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Mozart banalisé

Strasbourg
Palais de la Musique et des Congrès
04/06/2006 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Divertimento K. 136, Concerto pour piano No 25, K. 503
Dimitri Chostakovitch : Symphonie No 6

Kun-Woo Paik (piano), Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Jerzy Semkov (direction)


On attendait beaucoup du 25e Concerto pour piano de Mozart par Kun-Woo Paik, pianiste français d’adoption dont les disques Decca (de fort beaux Concertos de Chopin, un splendide récital Fauré, le début remarqué d’une nouvelle intégrale Beethoven…) se sont révélés fascinants à plus d’un titre. Malheureusement, dans le cadre d’un banal concert d’abonnement donné deux soirs de suite, avec le nombre minimal de répétitions habituel en pareil cas, on déchante vite. Le toucher du pianiste est délié mais trop clair, et la confrontation technique avec l’un des concertos les plus virtuoses de Mozart tourne vite au simple alignement de traits et de trilles. Quant au charme mélodique mozartien, il apparaît comme délavé, par manque de souplesse dans les phrasés mais aussi par un patent déficit d’interaction entre un soliste et un orchestre qui ne semblent pas réussir à s’écouter mutuellement. Pourtant les vents ne déméritent pas (fort joli hautbois de Sébastien Giot) mais ils ne parviennent que rarement au véritable dialogue concertant souhaitable. On en reste à un prudent à-peu-près qui peut même tourner à l’accident de parcours (la coda du Finale, où tout le monde arrive nettement en retard, obligeant le pianiste à patienter sur son trille conclusif beaucoup plus longtemps que prévu…).


Travail de mise au point insuffisant sans doute, mais aussi effectifs, taille de salle et même technique de direction hors de proportion avec un idéal mozartien devenu beaucoup plus intimiste aujourd’hui. Un certain discours critique actuel tend à privilégier dans Mozart une approche davantage nourrie des techniques d’époque, voire ramenée à un XVIIIe siècle reconstitué de A à Z. Attitude à notre avis dangereuse car elle risque à terme de court-circuiter l’orchestre symphonique moderne de racines dont il serait regrettable de le priver. Cela dit, une démonstration d’impuissance relative comme on peut la vivre ici ne fait que donner davantage d’impact à ce genre d’opinion, de même que l’exécution magistrale mais beaucoup trop lourde du Divertimento K. 136, que l’on peut supposer écrit pour un ensemble très réduit, et qui retrouve ici écrasé sous le poids d’un orchestre géant.


Dans la 6e Symphonie de Chostakovitch (la juxtaposition est osée, mais pourquoi pas…) on redécouvre un Orchestre Philharmonique de Strasbourg davantage à l’aise, et qui semble même en net progrès, avec de fort jolies prestations des premiers pupitres et des cordes cohérentes. Jerzy Semkow privilégie une mise en valeur de l’instant que les musiciens suivent bien, avec des climats intéressants, à défaut d’être réellement poignants, dans le très long et désolé Largo initial. En revanche l’architecture semble relâchée et fait apparaître la lente dégradation du climat inhérente à l’œuvre, de la mélancolie la plus énigmatique à la vulgarité la plus immédiate, comme une banale faiblesse de construction. Les flonflons du Presto final, même si l’orchestre et le public s’y amusent beaucoup, semblent déconnectés du reste et laissent l’impression d’une banale musique de divertissement au premier degré.


Une soirée prometteuse, en ce qui concerne l’état de l’orchestre, mais artistiquement inaboutie.




Laurent Barthel

 

 

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