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A la loupe

Paris
Opéra Bastille
03/16/2005 -  
Bohuslav Martinu : Pamatnik Lidicim, H. 296
Leos Janacek : Tarass Boulba
Antonin Dvorak : Symphonie n° 8, B. 163

Orchestre de l’Opéra national de Paris, Jiri Belohlavek (direction)


Jiri Belohlavek dirigeait trois des compositeurs (Dvorak, Janacek, Martinu) formant ce que l’on pourrait appeler le «quatuor tchèque»: un seul «absent», par conséquent, Smetana, qui, compte tenu de la très courte durée du concert (soixante-dix minutes de musique artificiellement gonflées par un entracte d’une demi-heure), aurait pourtant pu être associé à la fête. En avril 1990, alors que l’Opéra Bastille essuyait les plâtres en proposant des soirées purement symphoniques, le chef avait fait sensation, à la tête de la Philharmonie tchèque – dont il devait brièvement devenir le chef principal et directeur musical (octobre 1990-février 1992) – avec... Smetana, Dvorak et Martinu. Pourtant, s’il a effectivement acquis une notoriété grâce à ses interprétations et enregistrements de la musique de son pays, celui qui deviendra l’été prochain le chef principal de l’Orchestre symphonique de la BBC s’est également illustré, depuis lors, notamment avec la Philharmonie de chambre de Prague qu’il a fondée en 1994, dans d’autres répertoires où il aurait été intéressant de pouvoir l’entendre.


Mais on n’allait pas bouder son plaisir devant un programme aussi homogène, bien que le Mémorial pour Lidice (1943) de Martinu ait déjà été donné voici moins d’un mois à l’Orchestre de Paris (voir ici). Moins grandiose et imposant qu’Eschenbach, Belohlavek impose une vision plus intériorisée de cet hommage à l’Oradour tchèque. Dans Tarass Boulba (1918) de Janacek, la déception est grande: l’orchestre reste certes égal à lui-même, c’est-à-dire excellent, autorisant par conséquent une restitution tout à fait propre de la partition, sous réserve de quelques départs incertains. Mais, peut-être en raison d’une allure parfois trop retenue, le discours peine à trouver une cohérence, tandis que la ferveur, le lyrisme ou le mordant paraissent trop souvent faire défaut. Que signifie un Janacek aussi lisse? Avec Bakala, Talich ou Ancerl dans l’oreille, on avouera avoir des difficultés à adhérer à une conception aussi analytique.


Point de classicisme mozartien dans la Huitième symphonie (1889) de Dvorak, que Belohlavek n’aborde décidément pas avec l’humeur légère que l’on prête d’ordinaire à cette œuvre lumineuse. Epaisissant les textures, assombrissant les couleurs et élargissant le format, il adopte une conception rhapsodique, voire épique, fondée sur des tempi instables, parfois très étirés, qui lui permettent en même temps de travailler considérablement le texte, dans une intention quasi pédagogique et soigneusement calculée, comme s’il le scrutait minutieusement à la loupe pour mieux en surligner les effets. Cette approche semble néanmoins convaincre une partie des musiciens, qui retrouveront le chef pour les reprises de Roussalka de Dvorak et de Juliette ou la clef des songes de Martinu.



Simon Corley

 

 

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