peu hybride de vignettes de caractère et même de style différents: climat romantique de l’Aria, dont l’ornementation sied particulièrement à la souplesse de la clarinette, parfum stravinskien de certaines variations (Quatrième, Septième (Tempo de gigue) ou Vingt-septième (Canon à la neuvième), … La musique de Bach confirme cependant sa capacité à sonner et à émouvoir dans les combinaisons les plus improbables, comme dans la Treizième variation, où le chant du violon est simplement soutenu par le basson et le cor.
L’Octuor de France n’a donc pas de mal à rendre justice à cette adaptation et, mieux encore, à l’intemporalité de Bach, comme dans la fameuse «perle noire», la miraculeuse Vingt-cinquième variation (Adagio). C’est toutefois le plaisant Quodlibet, Trentième et ultime variation, qui est repris en bis.
Le site du Bernard Herrmann estate
Le site de la Bernard Herrmann society
Simon Corley
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