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Idomeneo, roi de chœur ! Lucerne Centre de culture et des congrès 09/17/2003 - et 19 septembre 2003 Wolfgang Amadeus Mozart : Idomeneo Version de concert
Philip Langridge (Idomeneo), Magdalena Kozena (Idamante), Christiane Oelze (Ilia), Anne Schwanewilms (Elettra), Peter Hoare (Arbace), Ian Caley (Gran sacerdote di Nettuno), Reinhard Hagen (La Voce)
Chœur European Voices, Simon Halsey (préparation)
Orchestre Philharmonique de Berlin, Simon Rattle (direction)
En résidence pour quelques jours au Festival de Lucerne, le Philharmonique de Berlin, sous la baguette de son chef titulaire Simon Rattle, a notamment présenté une version concertante intégrale d’Idomeneo. Trois heures et quart de musique au plus haut niveau ! Malheureusement, quelques spectateurs ont préféré quitter définitivement la salle à l’entracte, à la fin du 2e acte. Au début de la seconde partie, il était impossible de faire abstraction des fauteuils laissés vides. Dommage, car les occasions d’entendre cette œuvre sans coupures sont rares. Pour anecdotique qu’il soit, ce constat met en évidence qu’une grande partie du public lucernois n’est pas composée de mélomanes passionnés, mais d’invités des sponsors finançant le Festival.
Mais revenons au concert ! Le grand triomphateur de la soirée a été… le chœur des European Voices, un ensemble professionnel créé en 1999, à l’instigation de Simon Rattle, et qui a fait des débuts déjà très remarqués à Salzbourg la même année, dans Les Boréades. Une formation d’une précision et d’une homogénéité incroyables, qui ne mérite que des éloges !
Au début de l’été, Simon Rattle s’était déjà familiarisé avec la partition de Mozart au Festival de Glyndebourne, avec à cette occasion l’Orchestra of the Age of Enlightenment et dans une mise en scène de Peter Sellars. Quelques jours avant les représentations de Lucerne, il reprenait l’ouvrage à Berlin, en version de concert, avec pratiquement la même distribution, mais avec son orchestre. Le chef anglais offre une direction aux impulsions dramatiques et subtilement nuancée. Jamais de masse orchestrale compacte, mais des pupitres toujours clairement identifiables. Seule fausse note, si on peut dire : à plusieurs reprises, l’orchestre couvre totalement les chanteurs, qui, étonnamment, se trouvent derrière les musiciens, bien qu’en position légèrement surélevée. Une disposition qui paraît donc peu judicieuse.
Sur le plan vocal, c’est un plateau de premier choix qui a été servi. Il convient de citer en premier lieu la performance de Magalena Kozena, qui a admirablement rendu l’ambivalence d’Idamante, alliant de magnifiques pianissimi à des attaques chatoyantes et impétueuses. Christiane Oelze est une Ilia poignante, aux airs d’un lyrisme touchant et au phrasé impeccable. Anne Schwanewilms campe une Elettra engagée et toute en puissance vocale, avec parfois quelques problèmes d’intonation dans les aigus.
Face à ce trio féminin de choc, la distribution masculine est forcément un peu en retrait. Philip Langridge a néanmoins réussi à se déjouer des énormes difficultés du rôle-titre pour composer un Idomeneo déchirant, aux accents élégants, même si la voix manque singulièrement de projection. Le baryton Peter Hoare est lui un Arbace particulièrement sonore.
Applaudissements très chaleureux à la fin de l’exécution, se terminant par une "standing ovation". Pour tous ceux qui auraient raté l’Idomeneo de Rattle, une dernière chance : le prochain Festival de Pâques de Sazbourg !
Claudio Poloni
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