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L’Orchestre de Paris à l’épreuve du Festspielhaus de Baden‑Baden

Baden-Baden
Festspielhaus
02/28/2025 -  et 26 février (Hamburg), 28 (Baden Baden) février, 1 (Essen), 4 (Amsterdam), 7 (Frankfurt) mars 2025
Maurice Ravel : Ma mère l’Oye (Suite)
Igor Stravinski : Petrouchka
Modeste Moussorgski : Tableaux d’une exposition (orchestration Ravel)

Orchestre de Paris, Klaus Mäkelä (direction)


K. Mäkelä (© Michael Bode/manolopress)


L’acoustique du Festspielhaus de Baden-Baden, réputée pour dévoiler sans indulgence la moindre faille d’un orchestre, n’aura pas réussi à prendre en défaut l’Orchestre de Paris. Loin d’être sèche ou inconfortable, cette salle met surtout en évidence les problèmes de coordination et de mise en place. Or force est de constater que la phalange parisienne s’y montre irréprochable, affichant même une solidité digne des meilleurs ensembles internationaux.


Seul bémol : la puissance de feu réduite des cuivres, et plus particulièrement des trompettes, dont l’impact physique manque d’ampleur et de sûreté. Pour le reste, l’Orchestre de Paris dispose d’atouts indéniables : une petite harmonie aux timbres singuliers (certains pupitres sont de toute beauté), des cordes d’une grande élégance, et, sans doute, la réelle plus‑value qu’apporte Klaus Mäkelä, jeune directeur musical qui n’est manifestement pas étranger aux récents progrès d’un ensemble dont la maîtrise technique semble s’être nettement renforcée, du moins en comparaison de la décennie passée.


C’est sans surprise dans Ravel que la magie opère le plus. L’orchestre fait preuve d’un raffinement exquis dans Ma mère l’Oye, le chef modulant avec soin chaque nuance et veillant attentivement aux équilibres. De nombreux passages, dont la conclusion de la « Pavane de la Belle au bois dormant » ou la montée en tension du « Jardin féerique », laissent un souvenir impérissable. Seule réserve : un manque occasionnel de ligne directrice dans des sections comme « Les Entretiens de la Belle et de la Bête », où l’on sent parfois la narration s’évaporer.


Le même défaut – un discours qui manque d’unité – s’observe dans les premier et quatrième tableaux de Petrouchka, pourtant interprétés avec un luxe appréciable de gradations dynamiques et de couleurs orchestrales. A force de verticalité, le fil conducteur s’égare et risquerait vraisemblablement de dérouter d’hypothétiques danseurs contraints d’évoluer sur une musique aussi morcelée et peu généreuse en respirations. Les tableaux centraux, en revanche, surprennent par leur modernité âpre et leur indéniable intensité.


En seconde partie, l’orchestre se lance dans les Tableaux d’une exposition, une partition éminemment russe mais que l’orchestration de Ravel rend tout autant française. Certains volets, à l’instar du « Ballet des poussins dans leurs coques » ou de « Limoges. Le Marché », s’avèrent remarquablement réussis. En revanche, les derniers numéros, à partir de « Catacombes », peinent à déployer l’ampleur sonore qu’un grand orchestre américain ou allemand y atteindraient sans difficulté, après l’avoir longuement gardée en réserve. Et pourtant, même la comparaison avec des phalanges comme le Mariinski ou le Chicago Symphony, également confrontés par le passé à cette même œuvre de parade dans la même acoustique, ne tourne pas fondamentalement au désavantage des Parisiens.


Le public, manifestement conquis, ovationne debout la formation française, même si – fait notable pour une tournée – aucun bis ne prolonge le concert. Quoi qu’il en soit, cette soirée démontre le très solide niveau actuel de l’une de nos phalanges les plus représentatives, dont l’évolution régulière sous la baguette de Klaus Mäkelä ouvre de belles perspectives. L’instrument est là, et on ne peut que rêver maintenant aux sommets qu’atteindrait cet orchestre avec un directeur musical peut-être moins porté sur la technicité, mais doté d’un sens plus aguerri de la ligne et des architectures. Le jour où l’heure de la succession sonnera, il faudra s’interroger sérieusement...



Laurent Barthel

 

 

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