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Charpentier enterre la saison du Capitole Toulouse Théâtre du Capitole 05/19/2000 - et 23, 27, 31 mai 2000 Gustave Charpentier : Louise Jalin Zhang (Louise); Martine Dupuy (laMère); Marcus Haddock (Julien); Alain Vernhes (le Père)
Orchestre et choeurs du Capitole, MichelPlasson (direction)
Nicolas Joel (mise en scène)
On peut comprendre qu'une grande scène française telle le théâtre du Capitole ait à coeur d'explorer et de défendre le patrimoine musical national, mais il faut bien constater que ce souci, fort louable, ne nous vaut pas que d'éblouissantes résurrections. Ainsi, après nous avoir farci d'un Hamlet indigeste, le Capitole nous lâche une Louise sans excuses, reprise du spectacle qui avait inauguré le Capitole rénové en 1996.Que peut-on dire d'une telle "oeuvre", sinon qu'elle dégage un insondable ennui, partagé entre la vacuité des idées musicales et harmoniques et l'accablante nullité d'un livret ampoulé que L. Laloy définissait en 1905 comme "crasseux et vaguement métaphysique" ? Les prétentions de Charpentier au "naturalisme" sont atterrantes si on les compare aux coups de génie de ses contemporains Richard Strauss ou Puccini, la Bohème de ce dernier, sur un livret proche, écrasant définitivement cette musiquette. On voit mal quel peut être l'intérêt d'aller déterrer de telles inepties alors que tant d'oeuvres françaises restent à (re)découvrir, de Le Sueur à Massenet, en passant par Cherubini ou Meyerbeer, opéras que l'on ne connaît le plus souvent que grâce à l'initiative de théâtres ou d'artistes étrangers (voir a recréation de Lodoïska par Muti, par exemple). De plus, Nicolas Joël n'a pas su trouver ici une mise en scène qui sauve la faiblesse de l'intérêt dramatique, comme il avait su le faire pour Hamlet, et, si l'on peut admirer quelques beaux effets de lointains, le traitement réaliste des décors et situations n'est pas pour rien dans le ridicule de certains moments.
L'unique intérêt de ces représentations aurait pu être d'entendre la soprano américaine Renée Fleming en Louise. Hélas, la diva, après avoir imposé au théâtre des conditions assez inhabituelles, a finalement renoncé à paraître, pour cause, nous est-il dit, de dépression. C'est donc sa doublure, la soprano asiatique Jalin Zhang qui a repris le rôle. Annoncée comme une révélation, Jalin Zhang, chanteuse honnête à la voix plaisante mais au vibrato déjà prononcé et à la présence scénique incertaine, ne saurait faire oublier Kathleen Cassello, précédente titulaire du rôle. Marcus Haddock, véritable ectoplasme, joue comme un moule à gaufre et chante banalement un rôle banal. Passablement huée, la Mère de Martine Dupuy semble avoir oublié ce que chanter veut dire. Alain Vernhes, qui tenait déjà le rôle du Père en 1996 paraît bien fatigué par rapport à ce qu'il nous avait offert en Scarpia. Le reste peut parfaitement se passer des commentaires du critique désabusé. Mollement mené par Michel Plasson l'Orchestre du Capitole sombre dans la triste grisaille de cette morne soirée. Il n'est pas le seul, certains spectateurs, liquéfiés d'ennui, ayant préféré abandonner le navire avant le naufrage final. Il faut dire que le spectacle, avec deux entractes, est vraiment fort long - près de quatre heures qui semblent durer une éternité. Triste fin pour une saison qui a pourtant connu de beaux moments cette année !
En marge des représentations de Louise, où elle tient le petit rôle d'Irma, la soprano japonaise Rie Hamada a offert lejeudi 25 mai 2000 un récital de mélodies et airs d'opéras au très intéressant programme mêlant Händel, Mahler, Canteloube, Dvorak et Puccini. Par rapport à son précédent récital dans le même cadre des "Midis du Capitole", Rie Hamada semble avoir cherché assombrir et élargir une voix originellement plus légère. Même si la qualité du chant est indéniable, le résultat n'est pas pleinement convaincant, la liaison des registres se faisant mal entre un grave absent, un medium large et un aigu qui retrouve son timbre clair et mince original. De plus, la volonté de la chanteuse de détailler par force gestes et mimiques le contenu de chaque mélodie, pour touchant qu'il soit, est passablement ridicule lorsqu'elle accompagne "Ablösung in Sommer" de geste de poupée en porcelaine. Rappelons que Mahler voyait dans ces lieder des "contes pour enfant racontés aux adultes". A trop rester dans le premier degré dans ce répertoire difficile, Rie Hamada a plongé dans l'insignifiance.
Laurent Marty
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