|
Back
Première à Bâle pour une zarzuela Bâle Theater 09/27/2025 - et 3, 5, 25 octobre, 5, 7*, 10, 15, 22, 28 novembre, 7, 28 décembre 2025 Francisco Asenjo Barbieri : El barberillo de Lavapiés David Oller (Lamparilla), Carmen Artaza (Paloma), Cristina Toledo (La Marquesita del Bierzo), Santiago Sánchez (Don Luis de Haro), Alejandro Balinas Vieites (Don Juan de Peralta), Joselu López (Don Pedro de Monforte), Marcelino Echeverría (Lope, Guitariste), Marta Catalina Bauza Soler (Une vendeuse), Gabriel Courvoisier, Teddy Métriau (Etudiants)
Chor des Theater Basel, Michael Clark (chef de chœur), Sinfonieorchester Basel, Julio César Picos Sol*/José Miguel Pérez‑Sierra (direction musicale)
Christof Loy (mise en scène), Manuel La Casta (décors), Robby Duiveman (costumes), Valerio Tiberi (lumières), Javier Pérez (chorégraphie), Elise Boch (dramaturgie)
 (© Ingo Höhn)
Parmi les événements de la saison en Suisse, Le Petit Barbier de Lavapiès (1874) de Barbieri fait son entrée au répertoire du Théâtre de Bâle : il s’agit de la première zarzuela à être jouée dans l’une des grandes institutions lyriques du pays, qui fait suite à la coproduction organisée avec Madrid et Oviedo – à savoir les deux cités les plus engagées en Espagne pour promouvoir ce répertoire. Le chef d’œuvre de Barbieri reste régulièrement monté dans la péninsule ibérique, comme en atteste une production madrilène du Teatro de la Zarzuela en 2019. On ne peut que se réjouir de la diffusion plus large de cet ouvrage délicieusement enjoué, proche de l’esprit de l’opéra‑comique français par son alternance de passages chantés et parlés, auxquels s’ajoutent des couleurs savoureuses, du fait de l’incorporation de plusieurs danses locales (seguidilla, fandango, etc).
Le Théâtre de Bâle a choisi de monter l’ouvrage en langue originale avec surtitres en allemand et en anglais, tout en engageant des interprètes hispanophones pour les rôles principaux. C’est là une exception notable à son fonctionnement habituel, qui privilégie les chanteurs de sa troupe permanente, à l’instar de ses équivalents germanophones habitués au modèle du « théâtre de répertoire ». Si la présence de l’Orchestre symphonique de Bâle a été conservée pour l’ensemble des représentations, il a été fait appel à un chef venu des Asturies pour l’occasion, en la personne de Julio César Picos Sol. On regrette toutefois que ce dernier ne joue trop la carte d’une rythmique exacerbée, avec des cuivres particulièrement sonores : de quoi perdre en raffinement et en nuances ce que l’on gagne en vitalité. De la même manière, le Chœur du Théâtre de Bâle officie pour ce spectacle, en ayant bénéficié des conseils d’un coach espagnol au préalable, ce qui est audible au vu de l’excellent résultat obtenu.
Le plateau vocal réuni apporte également beaucoup de satisfactions, au premier rang desquelles le niveau homogène des seconds rôles, ainsi que la prestation de Carmen Artaza (Paloma), en véritable rayon de soleil de la soirée. La mezzo fait valoir une émission souple et naturelle sur toute la tessiture, tout autant qu’un timbre profond et chaleureux, à même de faire vivre son personnage de comploteuse d’opérette. Dans le rôle‑titre, David Oller en fait des tonnes dans la caractérisation populaire, ce qui peut fatiguer sur la durée, à l’instar de sa propension à privilégier le registre forte. On lui préfère le solide Santiago Sánchez (Don Luis) ou l’énergique Cristina Toledo (Estrella), malgré une émission un peu étroite.
Fidèle à ses partis pris esthétiques, Christof Loy joue la carte de l’épure en une scénographie immaculée, dont le blanc crème est revisitée par des éclairages vivifiants, à même d’évoquer la chaleur méditerranéenne. Si les costumes tout aussi minimalistes et stylisés cherchent à évacuer les images de carte postale habituellement véhiculés dans les spectacles plus traditionnels, on retrouve l’esprit ibérique dans les chorégraphies endiablées de Javier Pérez, d’une belle tenue. En dehors de ces propositions visuelles bien réglées, le spectacle peine toutefois à surprendre par des idées innovantes, au-delà de quelques ajouts humoristiques au début, pour moquer les différences de compréhension linguistique entre le couple Paloma/Barbier. On ressort de la salle avec un goût d’inachevé, d’autant plus amer que public bâlois fait un triomphe chaleureux à la production – sans doute conquis par ce moment de bonne humeur et de vitalité d’ensemble.
Florent Coudeyrat
|