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De la modernité à la jeunesse

Monaco
Auditorium Rainier III
11/06/2005 -  
André Jolivet : Cinq danses rituelles pour orchestre, Concerto n°2 pour violoncelle, quintette à cordes solo et orchestre à cordes
George Bizet : Symphonie en ut majeur

Orchestre Philharmonique de Monte Carlo, Marek Janowski, direction
Alban Gerhardt (violoncelle)


Il fallait une bonne dose de détermination pour programmer deux œuvres d’André Jolivet lors d’un même concert, face à un public peu enclin par nature à l’expérimentation. Mais 2005 est aussi le 100ème anniversaire de la naissance d’André Jolivet, qui fut, un temps, un acteur majeur de la modernité dans la vie musicale française. Ainsi Marek Janowski donnait-il d’abord une pièce reconnue et importante : les Cinq Danses rituelles, et une autre plus récente et fort peu jouée : le 2ème Concerto pour violoncelle.


En 1929, Jolivet fit la connaissance d’Edgar Varèse, fut son élève pendant quatre ans et toujours se référa à lui pour son esthétique musicale. En 1935, avec d’autres jeunes compositeurs dont Olivier Messiaen, il fonde l’association La Spirale, pour défendre la création contemporaine. Cette même année voit la composition de ses premières œuvres de maturité ; très vite un nouveau groupe resté dans les annales, Jeune France, se forme autour de Messiaen, Daniel-Lesur et lui. A cette occasion il se lie avec Milhaud et Honegger, il écrit dans des revues musicales, participe à des colloques, et compose en 1939 son premier chef d’œuvre : les Cinq danses rituelles pour piano (donné en première audition en 1942, puis orchestré et créé par André Cluytens en 1944). Ayant toujours été attiré par le théâtre, il fut nommé directeur musical de la Comédie-Française en 1945. Les années 50-60 lui sont fastes, entre les tournées théâtrales, ses diverses compositions et des conférences dans divers pays d’Europe. Il enseigne également la composition au Conservatoire National Supérieur de Paris. Célèbre, honoré, il s’éteindra en 1974.


La musique d’André Jolivet est le reflet de son indépendance, il garde à l’esprit l’enseignement de Edgar Varèse, mais s’intéresse au dodécaphonisme, aux musiques qu’on appelle aujourd’hui « du monde » ; il s’insère dans des formes classiques (concertos, sonates, symphonies…) mais son langage, à la fois cérébral et intuitif, est résolument marqué par le sceau du XXème siècle. Il écrit en 1937 : « rendre la musique à la vie,… le problème n’est pas d’ordre esthétique mais éthique,… il ne s’agit pas de voir ou de comprendre mais de sentir,… l’art est un processus magique ».


Difficile d’écouter les Cinq danses rituelles sans penser à cet incontournable modèle du genre : Le Sacre du Printemps. De manière identique une partie porte sur l’initiation, une sur le rapt, etc… Mais là où Stravinsky déchaîne des forces telluriques, Jolivet déploie en alternance mélopées orientales et magmas sonores ; le Sacre privilégie le rythme, Jolivet insiste sur la richesse des sonorités. L’œuvre commencée par des volutes raffinées se termine par un crescendo absolument impressionnant.
Le 2ème Concerto fut commandé par Rostropovitch et créé par lui à Moscou avec l’Orchestre d’Etat de l’URSS sous la direction du compositeur, en 1967. De facture sérielle, il s’en dégage néanmoins une puissante générosité privilégiant les recherches de sons et de timbres. Par ailleurs les dialogues entre, d’une part le soliste et le quintette (les cinq chefs de pupitres) et d’autre part le soliste et l’orchestre à cordes, sont si prégnants qu’on en oublie la notion de durée. Cette œuvre fut déjà jouée par les mêmes interprètes, en mars dernier, à Paris et Düsseldorf. Sa complexité était ainsi maîtrisée et le public admira, médusé, la diabolique virtuosité d’Alban Gerhardt, le jeune violoncelliste, nullement intimidé par l’ombre de son illustre prédécesseur et créateur du Concerto. Stendhal trouvait que : « dans un orchestre parfait, les violons seraient français, les instruments à vent allemands, et le reste italien ». L’excellence de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo pourrait lui donner raison, bien que d’une manière générale la Vox Populi musicale d’aujourd’hui pense exactement le contraire.


Il faut savoir conclure, après la riche mais ardue première partie, le choix s’était porté sur son exact opposé : une symphonie toute simple, légère, classique. C’est un Bizet de 17 ans qui la composa, un petit prodige qui possédait déjà toutes les ficelles du métier de Beethoven et de Mendelssohn. On sort de cette délicieuse pièce avec quelques années en moins….


Petite remarque finale, Marek Janowski a donné brutalement sa démission de la Direction artistique et musicale de l’OPMC il y a un mois, à la suite d’un différend avec le Conseil d’Administration de l’Orchestre. D’où quelques signes d’énervement ou de distanciation. Souhaitons que le Maestro, qui doit encore diriger plusieurs concerts dans la Principauté, puisse y trouver une atmosphère rassérénée, plus propice à un travail en commun.





Alain Dornic

 

 

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