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La musique française à l’honneur

Paris
Maison de Radio France
11/08/2003 -  
Guillaume Connesson : L’Appel du feu (création)
Maurice Ravel : Concerto pour la main gauche
Bernard Cavanna : Trois chants cruels
Albert Roussel : Symphonie n° 3, opus 42

François-Frédéric Guy (piano), Rayanne Dupuis (soprano)
Orchestre national des Pays de la Loire, Hubert Soudant (direction)


Dans le cadre du festival «Paris de la musique» organisé tous les trois ans par Musique nouvelle en liberté, l’Orchestre national des Pays de la Loire et son directeur musical, Hubert Soudant (qui y achèvera sa dixième saison avant de prendre les rênes de l’Orchestre symphonique de Tokyo), donnent à Paris deux concerts (voir par ailleurs ici) réservant une large place au répertoire français, qu’ils auront enrichi de commandes et de créations. Bel équilibre pour le programme du premier concert, avec deux œuvres contemporaines et deux œuvres du début des années 1930.


Donné en création, L’Appel du feu de Guillaume Connesson consiste en un triptyque d’une vingtaine de minutes, qui revendique explicitement sa préoccupation descriptive: uniment tempétueux, Incendie fait référence à celui qui ravagea l’Hôtel de Ville durant la Commune; d’une progression implacable, Bûcher évoque l’exécution de Jacques de Molay, grand maître des Templiers; étrangement en rupture de ton, Feux d’artifice introduit de joyeux bruits de fête, dans une ambiance à la Bernstein. Dans ses excellentes notes de programme, Dominique Druhen cite la Poétique du feu de Bachelard. Mais est-ce le propos du compositeur, qui assume pleinement des influences nombreuses (Messiaen en même temps que Bernard Herrmann) et sait écrire une de façon redoutablement efficace? De fait, le compteur esthétique est resté bloqué aux années 1950 et cette musique grand public s’inscrit dans la lignée d’une naïveté picturale et spectaculaire héritée de Respighi.


«L’appel du feu» qui hante le Concerto pour la main gauche (1931) de Ravel, dont le commanditaire perdit un bras durant la Première guerre mondiale, est autrement plus poignant. François-Frédéric Guy, objectif voire austère, plus pudique et allusif que distant, privilégie la puissance de la protestation sur la recherche de l’expression et ne force pas sur les effets grinçants ou grotesques, mais l’accompagnement n’est pas toujours à l’unisson de ce refus de l’extériorité.


Les Trois chants cruels (2000) de Bernard Cavanna, extraits de son opéra La Confession impudique (sur un livret de Daniel Martin d’après le roman de Tanizaki), retrouvent les interprètes de leur création. La soprano canadienne Rayanne Dupuis fait feu de tout bois dans les différents jeux sur la voix (depuis le parlé jusqu’au chanté, en passant par le récitatif) que lui réserve la partition. Faisant appel à un orchestre de taille relativement réduite, comprenant harpe, cymbalum et célesta sur le devant de la scène, le compositeur suit fidèlement ces monologues dont le texte habilement conçu laisse deviner une intrigue un rien perverse: d’un dépouillement rarement perturbé par la violence (deux premiers chants) ou par l’ironie (troisième chant), sa musique distille une oppression subtile et insidieuse. Comme Connesson en première partie, Cavanna vient saluer le public et remporte un franc succès avec ce compromis stylistique entre une ligne vocale tributaire d’une esthétique avant-gardiste, avec ses grands intervalles, et le souci d’une expressivité plus immédiate.


Devenue trop rare, la Troisième symphonie (1930) de Roussel conclut la soirée. Peu porté à mettre en valeur les détails d’une orchestration pourtant d’une exceptionnelle densité, Hubert Soudant en donne une lecture massive (Allegro vivo), souvent lestée par des tempi un rien trop retenus (notamment le Scherzo), mais chaleureuse (Adagio) et parfois même poétique (section Andante du final).



Simon Corley

 

 

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