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Eternel Fidelio

Lyon
Opéra
11/28/2003 -  – et 30 novembre, 2, 4, 6, 8, 10 et 12 décembre
Ludwig van Beethoven : Fidelio, opus 72

Gabriele Fontana (Léonore), Robert Dean Smith (Florestan), Reinhard Hagen (Rocco), Claudio Otelli (Don Pizarro), Kurt Gysen (Don Fernando), Claudia Braun (Marcelline), Eberhard Francesco Lorenz (Jaquino), Brian Bruce (premier prisonnier), Jean-François Gay (second prisonnier)
Nikolaus Lehnhoff (mise en scène), David Walsh (réalisation de la mise en scène), Raimund Bauer (décors), Anna Eiermann (costumes), Duane Schuler (éclairages), Denni Sayers (chorégraphie)
Chœurs de l’Opéra de Lyon, Alan Woodbridge (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra de Lyon, Leopold Hager (direction)


Coproduit avec le Festival de Pâques de Salzbourg, le Fidelio proposé aux spectateurs de l’Opéra de Lyon apparaît, autant le dire d’emblée, comme exemplaire, et ce à tous points de vue.

La mise en scène de Nikolaus Lehnhoff, «réalisée» par David Walsh, nous transporte – rideau levé dès le début de l’ouverture sur un espace couvert par un alignement de chaussures de sinistre mémoire – dans un univers technocratique et tortionnaire, froid et gris, aux murs droits, hauts et épais (décors de Raimund Bauer), à peine égayé par quelques tâches de couleur (la robe rose bonbon de Marcelline, la camisole jaune de Florestan) mais servi par d’importants jeux d’ombres et de lumières (éclairages de Duane Schuler), qui s’accordent avec le déroulement de la partition. Les costumes d’Anna Eiermann évoquent, aussi bien l’Allemagne des années 1930 que la RDA des années cinquante (Fidelio, Rocco, Jaquino), référence quasi obligée mais sans y insister aussi lourdement que dans d’autres productions, d’autant que les autres personnages sont caractérisés de façon plus intemporelle, notamment au second acte, où le frac est de mise aussi bien pour Pizarro que pour Don Fernando ou même Florestan, sans oublier les prisonniers, triste foule d’anonymes portant chacun un voile clair qu’il enlèvera lors du tableau final. Ce parti pris s’accorde avec une direction d’acteurs sobre, pour ne pas dire souvent statique.


Bien loin de tenter de masquer les défauts de cet opéra problématique et les artifices de sa dramaturgie, cette production joue donc pleinement la carte de l’oratorio à portée universelle, au point d’escamoter totalement les dialogues: ceux-ci ne sont certes pas inoubliables et sont d’ailleurs parfois retravaillés, mais ce choix paraît d’autant plus regrettable que les chanteurs ont une excellente diction et, surtout, qu’il supprimer en outre le mélodrame (scène parlée accompagnée une orchestration très travaillée) qui précède le duo du second acte entre Léonore et Rocco. Les numéros sont donc séparés par des silences plus ou moins longs, que la mise en scène tente de pallier en demandant aux personnages de mimer en quelques gestes les actions ou sentiments relatés par les textes omis. On se doute dès lors que l’ouverture Léonore III, malgré la tradition instaurée depuis exactement un siècle par Mahler, ne viendra pas interrompre ce Fidelio condensé (une heure trois quarts de spectacle).


Compte tenu de cette austérité visuelle et de ce radicalisme textuel, il était capital que la réussite fût également musicale. Dès l’ouverture, Leopold Hager conduit un orchestre transparent et rebondissant et saura, tout au long de la représentation, maintenir un bon équilibre entre la scène et la fosse ainsi qu’une direction fine et nerveuse, qu’on ne pourra décidément s’empêcher de trouver fort mozartienne. Les chœurs, avec cohésion et précision, s’associent de façon bienvenue à la conclusion des deux actes.


Côté vocal, la seule faiblesse pourrait venir du manque de projection de Claudio Otelli (Pizarro), mais le reste de la distribution ne mérite que des éloges. Gabriele Fontana (Léonore) fait évoluer sa voix au fil des états successifs de son personnage, avec une puissance et un engagement remarquables qui compensent largement un manque d’homogénéité de ses différents registres. Robert Dean Smith (Florestan), que le programme qualifie bien étrangement de baryton, incarne un Florestan héroïque – quasi wagnérien, puissant alors qu’il doit feindre l’épuisement et la faim – puis – non sans réminiscences véristes – plus lyrique. Reinhard Hagen campe un Rocco plus jeune et tourmenté que débonnaire, mais d’une exceptionnelle qualité technique et expressive. Claudia Braun (Marcelline) déploie une ligne de chant très soignée, tandis que Eberhard Francisco Lorenz confère au rôle de Jaquino la verdeur de son timbre de ténor comique. Le Don Fernando de Kurt Gysen ne dépare pas la fin de l’opéra, avec une autorité et une force convaincantes.


Après un Wozzeck qui avait également convaincu (voir ici), on ne peut que se réjouir de ce nouveau succès pour une maison qui connaît pourtant actuellement des difficultés liées au non-renouvellement, fin août, du contrat de son directeur musical, Ivan Fischer.



Simon Corley

 

 

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