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Autour de Bartok

Paris
Palais Garnier
02/11/2007 -  
Bohuslav Martinu : Sept Arabesques, H. 201 (arrangement Jindrich Feld)
Edison Denisov : Ode (* #)
Béla Bartok : Sonate pour deux pianos et percussion, sz. 110
Dimitri Chostakovitch : Aphorismes, opus 13 (arrangement Vladimir Spivakov) (#)
Alfred Schnittke : Sérénade (*)

Jérôme Julien-Laferrière (clarinette), Ludovic Tissus (basson), Marie-Laure Goudenhooft (violon), Axel Salles (contrebasse), Jean-Yves Sébillotte, Elena Rassadnika-Bonnay (*) (piano), Philippe Poncet, Christophe Vella (#) (percussion)


Comme l’une de ces constructions en arche auxquelles Bartok a si souvent recouru, ce programme très original proposé par les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra national de Paris dans le cadre des «Dimanches musicaux au Palais Garnier» était centré autour de sa Sonate pour deux pianos et percussion (1937). Elena Rassadnika-Bonnay et Jean-Yves Sébillotte en donnent une lecture très convaincante, nerveuse, âpre et dramatique, dans laquelle la tension ne retombe jamais. Il est cependant dommage que, peut-être en raison de l’absence de couvercle sur les pianos, ceux-ci, et plus particulièrement le second, aient parfois été couverts par les timbales de Philippe Poncet.


Ce jalon essentiel dans l’émancipation de la percussion au siècle passé était entouré d’œuvres moins développées mais mettant également en valeur cette famille d’instruments: de façon impeccablement symétrique, deux arrangements de recueils de pièces brèves datant de l’entre-deux-guerres étaient ainsi chacun suivis de deux partitions composées en 1968.


Les Sept Arabesques (1931) de Martinu ont été écrites pour violoncelle (ou violon) et piano: Jindrich Feld les a arrangées en 1987 pour clarinette, piano et percussion, un effectif que leur sous-titre («Etudes rythmiques») semblait appeler. Certains timbres (vibraphone, glockenspiel, tom-toms) s’allient toutefois assez mal avec le piano et, sans que l’interprétation soit en cause, le tout évoque davantage une objectivité un peu raide à la Stravinski que la souplesse et l’humour de la version originale. Sans avoir besoin de recourir à un arrangement, on aurait pourtant pu trouver dans le catalogue de Martinu son délicieux Quatuor pour clarinette, cor, violoncelle et petit tambour.


Destinée à la même formation, l’Ode (1968) de Denisov propose une progression lyrique et dramatique, jusqu’au paroxysme, menée par la clarinette de Jérôme Julien-Laferrière, colorée par les irisations du piano et ponctuée par les interventions de la percussion. Il n’y avait donc pas lieu de convoquer l’épouvantail de Darmstadt sous les ors de Garnier, comme le fit Hélène Pierrakos dans une présentation liminaire par ailleurs tout à fait intéressante.


Si la connaissance de Chostakovitch a beaucoup progressé au cours des dernières années, son corpus pianistique demeure, pour l’essentiel, à découvrir. Vladimir Spivakov a arrangé les dix Aphorismes (1927) pour violon, basson, piano et percussion, un ensemble qui convient bien à l’esprit caustique et agressif de cette musique, mais aussi à la Berceuse finale, en forme d’aria baroque, où la violoniste Marie-Laure Goudenhooft apporte une émotion bienvenue après une succession de neuf courtes pages iconoclastes.


Dans une veine encore plus provocatrice, la Sérénade (1968) pour clarinette, violon, contrebasse, piano et percussion de Schnittke enchaîne trois mouvements pleins de surprises et de dérision: le premier, entièrement aléatoire, même si l’on soupçonne à plusieurs reprises les musiciens de s’être préalablement concertés, se déroule dans un joyeux capharnaüm; dans le Lento central, Christophe Vella fait glisser ses baguettes sur les cordes du piano, tandis que dans l’Allegretto conclusif, il exécute aux cloches tubulaires une sorte de cadence exaspérée. Une bien étrange «sérénade», par conséquent, pour conclure cette soirée.



Simon Corley

 

 

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