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Réalisme britannique

Paris
Opéra Bastille
01/19/2004 -  et 22, 25, 28, 31 janvier, 4, 7 février 2004
Benjamin Britten : Peter Grimes, opus 33
Anthony Dean Griffey (Peter Grimes), Brigitte Hahn (Ellen Orford), Peter Sidhom (Capitaine Balstrode), Claire Powell (Auntie), Carolyn Sampson (Première nièce), Valérie Condoluci (Seconde nièce), Ian Caley (Bob Boles), Michael Druiett (Swallow), Della Jones (Madame Sedley), Neil Jenkins (Révérend Horace Adams), Jason Howard (Ned Keene), Lynton Black (Hobson), Constantin Jopeck (L’apprenti), Christian Nedjel (Docteur Crabbe)
Chœurs de l’Opéra national de Paris, Peter Burian (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra national de Paris, Roderick Brydon (direction)
Graham Vick (mise en scène), Alejandro Stadler (réalisation de la mise en scène), Allex Aguillera (assistant à la mise en scène), Paul Brown (décors et costumes), Matthew Richardson (lumières)


Premier opéra d’un compositeur âgé de trente-deux ans, Peter Grimes (1945), encore tout récemment donné en version de concert à Londres après une production toulousaine (voir ici), fait à nouveau l’affiche de l’Opéra Bastille, qui reprend le spectacle donné en avril 2001. Même le temps, pour cette première, s’était mis de la partie, avec un crachin persistant que l’on n’avait pas de peine à associer au village de pêcheurs du Suffolk où est située l’action.


Accueillie par une véritable bronca du public il y a trois ans, la mise en scène de Graham Vick, en harmonie avec les décors et costumes de Paul Brown, revendique explicitement un réalisme social à la Ken Loach, trivial, sordide et cru jusque dans ses décors et costumes (de Paul Brown) ou lumières (de Matthew Richardson). Cette conception est-elle entrée dans les mœurs ou est-ce simplement l’absence du metteur en scène – dont le travail a été «réalisé», comme c’est souvent le cas pour une reprise, par un confrère (Alejandro Stadler) – lors des rappels, au demeurant très rapidement abrégés par la régie, qui explique l’accueil très favorable réserve à cette reprise?


Quoi qu’il en soit, si cette vision peut surprendre, on ne pourra pas lui reprocher de manquer de cohérence, parvenant même sans trop de difficultés à intégrer les anachronismes liés à la transposition du livret dans l’Angleterre post-thatchérienne (billard électrique, tables à repasser, caravane de Peter Grimes, automobiles, camion frigorifique). Les scènes de foule, tout à fait saisissantes, tendent cependant parfois à la confusion générale, consistant en une multitude fort vivante, pour ne pas dire agitée, de petits tableaux juxtaposés. Le procédé culmine, au cours de la première scène du troisième acte, dans une sorte de bacchanale dont on ne perçoit d’ailleurs pas immédiatement la justification. Incidemment, il est regrettable que les changements de décor soient accompagnés, derrière le rideau, par un vacarme et même des cris qui perturbent les splendides «interludes marins», en particulier celui qui fait la transition entre le prologue et le premier acte.


La distribution a été presque entièrement modifiée par rapport à la production d’origine, à commencer par les trois personnages principaux. Anthony Dean Griffey, qui a déjà chanté le rôle-titre à Glyndebourne en 2000 (voir ici), n’a que peu à voir avec Ben Heppner: s’il n’est sans doute pas un ténor héroïque wagnérien, son timbre pur, sa jeunesse et son lyrisme, qui évoquent Peter Pears, convainquent pleinement. Bien qu’indéniablement crédible en Ellen Orford, Brigitte Hahn, qui a incarné l’an dernier la Comtesse dans les Noces de Figaro (voir ici), paraît légèrement en retrait, mal à l’aise dans le grave et usant d’un fort vibrato dans l’aigu. En revanche, Peter Sidhom compose un Capitaine Balstrode efficace, dont la diction est servie par une puissance impressionnante.


Les rôles secondaires, en revanche, ne sont qu’en partie renouvelés, mais outre le fait que l’on retrouve avec plaisir un excellent quatuor masculin (Ian Caley, Neil Jenkins, Jason Howard et Lynton Black, tonitruant Hobson) et la redoutable Mrs. Sedley de Della Jones, les nouvelles figures, essentiellement féminines, ne déçoivent pas, aussi bien Claire Powell (Auntie) que ses «nièces» Carolyn Sampson et Valérie Condoluci ou Michael Druiett (Swallow).


Succédant à James Conlon, Roderick Brydon, qui prend la place de Stéphane Denève, initialement annoncé pour cette reprise, n’est pas pour autant inconnu à Bastille, puisqu’il s’y est déjà illustré dans Billy Budd du même Britten en mars 1998 (voir ici). Malgré une gestuelle économe, il accentue les effets dramatiques de la partition, à la tête d’un orchestre en excellente forme, notamment dans un très bel interlude du deuxième acte. Dans un des opéras qui met probablement le plus en valeur les chœurs, ceux de l’Opéra de Paris, préparés par Peter Burian, frappent par un engagement et une sonorité exemplaires.



Simon Corley

 

 

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