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Une Résurrection inaboutie Paris Maison de la radio et de la musique 09/24/2024 - et 25* octobre 2024 Gustav Mahler : Symphonie n° 2 Hanna-Elisabeth Müller (soprano), Karen Cargill (mezzo)
Chœur de Radio France, Lionel Sow (chef de chœur), Orchestre national de Radio France, Cristian Măcelaru (direction)
 C. Măcelaru (© Christophe Abramowitz)
On n’en finit plus, à Paris, d’entendre la Résurrection de Mahler – deux ans après Aix‑en‑Provence, Esa‑Pekka Salonen va bientôt la diriger à la Grande Halle de la Villette pour accompagner le spectacle de Romeo Castellucci. Cristian Măcelaru a‑t‑il relevé le défi ? Oui et non.
L’Allegro maestoso initial, au tempo assez ample comme souvent le reste de la Symphonie, convainc par le travail sur les nuances et l’articulation, la précision d’une lecture plus descriptive que narrative. On y perçoit une juxtaposition de climats, avec des contrastes un peu artificiellement exacerbés, pas la tension continue du Totenfeier. Des climats au demeurant très suggestifs et très beaux plastiquement, dans le mystérieux Sehr mässig und zurückhaltend par exemple. Mais la construction reste trop relâchée. Le ländler de l’Andante moderato, en revanche, séduit beaucoup plus, parce que le chef roumain y restitue le côté « Europe centrale », la Gemütlichkeit viennoise, notamment à travers la reprise en pizzicato. Le troisième mouvement ne s’avère pas moins réussi, qui restitue l’ironie du prêche de saint Antoine de Padoue au poissons, le lied dont il est issu. Dans « Urlicht », tiré aussi du Knaben Wunderhorn, se déploie l’opulent mezzo de Karen Cargill, dont le timbre et le phrasé ne font malheureusement pas oublier un vibato envahissant.
Le final laisse de nouveau perplexe, faute d’une architecture serrée – certes, ce n’est pas le final mahlérien le plus rigoureusement bâti. On apprécie l’inferno convulsif du Jugement dernier, remarquablement maîtrisé, mais la tension s’émousse ensuite, tout se découd jusqu’à l’entrée du chœur, magnifique, et d’une soprano guère irradiante. Même si l’hymne final ne manque pas de grandeur, l’ensemble du mouvement paraît un peu inabouti et l’on n’y sent pas assez le mystère de la mort et de la résurrection, le passage des ténèbres à la lumière, de l’effroi à l’espoir. Une dimension échappe ici à Cristian Măcelaru, que l’on avait trouvée chez Mikko Franck il y a deux ans. Il tire en tout cas le meilleur de son orchestre, qu’il pousse dans ses retranchements et dont on admire surtout les bois.
Didier van Moere
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