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Deux soirées milanaises

Milano
La Scala/ Teatro degli Arcimboldi
09/28/2002 -  et 30 septembre, 2, 3*, 4*, 7 octobre 2002
Gaetano Donizetti : Lucrezia Borgia
Mariella Devia (Lucrezia Borgia), Daniela Barcellona (Maffio Orsini), Marcelo Alvarez (Gennaro), Michele Pertusi (Don Alfonso, Duca di Ferrara), Carlo Bosi (Jeppo Liverotto), Piero Terranova (Don Apostolo Gazella), Fabio Capitanucci (Ascanio Petrucci), Antonio Feltracco (Oloferno Vitellozzo), Alessandro Svab (Gubetta), Eldar Aliev (Astolfo), Ernesto Panariello (Une voix)
Orchestre de la Scala, Renato Palumbo (direction)
Hugo de Ana Mise en scène et costumes)


« La maternité purifiant la difformité morale , voilà Lucrèce Borgia »
Victor Hugo 11 février 1833-préface de Lucrèce Borgia



La Scala transférée pendant ses travaux dans la banlieue milanaise au Teatro degli Arcimboldi affichait ce 4 octobre 2002 Lucrezia Borgia de Gaetano Donizetti créé à La Scala 26 décembre 1833 sur un livret de Felice Romani d’après la tragédie de Victor Hugo.
Depuis sa création cet opéra a été représenté ensuite sous divers titres, avec l’action modifiée, en raison de la censure, et de l'opposition de Victor Hugo ; Donizetti modifia sa partition jusqu'en 1841, ajoutant notamment différents airs de ténor. Régulièrement donné au XIXè siècle, repris au XXè, au Mai musical florentin (1933) et couramment joué depuis.
L’action se passe au XVIè siècle à Venise et Ferrare.


La mise en scène, les décors, les lumières n’étaient pas une nouvelle production mais une reprise de celle donnée en juillet 1998 avec Renée Fleming, Marcello Giordani, Michele Pertusi sous la direction orchestrale de GianLuigi Gelmetti. Le talent de Hugo de Ana est toujours apprécié. Il a restitué l’action avec des décors appropriés à l’époque. Le rideau se lève sur un immense mur aux teintes brunes et rouille de la brique (identiques au château milanais des Sforza) donnant la couleur que l’on retrouve dans les autres scènes extérieures : la terrasse du Palais Grimani à Venise pour le prologue, de la place de Ferrare au 1er acte et de la petite cour devant la maison de Gennaro du 2ème acte. Même tonalité à Ferrare de la statue des Borgia décapitée, pour la scène où Gennaro fait sauter de la pointe de son épée le B du blason des Borgia qui devient « Orgia » illustrant la vie dissolue de cette célèbre famille.
La décoration de la salle du Palais ducal est d’une beauté remarquable avec ses sculptures et ses fresques or et bronze, le banquet se déroule sur une scène éclairée et riche en mobilier et vaisselle d’or. Les liens des Borgia avec la papauté, la luxure, le crime sont évoqués par des figurants portant la tiare papale et une magnifique chape bleue et or cachant au prologue des danseuses et au dernier acte Lucrezia organisatrice de la fête pour empoisonner tous ceux qui l’ont insultée. Mais se rendant compte que son fils est parmi les invités, elle ne peut que recouvrir de cet emblème le corps de son fils qui a refusé son anti-poison.



Vocalement le plateau était remarquable et homogène, y compris les rôles secondaires et les chœurs qui méritent tous un satisfecit. Daniela Barcellona en Maffio Orsini a fait beaucoup de progrès mais sa voix et son physique restent assez lourds , sa « ballade» du 2ème acte manquait de mordant et de gaieté. Michele Pertusi avait revêtu l’habit ducal de Don Alfonso. Rien ne manque à ce superbe baryton-basse qui continue à s’illustrer dans de nombreux autres rôles rossiniens et mozartiens. Dans cette œuvre, son phrasé, sa tenue vocale étaient un régal, sans oublier sa tenue de scène dramatique qui rendait son personnage extrêmement crédible.
Gennaro était l’un des plus célèbres jeunes ténors à l’heure actuelle : Marcelo Alvarez . L’éclat , les demi-teintes, la vaillance, la souplesse scénique, le charme : tout y était , les acclamations aussi ! Reste La Devia … Mariella, la sublime soprano lyrique aux notes de colorature unique, la belcantiste sachant faire frémir par des accents où l’émotion, la tenue de chant, les pianissimi éthérés ont transporté l’assistance qui l’a largement ovationnée.
Renato Palumbo était à la tête de l’orchestre de la Scala . Sa direction a été nette, précise, enveloppant et accompagnant les chanteurs sans aucun pathos.


Le 3 octobre, Lucrezia Borgia avait une distribution différente quant aux quatre principaux rôles. Il est dommage que La Scala refuse de préciser ses distributions avant les quelques jours précédant les représentations alors que les réservations sont ouvertes depuis plusieurs mois. Il est évident que les contrats sont signés longtemps avant avec des dates précises... Inadmissible aussi que le site internet de La Scala ne soit mis à jour que très tardivement pour cette saison 2002-2003. La réputation de ce théâtre fait venir des mélomanes du monde entier qui se déterminent sur un opéra accompagné d'une affiche. Cette pratique heureusement inexistante dans la plupart des autres théâtres, en dehors des inévitables remplacements de dernière heure, est pour le moins inélégante ! Doit-on en conclure que La Scala n’a que faire de l’opinion de son public ? Mais positivons ! cela peut aussi avoir le bon côté de faire connaître des jeunes chanteurs certes moins expérimentés, qui ce soir là n’ont pas démérités.
Maria Pia Piscitelli en Lucrezia Borgia était un joli soprano qui manque sans doute de maturité. Son premier air était interprété d’une façon quelconque mais elle a su être très persuasive et émouvante à la mort de Gennaro lorsqu’elle lui avoue être sa mère.
Le jeune ténor Giuseppe Filianoti, déjà entendu à Pesaro, était un Gennaro plein de fougue. Sa voix est belle, son aigu est brillant mais il manque un peu d’épaisseur pour ce rôle. On aimerait entendre un peu plus de mezza voce et non pas cette ligne en fortissimo continuel.
Maffio Orsini était Elena Cassian, mezzo qui mérite l’attention. Outre un physique agréable, la voix est ronde, percutante et sa ballade lancée avec gaieté, vaillance et émotion lorsque le poison fait son effet. Burak Bilgili prêtait sa voix de baryton-basse à Don Alfonso : son grave est sonore et son médium consistant mais parfois des écarts de justesse se sont glissés dans son émission vocale un peu pâteuse. Il est à souligner que les tempi de l’orchestre étaient bien différents lors de ces deux soirées : plus rapides avec les jeunes peut-être pour mieux les encadrer et leur éviter certains écueils ? Mais l’impression de couvrir les voix à certains passages était gênante. Le tempo lent adopté avec la distribution des «Grands» était beaucoup plus en osmose et illustrait bien la musique belcantiste de Donizetti . En résumé deux représentations très différentes qu’il n’y a pas lieu d’opposer l’une à l’autre.





E.G. Souquet

 

 

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