About us / Contact

The Classical Music Network

Chaise-Dieu

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

La jeunesse a le dernier mot

Chaise-Dieu
Abbatiale
08/29/2004 -  et 31 août (Montreux), 4 (Dijon) et 9 (Paris) septembre
Guillaume Connesson : Enluminures (création)
Antonin Dvorak : Concerto pour violon, opus 53, B. 108
Felix Mendelssohn : Mer calme et heureux voyage, opus 27
Claude Debussy : La Mer

Arabella Steinbacher (violon)
Orchestre français des jeunes, Jesus Lopez Cobos (direction)


Les petites chauve-souris qui coulent d’ordinaire des jours paisibles sous les voûtes de l’abbatiale vont pouvoir retrouver leurs habitudes, perturbées pendant les deux dernières semaines, puisque la partie casadéenne de la trente-huitième édition du Festival de La Chaise-Dieu et du Puy-en-Velay – les six derniers concerts se tiendront au Puy (une soirée franco italienne autour de l’ensemble Les Folies françoises, puis deux soirées Biber données par Andrew Manze et son English concert et une intégrale en trois temps des concertos pour violon de Mozart) – a pris fin avec un programme placé sous le signe de la jeunesse.


Jeunesse des musiciens, tout d’abord, puisque cette conclusion permettait de retrouver l’Orchestre français des jeunes (OFJ) qui, pour sa part, débutait ainsi sa tournée estivale, après avoir travaillé dix jours durant pupitre par pupitre sous la houlette d’instrumentistes issus des meilleurs orchestres et conservatoires français, puis dix autres jours en tutti: excellente initiative, car malgré un renouvellement perpétuel de ses effectifs qui est en même temps sa raison d’être, l’OFJ a une nouvelle fois démontré, dans un programme couvrant un répertoire très étendu, qu’il savait maintenir d’une année sur l’autre une qualité et un enthousiasme que l’on ne rencontre pas toujours parmi les formations professionnelles. On comprend donc aisément que Jesus Lopez Cobos, qui en avait précédemment assuré la direction entre 1998 et 2001, ait accepté d’en redevenir le chef permanent à compter de cette saison, succédant ainsi à Emmanuel Krivine.


Jeunesse du compositeur, ensuite, puisqu’étaient créées les Enluminures de Guillaume Connesson (trente-quatre ans). Il livre ici une partition de treize minutes dont l’orchestration raffinée évoque le premier Stravinski ou le dernier Martinu, mais dont le principe – cinq brefs mouvements enchaînés mettant successivement en valeur les différents groupes de l’orchestre – voire le langage rappellent les Métaboles de Dutilleux, même si ces mouvements forment une arche autour d’un centre de caractère violent et agité. Une fois de plus, Connesson s’illustre par sa science orchestrale, au point que celle-ci devient parfois une fin en soi. Mais après tout, n’est-ce pas le propre des enluminures que de s’enivrer d’une richesse d’ornementation destinée à susciter l’admiration?


Jeunesse de la soliste, également, Arabella Steinbacher (vingt-trois ans) ayant remplacé Sarah Chang dans le Concerto pour violon (1880) de Dvorak. Si, malgré la générosité de l’acoustique, elle ne possède sans doute pas une sonorité aussi moelleuse que celle de son aînée et compatriote Anne-Sophie Mutter, la violoniste allemande, frappant par son aisance et son autorité, par sa justesse et sa précision, par son archet résolument expressif et expansif sans être sirupeux, rend toutefois vaine cette inévitable comparaison. En bis, dans la même tonalité de la mineur, elle choisit dans le bréviaire que Bach a laissé à l’instrument l’Andante de la Deuxième sonate: avec davantage de simplicité que d’intériorité, ce chant au phrasé parfaitement tenu s’épanouit merveilleusement dans cette enceinte sacrée, tellement appropriée à la musique du Cantor.


En seconde partie, deux des nombreuses œuvres inspirées par l’élément marin étaient confrontées. L’ouverture Mer calme et heureux voyage (1828) de Mendelssohn, fondée sur deux poèmes de Goethe qui avaient déjà inspiré Beethoven treize ans plus tôt, est aujourd’hui quelque peu négligée. Tour à tour poétique et transparent, subtil et pétaradant, Lopez Cobos en fait pourtant ressortir toute la grâce et l’élan, dans l’esprit de la Symphonie «Italienne» qui devait naître cinq ans plus tard.


Après cette relative rareté, La Mer (1905) de Debussy, qui n’a pas quitté l’affiche depuis sa création voici près d’un siècle, nous ramenait vers des rivages nettement plus familiers. Prudents et retenus, Lopez Cobos et l’OFJ s’y montrent quelque peu en retrait, obtenant un kaléidoscope de vignettes d’une incontestable exactitude mais peinant à établir une continuité du discours et à en faire ressortir les tensions. Nul doute qu’au fil des concerts, ce légitime souci de mise en place s’effacera au profit d’une interprétation à la fois plus construite et plus animée, davantage mue par une nécessité intérieure.


Jeunesse du chef, pour finir, puisque l’Espagnol retrouve toute son énergie pour défendre les couleurs de son pays, offrant les revigorantes ouvertures de deux zarzuelas: El Tambor de granaderos (1894) de Ruperto Chapi (1851-1909) puis La Boda de Luis Alonso (1897) de Geronimo Gimenez (1854-1923), où les quatre trombones, par leur activité débordante, ne sont pas les derniers à suggérer un rapprochement – au demeurant assez incongru en ce lieu – avec le style d’Offenbach.



Simon Corley

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com