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La musique s’expose au Musée d’Orsay Paris Musée d'Orsay 09/27/2005 - Piotr Ilytich Tchaïkovski : Quatuor n° 1, opus 11
Alexandre Borodine : Quatuor n° 2 (extrait)
Serge Rachmaninov : Quatuor n° 2
Quatuor Elysée: Christophe Giovaninetti, Marc Vieillefon (violon), Jean-Paul Minali-Bella (alto), Igor Kiritchenko (violoncelle)
L’auditorium du Musée d’Orsay propose à nouveau une superbe saison musicale, organisée autour de plusieurs cycles thématiques («Musique russe», «Vienne fin de siècle», «Wagner, Liszt et la France», «Robert et Clara Schumann», «Musique en famille»), naturellement liés, pour la plupart, aux expositions présentées par ailleurs dans ce fief du XIXe siècle, et complétée par des conférences, des «cafés littéraires» ainsi que la projection de films. En semaine à 12 heures 30 (créneau généralement réservé aux jeunes talents) ou à 20 heures, mais aussi le dimanche à 15 heures, on pourra ainsi entendre une belle succession de musiciens (Marc Coppey, Shlomo Mintz, Jean-Frédéric Neuburger, Christiane Oelze, …) et d’ensembles (Sextuor de la Philharmonie de Berlin, Ensemble Intercontemporain, solistes de l’Orchestre de Paris), tandis que la reconstitution des spectacles du théâtre d’ombres du «Chat noir» sera poursuivie.
En parallèle à l’exposition «L’art russe dans la seconde moitié du XIXe siècle: en quête d’identité» présentée jusqu’au 8 janvier, la rentrée se faisait avec le début du copieux cycle de musique russe (seize concerts d’ici le 12 janvier): une heure de musique confiée au Quatuor Elysée et parfaitement à l’image d’une programmation marquée par un réel souci de renouvellement du répertoire. La formation franco-russe, constituée en 1995 autour de musiciens issus des Quatuors Ysaÿe (premier violon) et Anton (alto et violoncelle), était affectée par l’indisposition de son altiste, Dimitri Khlebtsevitch, remplacé par Jean-Paul Minali-Bella (qui fut membre, en son temps, du Quatuor Arpeggione).
Ainsi que le remarque fort justement André Lischke, qui donnera une conférence sur le sujet le 1er octobre, le courant national ne s’est pas principalement exprimé, en Russie, au travers de la musique de chambre, même si «la qualité remplace la quantité», ainsi que le démontre d’emblée le Premier quatuor (1871) de Tchaïkovski. Malgré une sonorité plus acide que ronde et une cohésion parfois incertaine, due notamment à un premier violon dont les choix interprétatifs ont tendance à faire cavalier seul, le Quatuor Elysée s’impose par sa sensibilité et son naturel, mais aussi par son mordant et sa solidité, rendant justice à la fois à l’élan et au charme de la partition. Tout aussi fameux, le Second quatuor (1882) de Borodine l’est en particulier pour son troisième mouvement, marqué Nocturne, dominé ici par le violoncelle à la fois sobre, fin et précis d’Igor Kiritchenko.
Hormis une Sonate que les violoncellistes continuent de jouer avec bonheur, Rachmaninov s’est peu intéressé à la musique de chambre. Dans les recoins de son catalogue, on trouve toutefois, outre un quintette à cordes présenté comme perdu, deux quatuors inachevés datant respectivement de 1889 et 1896, tous deux en sol mineur – comme celui de Debussy, exactement contemporain – et comprenant chacun deux mouvements. Composé après la Première symphonie, le Second quatuor mérite d’être découvert. Il s’ouvre par un Allegro moderato, qui demeure dans le même univers expressif que Tchaïkovski ou Borodine, obéissant à la forme sonate traditionnelle et évoluant vers le ton majeur. Le second mouvement, en revanche, se rapproche davantage du climat des deux Trios élégiaques, écrits quelques années plus tôt, tout en annonçant L’Ile des morts, ample et spectaculaire déploration qui frappe par une progression lancinante sous forme de passacaille confiée au violoncelle bientôt rejoint par l’alto.
Le site de l’auditorium du Musée d’Orsay
Le site du Quatuor Elysée
Simon Corley
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