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D’autres mondes Paris Maison de Radio France 10/21/2006 - Béla Bartok : Danses de Transylvanie, sz. 96 – Le Mandarin merveilleux (Suite), sz. 73
Eric Tanguy : Concerto pour violoncelle n° 2
Edith Canat de Chizy : Omen (création)
Anne Gastinel (violoncelle)
Orchestre national de France, Alain Altinoglu (direction)
En présence de Philippe Hersant, Bruno Ducol et Bechara El-Khoury, bien entendu également d’Edith Canat de Chizy et Eric Tanguy, mais aussi de l’acteur Michel Blanc et, surtout, d’un très nombreux public qui avait entièrement rempli l’Auditorium Olivier Messiaen, la dernière manifestation du festival «Paris de la musique» s’inscrivait en même temps dans le cadre du traditionnel week-end «Portes ouvertes» que Radio France organise tous les mois. Ce sont cette fois-ci sept concerts gratuits consacrés, sous l’intitulé «D’autres mondes», aux musiciens de toutes origines «qui ont toujours su donner vie à de nombreux mondes, réels ou inventés, qui nourrissent notre imaginaire»: un thème qui, au moment même où la Cité de la musique conclut quant à elle son cycle «La narration du voyage», paraît suffisamment souple pour autoriser une grande liberté de programmation.
Comme de coutume, elle fournit en tout cas l’occasion de faire des découvertes et la soirée confiée à l’Orchestre national de France dirigé par Alain Altinoglu débutait ainsi par les rares et brèves Danses de Transylvanie (1931) de Bartok: dans cet arrangement de sa Sonatine pour piano de 1915, le compositeur hongrois, au plus proche de son inspiration folklorique, s’en tient à un robuste premier degré, dans l’esprit des œuvres de son ami Kodaly.
La reprise du Deuxième concerto pour violoncelle (2000) d’Eric Tanguy s’imposait-elle? La partition est certes entourée de l’aura que lui confèrent sa création par Msistlav Rostropovitch et une heureuse carrière sous l’archet d’Anne Gastinel, impeccable de finesse et de tenue, tandis qu’Eric Tanguy bénéficie, parmi les créateurs de notre temps, d’une médiatisation assez inhabituelle. Mais si le recours à des moyens d’écriture traditionnels n’est évidemment pas condamnable en soi, on n’en regrettera pas moins, à la différence d’une partie du public et des musiciens, d’être resté totalement extérieur à la signification et à la finalité de ces vingt-sept minutes à l’orchestration terne et au propos convenu, où les incantations du soliste, les interventions des timbales et les rugissements des cuivres incarneraient respectivement le bon, la brute et le truand.
Chemins qui ne mènent nulle part: l’expression pourrait à merveille qualifier ce nouvel académisme, mais elle est en fait le début d’un poème français de Rilke, lequel, conjointement à l’une des dernières toiles de van Gogh, a inspiré Edith Canat de Chizy pour Omen, une commande de Musique nouvelle en liberté qui était donnée ici en création. Plus aventureuse que celle de Tanguy et porteuse d’un tout autre souci de recherche en termes tant de sonorités que de langage, cette pièce d’un seul tenant s’inscrit toutefois dans une longue tradition française par son instrumentation, particulièrement subtile, riche et travaillée, notamment pour les bois: si le «présage» évoqué par le titre – celui du suicide du peintre – trouve son écho dans la menace latente que font peser ces dix-sept minutes, on a cependant parfois l’impression que d’un effet à l’autre, c’est un véritable traité d’orchestration qui se déroule devant les oreilles de l’auditeur.
La virtuosité de l’Orchestre national, et à nouveau de son pupitre de clarinettes emmené par Patrick Messina, trouve une autre illustration dans la Suite du Mandarin merveilleux (1919) de Bartok, d’autant qu’Alain Altinoglu enlève l’ensemble de façon intense et cinglante, tout en ne perdant jamais de vue que la partition est originellement destinée au ballet.
Le site non officiel d’Anne Gastinel
Le site d’Edith Canat de Chizy
Simon Corley
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