About us / Contact

The Classical Music Network

Fontainebleau

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

De l’utilité de la contrainte

Fontainebleau
Nemours (Grenier de l’Hôtel de ville)
05/11/2007 -  
Joseph Haydn : Quatuor n° 68, opus 64 n° 2
Witold Lutoslawski : Quatuor
Arnold Schönberg : Quatuor n° 3, opus 30

Quatuor Gémeaux: Anne Schoenholtz, Manuel Oswald (violon), Sylvia Zucker (alto), Uli Witteler (violoncelle)


2007 marque les vingt ans de ProQuartet – déjà! Toujours sous la houlette de Georges Zeisel, l’association poursuit l’installation de son Centre européen de musique de chambre (CEMC) au Château de Fontainebleau et propose du 11 mai au 16 juin ses huitièmes «Rencontres musicales». Y alterneront comme de coutume huit concerts (au Château ou au Théâtre municipal) – dont trois dans le cadre de «journées spéciales» consacrées, le samedi, à des compositeurs contemporains (Eric Tanguy, Sophie Lacaze et Franck Krawczyk), mais aussi une «Nuit du quatuor» et une «Soirée tango» – et douze «promenades musicales en Seine-et-Marne» dont le principe est également inchangé, permettant au public de découvrir de jeunes ensembles en même temps que le patrimoine du sud du département.


C’est ainsi le grenier de l’Hôtel de ville de Nemours, un ancien couvent du XVIIe, qui accueillait, dans d’excellentes conditions acoustiques, le Quatuor Gémeaux. Bien qu’aux trois quarts d’origine allemande, la formation, constituée en 2003 par des musiciens aujourd’hui âgés de vingt-six à vingt-neuf ans, a choisi un nom français et se présente sous la bannière suisse. Avec le Soixante-huitième quatuor, deuxième de l’opus 64 (1790), de Haydn, le démarrage se révèle difficile: non seulement, le premier violon, acide et fragile, paraît souvent à la peine, mais il faut attendre le Menuetto pour sortir d’une approche prudente et convenue, tandis que le Presto final, un peu lent, ne rend pas justice à l’inventivité et à l’esprit de Haydn.


Dans le cadre du CEMC, le Quatuor Gémeaux bénéficie désormais de l’enseignement de Rainer Schmidt, second violon du Quatuor Hagen, mais il y a précédemment étudié avec Walter Levin, premier violon du Quatuor LaSalle, qui créa notamment le Quatuor (1964) de Lutoslawski. Avec autant d’humour que de pédagogie, le second violon Manuel Oswald montre au public, exemples à l’appui, comment le recours aux techniques aléatoires, bien loin de constituer une facilité, introduit en réalité un élément de contrainte, tant pour le compositeur, qui s’attache à assurer une cohérence globale malgré la liberté accordée aux quatre parties, que pour les interprètes, déstabilisés par rapport à leur souci habituel de jouer ensemble, alors qu’il leur est demandé ici d’improviser de façon autonome. Chacun des deux mouvements est structuré en brèves sections offrant des atmosphères très contrastées, mais sans pour autant recourir à des modes de jeu atypiques et iconoclastes, tels que Penderecki les pratiquait à la même époque. De ce fait, sans doute, l’œuvre, défendue avec brio par le Quatuor Gémeaux, apparaît moins datée et a mieux vieilli, révélant au fil de ses vingt-quatre minutes de belles ressources aussi bien expressives que virtuoses.


En seconde partie, la marque de Levin est également perceptible dans le choix du Troisième quatuor (1927) de Schönberg. Il faut un certain courage pour affronter cette partition réputée pour son «aridité», qui serait la marque des premières expériences dodécaphoniques, mais le Quatuor Gémeaux, faisant preuve d’une rare maturité, s’accommode à nouveau à la perfection de cette autre forme que prend ici la dialectique entre contrainte et liberté: classicisme des structures (forme sonate, variations, scherzo), romantisme du langage, c’est l’enracinement dans la tradition que les jeunes musiciens mettent particulièrement en valeur. Si elle place ainsi opportunément Schönberg dans la descendance de Brahms, pour lequel il a toujours exprimé son admiration, cette approche plus engagée que cérébrale, assez éloignée de celle des LaSalle en leur temps, débusquant le jeu, la danse ou la véhémence derrière les rigueurs de l’écriture, suggère en même temps des affinités avec les meilleures contributions de ses contemporains au genre du quatuor (Bartok, Zemlinsky).


Le site de ProQuartet



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com