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Selon Sacha...

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
11/04/2024 -  et 22 (Salzburg), 30, 31 (Dijon) mars, 5* novembre (Paris) 2024
Johann Sebastian Bach : Johannes-Passion, BWV 245
Valerio Contaldo (Evangéliste), Georg Nigl (Pilate), Christian Immler (Jésus), Benno Schachtner (contre‑ténor), Sophie Junker (soprano), Mark Milhofer (ténor), Estelle Lefort (Servante), Augustin Laudet (Serviteur), Rafael Galaz Ramirez (Pierre), Camille Hubert (soprano), Logan Lopez Gonzzlez (contre‑ténor), Compagnie Sasha Waltz & Guests
Chœur de chambre de Namur, Chœur de l’Opéra de Dijon, Anass Ismat (chef de chœur), Cappella Mediterranea, Leonardo García-Alarcón (direction musicale)
Sasha Waltz (mise en scène, chorégraphie), Bernd Skodzig (costumes), Heike Schuppelius (décors), David Finn (lumières), Diego Noguera (intervention sonore électroacoustique)


(© Mirco Magliocca)


Après avoir été créé au dernier Festival de Pâques de Salzbourg puis présenté à l’Opéra de Dijon, le spectacle chorégraphié par Sasha Waltz et dirigé par Leonardo García-Alarcón a été présenté à Paris dans un Théâtre des Champs‑Elysées archiplein.


On allait de confiance voir et écouter cette Passion selon saint Jean, ayant été ému en  2017 par la réalisation berlinoise de la chorégraphe allemande du Requiem allemand de Brahms. Son spectacle « human requiem » relevait plus de l’expérience humaine avec participation du public, présenté au Radialsystem V, un ancien lieu industriel situé au bord de la Spree dans l’ex‑secteur oriental de la ville, dans le quartier autrefois industriel de l’Ostbahnhof où se sont développés après la réunification tant de lieux de culture alternative et de fête. Un magnifique bâtiment de brique servant de base à la Compagnie Sasha Waltz & Guests dont onze membres dansaient cette Passion autant selon Sasha que selon saint Jean.


On sait depuis les expériences de Peter Sellars à la Philharmonie de Berlin en une mise en scène assez messianique, qui, malgré l’immense talent de l’Américain, peinait à convaincre, et, plus récemment, au Théâtre du Châtelet celle, plus sacrilège, de Calixto Bieito, la difficulté de mettre en scène ces Passions de Bach, qui, intrinsèquement, contiennent déjà toute une dramaturgie et dont la musique est à elle seule un théâtre.


La chorégraphie parfaitement réglée, souvent plus agitée que recueillie, s’ouvre sur un horrible bruitage électronique assourdissant, un bruit d’autoroute ou de tarmac, tandis que les danseurs nus fabriquent sur scène leurs costumes à la machine à coudre. Puis, dès que démarre la musique, la danse s’installe, très élaborée, invitant choristes, solistes et même certains musiciens à participer au mouvement. Dans la seconde partie de la Passion, elle se veut plus descriptive et proche de la narration, à l’aide d’éclairages très sophistiqués de David Finn.


Les musiciens de l’ensemble Cappella Mediterranea, à qui la vaste scène débordant sur la salle laisse peu de place, sont répartis en deux blocs compacts situés dans les recoins cour et jardin de la scène, obligeant leur chef Leonardo García-Alarcón à une direction quasi chorégraphique. Les chœurs sont en partie sur scène, magnifiquement intégrés à l’action, pour l’autre répartis dans des fauteuils d’orchestre, se levant et se déplaçant pour leurs interventions. Un spectacle de deux grandes heures sans entracte à plusieurs niveaux de lecture si l’on y inclut un surtitrage bilingue qui est nouveau dans l’historique de ce spectacle. Quand, au début de la seconde partie, revient l’intervention sonore électroacoustique accompagnée de martellement de pierres sur scène, une partie du pourtant bien placide publique de l’avenue Montaigne manifeste son mécontentement...


La réalisation musicale de Leonardo García-Alarcón va dans le sens du spectacle, plus dans l’action que dans la contemplation, dirigeant au clavecin énergiquement avec des tempi rapides et des accents souvent saccadés un ensemble instrumental magnifique, dont quelques pupitres sont exemplaires et brillent par leur participation scénique. Les solistes, dont certains n’ont pas vraiment le format vocal requis pour ce grand théâtre, sont très satisfaisants, particulièrement l’Evangéliste du ténor italien Valerio Contaldo, un des moteurs de l’action comme l’excellent Pilate du baryton autrichien Georg Nigl, et la soprano franco‑belge Sophie Junker. Mais c’est surtout la masse chorale chantée par le Chœur de chambre de Namur et le Chœur de l’Opéra de Dijon préparés par Anass Ismat qui restera pour nous le meilleur souvenir de cette soirée accueillie avec plus de bravos que de huées par un public très varié.



Olivier Brunel

 

 

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