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Une Carmen sans foklore espagnol

Lausanne
Opéra
06/10/2005 -  et les 12, 13*, 15, 17 et 19 juin 2005
Georges Bizet: Carmen


Isabelle Cals (Carmen), Nikolaï Schukoff (Don José), Evgueniy Alexiev (Escamillo), Ainhoa Garmendia (Micaëla), Christine Rigaud (Frasquita), Elodie Méchain (Mercedes), Ivan Ludlow (Le Dancaïre), Emiliano Gonzalez Toro (Le Remendado), André Morsch (Morales), Jean-Marc Salzmann (Zuniga), Jean-René Clair (Lilas Pastia)


Maîtrise du Conservatoire de Lausanne (Yves Bugnon, direction), Chœur de l’Opéra de Lausanne (Christophe Talmont, chef de chœur), Orchestre de Chambre de Lausanne (Nicolas Chalvin, direction musicale), mise en scène de Patrice Caurier et Moshe Leiser, reprise par Jean-Michel Criqui


Production du Welsh National Opera


En mettant à l’affiche Carmen, l’un des ouvrages lyriques les plus représentés du répertoire, le directeur de l’Opéra de Lausanne, François-Xavier Hauville, a voulu frapper un grand coup pour terminer son mandat. Le résultat est un spectacle inégal, qui a cependant été ovationné par le public, confirmant la popularité du chef-d’œuvre de Bizet.


Patrice Caurier et Moshe Leiser sont des habitués des planches lausannoises. Si leur Carmen n’est pas aussi aboutie que certaines de leurs productions récentes vues ici – par exemple Le Nez ou La Traviata –, elle n’en demeure pas moins profondément originale et résolument moderne dans sa tentative de faire table rase de tout le folklore de pacotille qui encombre bien souvent les mises en scène traditionnelles de l’oeuvre. Quelques chaises, des tables, un puits et des paniers d’oranges, voilà à peu près les seuls accessoires présents sur un plateau nu, délimité par trois grandes parois. Nous sommes donc à des années-lumières de la farandole de clichés servant habituellement à illustrer l’Espagne. L’attention peut se porter exclusivement sur les personnages et sur les relations qui se nouent entre eux. L’intrigue évolue dans une atmosphère souvent violente, mais des plus réalistes, qui fait d’ailleurs la force du spectacle. Quelques scènes sont particulièrement réussies parce que poignantes de vérité, notamment les soldats harcelant Micaëla ou l’affrontement des deux clans de cigarières au premier acte, le duel entre Don José et Escamillo au 3e acte ou le début du dernier acte, lorsque la foule commente le cortège se rendant aux arènes. Comme toujours avec le tandem Caurier/Leiser, le spectacle est basé sur une solide réflexion, un travail minutieux et une direction d’acteurs subtile, mais cette fois il n’est pas totalement convaincant.

Car, pour être couronnée de succès, une telle mise en scène, qui va droit à l’essentiel sans l’aide d’accessoires ni de décors, doit pouvoir s’appuyer sur des interprètes charismatiques. Or ce sont précisément les passages où les solistes principaux se retrouvent seuls sur scène qui sont les moins réussis. Même s’ils ont tous pratiquement l’âge de leur personnage, les chanteurs de cette production ne sont pas des "bêtes" de spectacle. Qui plus est, Isabelle Cals, l’interprète du rôle-titre, endosse des habits manifestement beaucoup trop grands pour elle. Malgré une belle prestance, une diction irréprochable et un timbre agréable, sa Carmen est bien trop lisse et manque cruellement de rayonnement et de sensualité, comme si, trop occupée à chanter les notes de sa partition, l’artiste n’était pas en mesure de se préoccuper de son personnage. Il est louable, pour un directeur d’opéra, de faire confiance à de jeunes solistes, mais ici l’erreur de distribution est manifeste. Les autres chanteurs ont eux plus de présence, à commencer par Nikolaï Schukoff en Don José, qui aura été la révélation de la soirée. Athlétique, le ténor incarne le brigadier avec beaucoup d’aplomb et de conviction, même si on aurait été plus d’ampleur dans la voix; le timbre a de belles couleurs barytonales et la tessiture est bien maîtrisée, à l’exception d’un extrême aigu terriblement serré. Bien que faisant preuve d’une diction quelque peu exotique, Evgueniy Alexiev campe un Escamillo racé et autoritaire, alors que la Micaëla d’Ainhoa Garmendia est touchante de tendresse et de naïveté. Une mention spéciale est à décerner aux seconds rôles ainsi qu’au chœur d’enfants et au chœur de l’Opéra, tous excellents. Finalement, seule la performance de la fosse ne suscite absolument aucune réserve. Nicolas Chalvin dirige avec élan un Orchestre de Chambre de Lausanne en très grande forme, qui fait entendre un son rond et de très belles couleurs. Un spectacle d’adieu à moitié réussi donc.




Claudio Poloni

 

 

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