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Un violoncelle de diamant Paris Théâtre des Bouffes du Nord 04/18/2005 - Ludwig van Beethoven : Variations sur des thèmes de «Judas Maccabée» de Haendel, WoO 45, et de «La Flûte enchantée» de Mozart, opus 66
Benjamin Britten : Sonate pour violoncelle et piano, opus 65
Dimitri Chostakovitch : Sonate pour violoncelle et piano, opus 40
Pieter Wispelwey (violoncelle), Dejan Lazic (piano)
Pieter Wispelwey proposait un récital court mais dense, d’un impeccable ordonnancement, dont chaque partie comprenait un cycle de variations de Beethoven suivi d’une sonate, respectivement celles de Britten et de Chostakovitch. Or, c’est par l’entremise du Russe, à l’occasion de la première londonienne de son Premier concerto, que le Britannique fit la connaissance de Rostropovitch, pour lequel il écrivit immédiatement sa Sonate (et, ultérieurement, trois Suites). Et, quelques années plus tard, Chostakovitch dédia sa Quatorzième symphonie à Britten, qui en assura la création britannique.
Les deux recueils de Variations choisis par le violoncelliste hollandais sont tous deux datés de 1796: l’un sur l’air See the conqu’ring hero comes de Judas Maccabée de Haendel, l’autre sur l’air de Papageno (Ein Mädchen oder Weibchen) du second acte de La Flûte enchantée de Mozart. Bien loin de les considérer comme des éléments secondaires de la production beethovénienne, Wispelwey en investit la moindre note, chacune assortie d’une mimique à la Harpo Marx. Optant pour des tempi, une articulation et des nuances dynamiques très contrastés, son approche n’a pourtant rien d’arbitraire, la beauté souveraine des phrasés révélant au contraire un travail extraordinairement méticuleux. Mettant en valeur, dès l’énoncé du thème, le caractère ludique, voire l’étrangeté du propos, il trouve dans le piano de Dejan Lazic un partenaire sensible aux mêmes préoccupations.
La Sonate (1961) de Britten démontre que la distinction d’apparence quelque peu distante dont fait preuve Wispelwey ne doit pas être prise pour de la froideur ou même simplement pour de la neutralité, car l’engagement physique et expressif y est évident – on se demande même comment les cordes résistent au Scherzo pizzicato – avec un mélange d’intensité et d’ironie qui ne trouve de garde-fous que dans la maîtrise du discours, la finesse de la sonorité et la précision de la technique (sous réserve d’une petite tendance à attaquer en dessous de la note). De même, la Sonate (1934) de Chostakovitch conjugue élégance, pudeur et dépouillement. L’archet ne cède jamais à la tentation de larmoyer et le vibrato ne devient pas une fin en soi: sans jouer les jolis cœurs ni les gros bras, ce violoncelle n’en possède pas moins la pureté et la solidité du diamant.
Les artistes remercient le public par «quelque chose de français», la transcription de Après un rêve (1878) de Fauré, à cent lieues, on s’en doute, de la vision éperdument romantique qu’en donnait quelques jours plus tôt Mischa Maisky et Itamar Golan.
Simon Corley
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