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La locomotive du temps

Zurich
Opernhaus
06/17/2006 -  et les 20, 22, 25, 28* et 30 juin 2006

Leos Janacek: Vec Makropulos (L’Affaire Makropoulos)


Gabriele Schnaut (Emilia Marty), Martina Janková (Krista), Claude Eichenberger (une femme de ménage), Christine Zoller (une femme de chambre), Peter Straka (Albert Gregor), Rolf Haunstein (Dr. Kolenaty), Alfred Muff (Baron Jaroslav Prus), Volker Vogel (Vitek), Boguslaw Bidzinski (Janek), Boiko Zvetanov (Hauk-Schendorf), Stephan Bootz (un machiniste)


Chœur de l’Opernhaus de Zurich (préparation: Jürg Hämmerli), Orchestre de l’Opernhaus, direction musicale: Philippe Jordan. Mise en scène: Klaus Michael Grüber, assisté de Ellen Hammer. Décors: Titina Maselli et Barbara Bessi, costumes: Moidele Bickel, lumières: Jürgen Hoffmann


L’Affaire Makropoulos fait son entrée au répertoire de l’Opernhaus de Zurich, dans une production qui comptera au nombre des réussites de la saison 2005-2006. L’opéra de Janacek, basé sur une comédie de Karel Capek, a été créé en 1926 à Brno. Il raconte l’histoire d’une chanteuse d’opéra, Emilia Marty, qui vit depuis... 337 ans grâce à un élixir que son père, médecin de la cour, lui a administré lorsqu’elle était enfant. De retour à Prague, à la recherche de la recette du mystérieux breuvage qu’elle a fait goûter autrefois à un amant et qu’elle doit maintenant ingurgiter à nouveau pour renouveler son immortalité, elle se trouve mêlée à une dispute successorale l'opposant aux descendants de son ancien amoureux. De guerre lasse, elle finit par remettre la main sur le précieux document mais, se rendant finalement compte de la signification de la mort, elle décide de quitter la vie.


Le spectacle a pour cadre unique une gare désaffectée, au milieu de laquelle est figée une locomotive, métaphore du temps qui passe, du long voyage accompli par Emilia. A la fin de l’œuvre, après son bouleversant monologue, cette dernière se jette sous les rails. Le décor a été conçu, juste avant sa mort, par Titina Maselli, l’un des peintres italiens les plus connus de la fin du XXe siècle, et a été réalisé par Barbara Bessi. Fidèle à sa réputation, Klaus Michael Grüber excelle dans l’art de la direction d’acteurs, ciselant les personnages jusque dans les moindres détails. Une impression poignante de réalisme se dégage de son spectacle, le public ayant le sentiment d’être plongé dans un véritable roman policier.


L’opéra repose tout entier sur le rôle d’Emilia, d’où la nécessité de disposer d’une interprète de premier ordre. La direction de l’Opernhaus l’a trouvée en la personne de Gabriele Schnaut, à qui les spectateurs ont réservé une ovation au rideau final. Amplement méritée d’ailleurs, tant la chanteuse campe une diva intense et émouvante, admirable scéniquement lors du dernier acte, quand, sous l’emprise de l’alcool, elle se montre cynique et méprisante envers tous et décide d'en finir avec la vie. En dépit d’un large vibrato et d’aigus parfois stridents, la voix, puissante et métallique, habituée à Wagner et à Strauss, est aussi capable de nuances et de splendides pianissimi. Le reste de la distribution est parfaitement homogène, avec notamment le baron particulièrement sonore d’Alfred Muff, la Krista touchante de Martina Jankova et l’inénarrable personnage du fou campé par Boiko Zvetanov. Mais l’autre grand triomphateur de la soirée aura été Philippe Jordan, qui se distingue pour sa première apparition dans la fosse zurichoise. Après une ouverture magistrale, le jeune chef suisse sait maintenir la tension dramatique jusqu’au terme du spectacle, réussissant à rendre claire et transparente la partition si complexe de Janacek. Dommage seulement qu’il se laisse parfois aller à des fortissimi qui obligent les chanteurs à hurler, un paradoxe dans une œuvre qui se veut une conversation musicale. Ce bémol mis à part, Philippe Jordan confirme les excellentes prestations réalisées récemment à New York, Vienne et Londres. On ne peut que se réjouir de le retrouver la saison prochaine dans le Dr. Faust de Busoni.




Claudio Poloni

 

 

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